La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

Certains médias critiquent l'UE et l'OTAN pour avoir déjà "oublié" la guerre en Géorgie et avoir "pardonné" trop vite la Russie qui, selon les experts, n'a pas abandonné ses objectifs de la politique étrangère. "Il est regrettable que les pays d'Occident aient adouci si vite leur attitude envers la Russie après le conflit dans le Caucase et qu'ils soient revenus aux rapports antérieurs � Les troupes russes se sont retirées de Géorgie, mais la Russie ne renonce pas à sa position, loin s'en faut, affirme Sven Mikser, président de la commission parlementaire des affaires internationales". (Eesti Päevaleht, 23.10).

Les médias expriment des appréhensions face à une réduction considérable du nombre de non-citoyens désireux d'obtenir la citoyenneté estonienne. Les commentateurs supposent que l'Estonie aura encore plus de raisons de craindre la Russie qui est capable de se lancer à la défense de ses compatriotes. "La politique d'intégration de l'Estonie est menacée d'une crise profonde, les gens comprennent qu'elle peut avoir de lourdes conséquences à la lumière de la guerre en Géorgie. Selon les estimations des sources dignes de foi, cette année, au moins 600 personnes ont obtenu la citoyenneté russe. Ce nombre peut être plus grand, mais l'ambassade russe ne publie pas de données exactes. Le nombre de citoyens russes résidant constamment en Estonie, qui constituait jadis un peu moins de 100.000, a commencé à s'accroître rapidement. Une question se pose : dans quelle situation peut se retrouver l'Estonie, si l'accroissement du nombre de personnes ayant des passeports russes n'est qu'au stade initial. Le nombre de citoyens russes résidant en Estonie peut doubler grâce aux non-citoyens. Mais le comportement du voisin de l'Est envers la Géorgie a été exactement le même : il avait distribué des passeports russes dans les régions séparatistes pour justifier ensuite son ingérence par la protection des concitoyens". (Eesti Päevaleht, 27.10).

LETTONIE

Les journalistes informent les lecteurs de la campagne de propagande menée avec esprit de suite par le Kremlin dans les pays de la région. "Des changements ont été remarqués dans la stratégie politique de la Russie. Un fait alarmant : la centralisation vertigineuse du pouvoir d'Etat s'accompagne de l'exaltation du stalinisme et de l'impérialisme russe. Les horreurs dont témoignent les documents exposés au Musée letton de l'occupation � sont qualifiés de "propagande hostile à la Russie", contre laquelle il faut mener une lutte systématique et bien organisée � Ainsi, Igor Panarine, doyen de la section du soir de la Faculté des relations internationales de l'Académie diplomatique du ministère russe des Affaires étrangères, invite à lutter contre "l'information des ennemis géopolitiques de la Russie", en rétablissant l'appareil de propagande de la politique étrangère datant de l'époque soviétique et en utilisant dans la lutte informationnelle les ressources non seulement de l'Etat, mais aussi celles des entrepreneurs privés". (Diena, 23.10).

LITUANIE

Certains médias prédisent à la Russie une nouvelle "parade des souverainetés". De l'avis des analystes, à la suite des tendances économiques négatives dans le monde, certaines régions faisant partie de la Russie souhaiteront devenir indépendantes vis-à-vis de l'"agresseur". "L'unité de la Russie est en question. Il se peut que ceux qui sont moins dépendants du centre et qui développent indépendamment des contacts avec des voisins plus progressistes puissent survivre dans la période à venir. Pour le Kamtchatka, ce sont l'Amérique et le Japon. Naturellement, cet exemple peut inspirer d'autres régions. Par conséquent, des foyers de séparatisme peuvent surgir spontanément. Le contrôle rigoureux du centre risque d'entraîner une situation révolutionnaire. Peut-être, ce serait mieux. Cela recèle, peut-être, les possibilités latentes de la renaissance de la nation en voie d'extinction. Quoi qu'il en soit, le problème du sauvetage de la Russie est de nouveau actuel et son règlement ne peut venir de l'extérieur. Premièrement, tout le monde ne manque pas non plus de problèmes, deuxièmement, à quoi bon aider un agresseur?" (Delfi.lt, 24.10).

Les médias tranquillisent les lecteurs : pour l'instant, la Russie n'attaquera pas la Lituanie, la Lettonie et l'Estonie. Mais, dans une perspective historique, une agression de Moscou contre les pays baltes est probable, estiment les analystes. "L'agression de la Russie contre les pays baltes serait un défi directement jeté à la civilisation occidentale. Il est rassurant que la Russie n'est pas prête en ce moment à la lutte finale contre les Etats-Unis et l'Europe. Si la Russie avait décidé d'attaquer les pays baltes, ils auraient eu l'honneur" d'être inscrits dans l'histoire du début de la Troisième Guerre mondiale". (Runet.lt, 23.10).

BIELORUSSIE

La presse écrit sur l'incompatibilité du projet d'Union Russie-Biélorussie avec le système politique qui s'est établi en Biélorussie et qui a à sa base le pouvoir personnel illimité du président qui est, cependant, contraint, pour des raisons économiques, de simuler un processus d'intégration. "Toutes les variantes avec un centre supranational "fort", même s'il ne s'agit pas de l'adhésion de la Biélorussie au sein de la Russie - placent Minsk dans une situation d'une partie lésée, car n'importe quelle instance de contrôle indépendante de la volonté de Minsk sera inévitablement considérée comme une menace pour la classe politique consolidée. Même une perte partielle du contrôle sur les ressources économiques est considérée par la classe au pouvoir comme une menace directe. En fait, ce qui vient d'être énuméré met un point final à l'édification de l'Union. Pourquoi donc est-elle relancée? Parce qu'on a vu apparaître de nouveaux acteurs (Abkhazie et Ossétie du Sud) et parce que l'automne est arrivé. L'automne signifie le début de la saison de chauffage et les nouveaux acteurs signifient la possibilité de mettre à leur profit l'architecture et les fonctions de l'Union". (Nache mnenie, 23.10).

Les médias voient un lien direct entre le montant d'un nouveau crédit russe pour la Biélorussie et, en fait, le refus d'Alexandre Loukachenko de reconnaître la souveraineté de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud. "Les autorités biélorusses augmentent la dette extérieure du pays à des cadences vertigineuses. L'année dernière, la Biélorussie avait emprunté 1,5 milliard de dollars à la Russie. Cette année, elle a demandé encore 2 milliards de dollars. Il y a quelques jours, (le ministre russe des Finances) Alexeï Koudrine a annoncé la volonté d'accorder un nouveau crédit à Minsk. Un milliard de dollars est une somme assurant la survie, mais pas le développement. C'est le résultat de la non-reconnaissance par Alexandre Loukachenko de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie, malgré sa promesse de le faire. Puisque cette question est en suspens, la Russie a de son côté suspendu la question du crédit. N'étant pas intéressée à la déstabilisation de l'économie biélorusse, la Russie a spécialement alloué une somme permettant d'éviter l'effondrement, mais aussi de faire en sorte que Minsk sente qu'il lui manque de l'argent". (Solidarnost, 23.10).

UKRAINE

Les commentateurs sont certains que les projets du Kremlin de renforcer la capacité défensive du pays n'ont pas de fondements réels dans les conditions de la crise financière mondiale qui touche également, dans une mesure considérable, la Russie. "Les propos sur les bases militaires dans des pays lointains et sur le réarmement massif de l'armée ne sont qu'une déclaration d'intentions que Moscou n'est pas en mesure de mettre en oeuvre. L'objectif de la Russie de montrer au monde la puissance militaire croissante ne s'inscrit pas tout à fait dans l'évolution de l'économie mondiale � Gazprom a perdu en six mois environ 200 milliards de dollars, soit cinq budgets de défense du pays. Cette tendance peut se conserver dans le contexte de la réduction ultérieure des prix du pétrole. Les conversations sur de nouveaux lieux de stationnement de la Marine de guerre russe, ainsi que sur les grandioses plans de réarmement de l'armée, resteront des palabres". (Kommentarii, 23.10).

Les médias désapprouvent l'ordre du gouvernement ukrainien d'arrêter, à partir du 1er novembre, les émissions de toutes les chaînes de télévision russes sur le territoire du pays, en soulignant que les véritables raisons de cette initiative résident dans la politique. "Quelles sont les raisons de l'"atteinte" aux chaînes russes? La principale raison est politique. Le chef de l'Etat et le Conseil de sécurité nationale et de défense ont maintes fois exigé qu'on assure la "sécurité de l'information du pays". Selon eux, la principale menace émane des chaînes de télévision russes qui transmettent l'information interdite pour les chaînes ukrainiennes. L'information russe, selon laquelle l'Ukraine a livré de grandes quantités d'armes à la Géorgie a été un exemple le plus éclatant. A de rares exceptions près, les chaînes ukrainiennes ont commenté les événements de façon unilatérale et l'autre partie ne pouvait être entendue que dans les reportages des journalistes russes employés par des chaînes "non adaptées" (à la législation ukrainienne). Par contre, tous les habitants de l'Ukraine, petits et grands, y compris les bébés, peuvent regarder sans entraves, avec l'autorisation du Conseil national pour la télévision et la radiodiffusion, deux chaînes érotiques : Spice (Pays-Bas) et Adult Channel (Grande-Bretagne), ainsi que la chaîne religieuse CNL TV (New Life Cannel, Etats-Unis)". (2000, 25.10).

ARMENIE

Certains observateurs essaient de prévoir le développement des événements autour du Nagorny-Karabakh, en soulignant que le territoire de conflit serait "partagé" non seulement par l'Arménie et l'Azerbaïdjan. "L'un des principes fondamentaux du droit international - inviolabilité des frontières et de l'intégrité territoriale - a été violé deux fois. D'abord, par les Américains (au Kosovo), ensuite, par la Russie (dans le cas de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud) � Les événements de ces trois derniers mois ont changé complètement le tableau dans la région. Personne ne doit s'étonner désormais que la contrainte (de la part) des puissances mondiales puisse devenir un mode d'actions. Il se peut que le principe jusque-là immuable, selon lequel le conflit ne peut être réglé que par un accord entre les deux parties, l'Arménie et l'Azerbaïdjan, puisse tomber dans le néant. On verra s'ajouter à cette thèse ce qui suit : "avec le soutien d'une tierce partie". Alors que chaque force extérieure estimera qu'elle joue le rôle d'arbitre principal" (Azatamtoutioun, 22.10).

Néanmoins, les experts arrivent à trouver des points positifs dans cette situation: tant que la Russie et les Etats-Unis "partagent" le Nagorny-Karabakh, les parties engagées dans le conflit ont un certain champ de manoeuvre. "En ce moment, la lutte sur le front du Karabakh se déroule non pas entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, mais entre les Etats-Unis et la Russie. Chacune de ces deux puissances veut imposer aux parties son propre modèle de règlement. Cela assure à l'Arménie et à l'Azerbaïdjan la possibilité de manoeuvrer, car rien n'est concerté d'avance dans le Groupe de Minsk de l'OSCE, au contraire, ses deux principaux représentants "torpillent" les initiatives réciproques. Par conséquent, rien ne menace la coopération stratégique arméno-russe et beaucoup d'eau coulera encore sous les ponts avant que le processus des négociations sur le règlement du conflit du Karabakh ne soit terminé. (Ayots Achkhar, 23.10).

Selon les médias, n'importe quelle variante de règlement du conflit signifiera pour Moscou la perte de son influence dans le Caucase du Sud. " Dès le début du conflit, la Russie n'était pas intéressée à régler ce problème. En effet, depuis déjà 20 ans, le conflit du Karabakh reste pour les Russes le moyen le plus efficace de contrôler l'Arménie et l'Azerbaïdjan, c'est pourquoi, il n'est pas sérieux de penser que la Russie puisse abandonner un tel atout en cette période trouble". (Azatamtoutioun, 24.10).

GEORGIE

Les journalistes estiment que la Russie ne reconnaîtra jamais que les véritables coupables de tous ses ennuis siègent au Kremlin. "La Russie qui s'est heurtée à de graves problèmes politiques dans le Caucase du Nord et à la crise économique dans tout le pays commence à chercher des coupables. Bien entendu, ce ne sont pas les tchékistes incompétents du Kremlin. Essayez de deviner : qui est l'ennemi de la Sainte Russie orthodoxe? Certes, la Géorgie. Les actions maladroites de Moscou dresseront, sans notre aide, les peuples caucasiens contre lui � Comme l'a établi le quotidien Izvestia, les autorités géorgiennes vendent des systèmes antiaériens aux Ingouches. Pourtant, nous avons besoin nous-mêmes de moyens antiaériens suffisants : autrement, pourriez-vous survoler en toute liberté notre territoire? Votre armée des ouvriers et des paysans vend des armes même à ses ennemis. Les villas de Roublevka coûtent cher, pour les acheter, on vend même des armes". (Georgia Online, 27.10).

AZERBAIDJAN

L'initiative de Dmitri Medvedev d'organiser début novembre une rencontre des présidents d'Azerbaïdjan, d'Arménie et de Russie en vue de régler le conflit du Karabakh a suscité une large résonance. Les commentateurs jugent possible le déploiement par la Russie de son contingent de paix dans le Nagorny-Karabakh en vue de maintenir son contrôle sur la région. "La Russie peut proposer de libérer les régions occupées autour du Nagorny-Karabakh et d'y déployer ses soldats de la paix. Le problème du statut du Nagorny-Karabach sera ajourné. Dans ce cas, le conflit sera gelé. Cependant, l'Occident ne voudra pas abandonner l'initiative et insistera sur le déploiement d'une force internationale dans la région � Les événements en Ossétie du Sud ont causé un préjudice au prestige international de la Russie, elle veut le rétablir. A cette fin, Moscou tente de jouer le rôle de pacificateur dans le règlement du conflit du Karabakh. La Russie proposera une variante qui lui permettra de conserver son contrôle dans la région. Si l'Azerbaïdjan renonce à cette variante, la Russie déclarera une nouvelle fois: "Nous avons proposé une variante de règlement du conflit, mais les parties ne se sont pas parvenues à un accord". (Zerkalo, 24.10). "L'initiative russe concernant le Karabakh est un pub, une tentative de montrer ses intentions pacifiques au monde, mais elle ne contribue réellement au règlement du problème. La Russie vise à démontrer sa supériorité sur les médiateurs européens dans le règlement de ce conflit qui se penchent sur des problèmes importants". (1News.az, 27. 10).

KAZAKHSTAN

Débattant du modèle des relations interétatiques au sein de la CEI (Communauté des Etats indépendants) dans les conditions de la crise financière mondiale, les analystes réservent inconditionnellement à la Russie le rôle de "premier parmi les égaux". A leur avis, Astana pourrait aider Moscou à "tirer" ses partenaires au sein de la Communauté de la situation économique embarrassante. "La Russie et, partiellement, le Kazakhstan pourraient jouer le rôle d'administrateurs de la CEI au cours de la crise, en y mettant de l'ordre dans l'intérêt de leurs propres milieux d'affaires. Moscou et Astana pourraient aider à rembourser les dettes du Tadjikistan et du Kirghizstan en échange des avantages obtenus dans l'économie de ces pays, des actions des ouvrages industriels, y compris les projets du secteur énergétique qui détermineront par la suite toute la situation énergétique en Asie centrale". (Delovaïa nedelia, 24.10).

Les observateurs estiment que, dans la situation de la crise structurelle, la CEI reçoit une chance non seulement de se conserver, mais aussi de renforcer ses positions. "Un moment de vérité qui arrive pour la CEI montrera si les hommes politiques sont capables de passer des révérences politiques aux actions économiques et financières communes concrètes. Beaucoup dépendra ici de l'influence des premiers personnages des Etats de la Communauté sur ces processus. S'il s'avère impossible de se réunir réellement en ce moment difficile, dès que la situation se stabilisera sur les marchés financiers mondiaux, on pourra prédire de façon sûre la réapparition des forces centrifuges sur tout le territoire de la CEI". (Delovaïa nedelia, 24.10).

TURKMENISTAN

Les experts estiment que la politique pluraliste du Turkménistan irrite la Russie. "En 2007, Gourbangouly Berdymoukhammedov avait annoncé la politique pluraliste dans le secteur énergétique, ce qui prévoit l'exportation de ressources énergétiques vers n'importe quels pays aux conditions mutuellement avantageuses. Le Turkménistan a commencé à mener intensivement des négociations avec les acheteurs potentiels de pétrole et de gaz, à fixer les prix des hydrocarbures "compte tenu des tendances mondiales". Cependant, l'exportation d'hydrocarbures turkmènes est limitée par les gazoducs de Gazprom existant depuis l'époque soviétique, par lesquels le gaz est transporté vers la Russie en passant par le territoire de l'Ouzbékistan et du Kazakhstan. Moscou cherche à conserver son influence sur Achkhabad, en empêchant la participation turkmène aux projets énergétiques alternatifs. Le projet de gazoduc Transcaspien activement soutenu les Etats-Unis et l'UE, ainsi que la construction d'un gazoduc vers la Chine qui transportera 30 milliards de m3 de gaz turkmène par an, suscitent l'irritation du Kremlin � Le changement de la situation politique dans un des pays participant au réseau international de gazoducs influe directement sur le processus des livraisons énergétiques. La récente guerre en Ossétie du Sud s'est répercutée sur le transport d'hydrocarbures par le pipeline Bakou-Tbilissi-Ceyhan, la Russie emploie souvent l'instrument énergétique dans ses divergences politiques avec l'Ukraine", (Gundogar.org, 20.10).

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