L'OTAN face à des choix difficiles

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Par Andreï Fediachine, RIA Novosti
Par Andreï Fediachine, RIA Novosti

L'OTAN doit être très reconnaissante au destin, qui a voulu que le sommet de l'organisation, vendredi et samedi à Strasbourg et Kehl, se tienne après la rencontre du G20 à Londres. Le sommet de Londres s'étant cassé les dents sur bien des dossiers, ce qui ne sera pas réussi lors de la grande réunion de l'Alliance ne prendra pas l'air d'une catastrophe.

Si l'on fait abstraction de la pléiade de toasts rituels qui seront prononcés à l'occasion de ce sommet anniversaire (attachement aux principes fondamentaux du bloc, avenir de l'OTAN dans le cadre de la coopération euro-atlantique, réforme, modernisation, mérites, acquis), on constate que les points concrets de l'ordre du jour sont difficiles. Ce sont la stratégie de l'OTAN en Afghanistan, l'état et les perspectives de la coopération avec la Russie, l'élaboration d'une nouvelle conception stratégique de l'Alliance.

En fait, le président Barack Obama est venu en Europe pour discuter du premier de ces points. Il a besoin d'une "nouvelle contribution" de l'Europe à la lutte contre les talibans en Afghanistan. Les Américains voudraient que leurs collègues européens promettent fermement d'envoyer 4.000 hommes de plus et leur matériel en Afghanistan. Les Européens y sont opposés. Le problème est d'autant plus complexe que l'OTAN n'a pas de stratégie d'actions en Afghanistan, les Américains n'ayant toujours pas dévoilé la leur. Durant le mois de mars, les Américains et les dirigeants de l'OTAN ont essayé fébrilement de sortir de cette situation et de persuader l'Europe d'envoyer ne serait-ce qu'un petit renfort en Afghanistan, afin d'éviter de se trouver dans une impasse au sommet.

Le problème des rapports entre l'OTAN et Moscou est directement lié à cette question. L'OTAN est bien consciente que, sans la Russie, sans coopération avec elle, sans ses corridors terrestres et aériens, nécessaires pour ravitailler les troupes déployés en Afghanistan, il est impossible de remporter une victoire rapide. Or, il devient de plus en plus difficile d'escompter une coopération avec la Russie (laquelle n'a du reste même pas été invitée à ce sommet). Premièrement, parce que l'OTAN n'a toujours pas abandonné ses projets d'élargissement et, en second lieu, parce que les Etats-Unis n'ont pas renoncé à déployer leur nouveau système de défense antimissile en Europe.

Il faut dire un mot, enfin, d'une chose incroyable pour l'OTAN: à la veille de ce sommet anniversaire, le nom du nouveau secrétaire général de l'Alliance demeure inconnu. D'habitude, il est révélé quelques mois avant le départ de l'"ancien" secrétaire. Ce retard dans le choix de la candidature du nouveau patron politique de l'OTAN s'apparente beaucoup à un syndrome. C'est une manifestation de la principale maladie du bloc, qui essaie de se transformer, d'alliance militaire, en alliance militaire et politique globale, mais qui n'arrive pas à inventer une nouvelle idéologie pour cela. Si bien que l'OTAN continue de se nourrir de thèses remontant, à tout le moins, aux années 80.

A une semaine du sommet de Strasbourg-Kehl, le premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen, 56 ans, tenait la corde pour le poste de secrétaire général. Des piliers de l'OTAN tels que la Grande-Bretagne et l'Allemagne, ainsi que la France, qui a décidé de rejoindre son commandement militaire intégré, ont opté pour sa candidature.

Mais la Turquie se prononce contre Anders Fogh Rasmussen. Ce membre majeur de l'Alliance, dont la population est très majoritairement musulmane, est extrêmement mécontent de la candidature du Danois. Ce mécontentement s'explique par les scandales qui ont suivi la publication, en 2005, de caricatures du prophète Mahomet dans des journaux danois. Anders Fogh Rasmussen avait refusé, et refuse toujours, de condamner ces publications. Le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a déclaré que des pays musulmans (il n'a pas précisé lesquels) lui avaient demandé d'opposer un veto à la candidature de Rasmussen. Or, selon la procédure en vigueur à l'OTAN, cette candidature est approuvée par consensus.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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