Tzipi Livni saura-t-elle se montrer à la hauteur?

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Par Andreï Mourtazine, RIA Novosti
Par Andreï Mourtazine, RIA Novosti

La chef de la diplomatie israélienne, Tzipi Livni, a été élue à la tête de Kadima, le parti au pouvoir, en dépassant de justesse (seulement 2%) son adversaire, le ministre des Transports, Shaul Mofaz. Elle a désormais toutes les chances de devenir le nouveau premier ministre du pays.

Si cela arrive, Livni sera la première femme à diriger l'État hébreu depuis Golda Meir, qui était restée à la tête d'Israël de 1969 à 1974. L'actuel chef du gouvernement, Ehud Olmert, soupçonné de corruption, a refusé de se porter candidat et a promis de démissionner après les élections.

Par la suite, Tzipi Livni devra, en l'espace de 42 jours, former son cabinet, et pour ce faire, il lui faudra retenir autour du parti Kadima la majorité parlementaire au pouvoir. Sinon des élections législatives anticipées devront être organisées dans le pays.

C'est le premier ministre Ariel Sharon qui a amené Tzipi Livni à la grande politique: en 1999, elle devient députée à la Knesset puis ministre de la Coopération régionale et enfin ministre israélienne des Affaires étrangères en 2006.

La juriste et femme politique quinquagénaire, saura-t-elle devenir une deuxième Golda Meir, tant au niveau de sa longévité au poste de premier ministre que par rapport au respect qu'éprouvait la société pour sa prédécesseur? Nombreux sont ceux qui estiment qu'elle a de grandes chances d'y parvenir. Premièrement, Livni jouit pour l'instant d'une réputation sans tâche. A la différence de l'actuel chef du gouvernement, Ehud Olmert, ainsi que des anciens premiers ministres Ariel Sharon et Benyamin Netanyahou, le nom de Livni n'a jamais été évoqué dans des scandales financiers ou sexuels en Israël. Deuxièmement, Tzipi Livni a déjà cumulé une expérience politique non négligeable grâce à son poste de ministre des Affaires étrangères. Troisièmement, elle a servi dans les services de renseignement israéliens (le Mossad). On parle peu de cette période de sa vie, mais selon la presse américaine, au début des années 1980, elle aurait participé à des "opérations de neutralisation des combattants terroristes arabes".

Cependant, en dépit de son passé militaire, Livni n'est pas considérée comme le "faucon" de Sharon mais comme la "colombe" d'Olmert. Le prénom même de Tzipi signifie "oiseau" en hébreu. Or, ceux qui connaissent personnellement cet "oiseau" la qualifient de femme forte et déterminée à réaliser ses objectifs. Livni sait se tenir en public, elle sait convaincre ses interlocuteurs et son auditoire. Tout cela signifie, par ailleurs, qu'un beau jour, cette "colombe" pourrait bien se transformer en "faucon". Cela dépendra de plusieurs facteurs, tant intérieurs qu'extérieurs.

Jusqu'à présent, en occupant le poste de ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni appliquait la politique extérieure "modérée" d'Ehud Olmert. Elle continuera sans doute dans l'avenir si les extrémistes palestiniens ou libanais ne poussent pas Israël, au moyen de provocations, à engager une nouvelle guerre. Concernant les négociations avec les Palestiniens, la position d'Israël diffère guère de celle des Etats-Unis jusqu'à présent, et elle restera sans doute la même. Il s'agit de soutenir l'idée de créer un Etat palestinien en Cisjordanie et dans la bande de Gaza. Tzipi Livni est prête à dialoguer uniquement avec l'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas et refuse catégoriquement tout contact avec le Hamas.

Un accord de paix transitoire aves les Palestiniens (le président américain George W. Bush et la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice l'ont plusieurs fois déclaré) pourrait théoriquement être conclu avant la fin de l'année, c'est-à-dire, sous l'actuelle administration de la Maison Blanche, mais même si cela arrive, il s'agira d'un accord avec Abbas et non avec le Hamas.

Ce qui signifie que les perspectives de paix en matière de négociations avec les Palestiniens restent extrêmement floues même avec un nouveau premier ministre. Il en va de même pour les Syriens. Il est peu probable que Tzipi Livni parvienne à convaincre la société israélienne de rendre à Damas les hauteurs du Golan, occupées par Israël depuis la guerre de 1967. Même si "l'oiseau" essaie de le faire elle-même, cela lui sera impossible, car il sera nécessaire d'obtenir l'assentiment de la Knesset. (En Israël, le premier ministre n'a pas le droit de décider en toute indépendance, sans demander l'avis du parlement, des questions de guerre et de paix). Seuls des leaders charismatiques comme feu le premier ministre Yitzhak Rabin ou Ariel Sharon, qui se trouve toujours dans le coma, étaient capables de convaincre la Knesset de céder des territoires.

Dans les rapports avec la Russie, Tzipi Livni s'en tiendra sans doute à la politique actuelle, visant à développer des relations économiques, politiques et culturelles bilatérales. Par ailleurs, Tel-Aviv poursuivra ses tentatives pour persuader Moscou de suspendre sa coopération avec l'Iran et la Syrie, en particulier dans le domaine militaire et énergétique.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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