« REFLECTIONS EN MARGE » Au micro journaliste indépendant Boris Toumanov

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 La fièvre monte dans l’espace post-soviétique. Après l’opposition moldave qui a protesté pendant ces derniers jours contre les résultats officiels des élections législatives, c’est l’opposition géorgienne qui est sortie à son tour dans les rues de Tbilissi avec la ferme décision d’y rester jusqu’à la démission du président Saakashvili.
Tout au début, c’est-à-dire jeudi cette manifestation a rassemblé quelques dizaines de milliers de personnes. L’opposition a donné à Mikhaïl Saakashvili 24 heures pour donner sa démission en menaçant en cas de refus d’organiser une campagne illimitée de désobéissance civile. Cet ultimatum n’a pourtant nullement impressionné le leader géorgien qui a déclaré qu’il n’abandonnera son poste avant l’échéance légale de son mandat donc pendant les quatre ans à venir.
Dès lors Mikhaïl Saakashvili et l’opposition jouent au jeu de la barbichette, et il est très probable que c’est les détracteurs de M. Saakashvili qui flancheront tôt ou tard pour avoir la tapette comme ç’a été déjà le cas en automne 2007
Parmi les leaders de l’opposition on note la présence de Mme Nino Bourdgeanadzé, ex-speaker du parlement géorgien, de Mme Salomé Zourabishvili, ex- ministre des Affaires étrangères, et de M. Irakli Alassania, ex-ambassadeur de la Géorgie auprès de l’Onu. Ils promettent de rester avec les manifestants aussi longtemps qu’il faudra pour obtenir le départ de M. Saakashvili. «Un président qui a perdu la guerre et qui n’a même pas songé à apporter des excuses à son peuple doit partir», a déclaré Mme Bourdgeanadzé en s’adressant à la foule massée devant le parlement.
On retiendra que la date de la manifestation marque le vingtième anniversaire de la tragédie qui a eu lieu à Tbilissi le 9 avril 1989 quand l’armée soviétique a cruellement reprimée une manifestation anticommuniste en laissant derrière elle vingt morts et une centaine de blessés. Cet événement a douloureusement marqué la conscience nationale, ce qui retient M. Saakashvili d’employer la force contre les manifestants pendant au moins quelques jours à venir. Il n’en est pas moins évident qu’il n’a aucune intention de céder à la demande de l’opposition mais préfère attendre avant d’élaborer une riposte efficace à ses détracteurs.
Dans cette partie de bras de fer qui s’annonce entre l’opposition et M. Saakashvili ce dernier dispose de deux atouts. Rappelons que l’opposition demande son départ en l’accusant d’avoir entrainé la Géorgie dans un conflit armé avec la Russie qui a eu comme conséquence «l’amputation» de l’Ossetie du Sud et de l’Abkhazie. En plus les manifestants lui reprochent la misère sociale qui aurait touché la majorité de la population géorgienne lors de la présidence de M. Saakashvili. Toutefois en janvier dernier ces mêmes accusations ne l’ont pas empêché d’être réelu à la présidence. Cela pour la bonne raison que la politique de M. Saakashvili n’est généralement contestée que dans les grandes villes du pays pendant que la population de «la Géorgie profonde» le soutient sans trop y réfléchir. D’autre part, il sait que l’opposition géorgienne reste profondement divisée, ce qui veut dire que même si M. Saakashvili lui propose un compromis en accéptant les élections anticipées elle n’aurait aucune chance de le battre sur ce terrain.
Entre temps la diaspora arménienne en France à l’intention d’ajouter son grain de sel à cette situation. Elle entend protester mardi prochain à Paris devant l’ambassade géorgienne contre «le nationalisme dont les autorités géorgiennes feraient preuve vis-à-vis de la communauté arménienne de la Géorgie».
La situation reste et restera explosive en Géorgie dans la mesure où un éventuel recours du pouvoir à la force où une provocation risquent cette fois d’y semer le chaos à l’échelle nationale. Moscou reste indécis devant une telle perspective. Certains experts russes estiment que le départ éventuel de M. Saakashvili sous la pression populaire serait un scénario optimal pour la Russie. Tout porte à croire cependant que c’est là un espoir plutôt illusoire compte tenu du fait que l’opposition géorgienne ne semble guère capable de faire durer trop longtemps l’affrontement actuel.

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