La visite effectuée dimanche dernier par le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas à Damas et les négociations qui ont eu lieu avec le président syrien Bachar al-Assad sont passées presque inaperçues. Les médias occidentaux, comme la presse arabe, n'ont pratiquement pas réagi. Selon l'agence d'information syrienne SANA, les interlocuteurs se sont entretenus, pour l'essentiel, des moyens de surmonter la scission interpalestinienne.
Mais le but principal de la rencontre Abbas-Assad consistait non pas à surmonter la scission, mais à déterminer qui la Syrie acceptera de reconnaître en tant que futur leader de tous les Palestiniens. Le fait est que le mandat de Mahmoud Abbas en tant que président de l'Autorité palestinienne expire le 9 janvier 2009. Il avait été élu à ce poste il y a cinq ans, à la suite des élections générales qui s'étaient tenues après la mort de Yasser Arafat.
Les Palestiniens sont actuellement divisés et la guerre civile fait rage. Par conséquent, il ne peut être question d'élections générales en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Le poste de président de l'Autorité est convoité à la fois par Mahmoud Abbas, qui l'assume actuellement, et par Ismaël Haniyeh, représentant du Hamas et chef actuel du gouvernement des islamistes à Gaza, non reconnu officiellement.
Faisons un bref retour en arrière. En février 2007, les mouvements palestiniens Fatah et Hamas avaient signé à La Mecque, sous l'égide du roi d'Arabie Saoudite, un traité commun sur la formation d'un gouvernement d'unité nationale. Le roi d'Arabie Saoudite Abdallah ben Abdel Aziz Al-Saoud en avait pris l'initiative et avait joué le rôle de médiateur lors des négociations. Le document avait été signé par le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas, leader du Fatah, et le chef du bureau politique du Hamas Khaled Mechaal. La signature du document avait été motivée par la promesse du monarque saoudien d'accorder un milliard de dollars au nouveau gouvernement palestinien.
Cependant, malgré ces promesses généreuses, l'unité palestinienne ne résista pas longtemps. Quatre mois après, en juin 2007, les islamistes radicaux du Hamas perpétrèrent un coup d'Etat armé dans la bande de Gaza, en renversant leurs concurrents politiques, les partisans du Fatah de Mahmoud Abbas. Ce dernier, qui se trouvait alors en Cisjordanie, à Ramallah, accusa le Hamas de haute trahison et rompit tous les contacts avec les dirigeants du mouvement. Il fut immédiatement soutenu par Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne qui cessèrent également tout contact avec le Hamas. La Russie et le monde arabe, tout en reconnaissant Mahmoud Abbas comme le président de l'Autorité palestinienne, n'ont cependant pas mis le Hamas hors la loi, et jouent actuellement le rôle de médiateurs désireux de rétablir le dialogue entre les deux mouvements palestiniens opposés.
La Syrie entretient des rapports très chaleureux avec le Hamas. C'est à Damas que réside en permanence le président du bureau politique du mouvement, Khaled Mechaal, principal opposant de Mahmoud Abbas. Grâce à son influence sur le Hamas, la Syrie est l'un des principaux joueurs sur l'échiquier palestinien. C'est pourquoi le président de l'Autorité palestinienne a un besoin vital du soutien de Damas, et également des autres pays arabes.
Pour l'instant, la Syrie garde le silence et ne révèle pas si elle considérera Mahmoud Abbas comme le dirigeant des Palestiniens après le 9 janvier, ou bien si elle accordera sa préférence au représentant du Hamas. Dans l'interview qu'il a accordée aux journalistes dans la capitale syrienne, Mahmoud Abbas a préconisé la convocation, dans les plus brefs délais, d'une rencontre entre tous les mouvements palestiniens. Elle devrait avoir lieu fin octobre - début novembre au Caire. Mais il est peu probable qu'elle donne de bons résultats. Même si les hommes politiques palestiniens réussissent à se réconcilier, on imagine mal que cela puisse conduire à une percée dans le processus de paix palestino-israélien, percée que le président américain George W. Bush avait pourtant annoncée de façon grandiloquente il y a un an à Annapolis.
Le fait est que deux autres acteurs importants du Proche-Orient - Israël et les Etats-Unis - n'ont aujourd'hui manifestement pas le temps de penser à la Palestine, à l'approche d'un changement de pouvoir tant à Washington qu'à Tel-Aviv. Tant que le premier ministre sortant Ehud Olmert ne démissionnera pas définitivement et que Tzipi Livni, son successeur, ne formera pas un nouveau cabinet des ministres, il sera impossible d'envisager des démarches sérieuses de la part d'Israël en direction de la paix. Elles ne sont pas non plus à l'ordre du jour aux Etats-Unis, et cela durera tant que George W. Bush ne sera pas parti, et qu'un nouveau maître ne se sera pas installé à la Maison Blanche. Cela signifie qu'une accalmie relative se maintiendra dans les prochains mois sur le front politique proche-oriental.
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