Revue de la presse russe du 22 août

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MOSCOU, RIA Novosti

Moskovski komsomolets

La Russie ne devrait pas reconnaître unilatéralement les républiques caucasiennes

La situation actuelle autour de la Géorgie est le premier cas depuis 17 ans dans lequel la Russie ne répond pas verbalement à l'Occident, mais par des actes, lit-on vendredi dans le quotidien Moskovski komsomolets.

La préparation concrète de la reconnaissance de l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud qui, selon certains renseignements, pourrait avoir lieu la semaine prochaine, est un nouveau pas dans le cadre des actions rigides de Moscou témoignant clairement d'un changement radical de sa politique à l'égard de l'Occident.

Vladimir Jarikhine, vice-directeur de l'Institut des pays de la CEI (Communauté des Etats indépendants): "Dmitri Medvedev a promis de soutenir la décision des habitants de ces républiques, quelle qu'elle soit, tout en se référant à la Charte de l'ONU qui précise que la reconnaissance d'un pays doit avoir lieu lors d'une réunion de l'Assemblée générale. La Russie ne doit pas reconnaître unilatéralement les républiques caucasiennes. Dmitri Medvedev peut demander à l'ONU d'examiner le statut de ces républiques, ce que les Nations unies seront obligées de faire.

La reconnaissance de l'indépendance devrait a priori être refusée. Mais la Russie peut adopter une loi intérieure réglementant ses rapports avec l'Abkhazie. Dans ce cas, l'Abkhazie recevra des garanties de sécurité et une indépendance économique. Quant aux Etats-Unis, on peut leur rappeler leur propre loi concernant Taïwan. Cette république n'est pas non plus reconnue par la communauté mondiale, mais en 1972 les Etats-Unis ont conclu avec elle un traité de défense mutuelle.

La conclusion d'un tel traité fera l'affaire de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud, même si la Russie ne reconnaît pas leur indépendance".

Stanislav Belkovski, politologue: "Pour la Russie, il est actuellement très avantageux de reconnaître ces républiques. Il s'agirait certainement de la plus grande victoire du pays en politique étrangère ces dernières années. Mais il ne faut pas oublier que cette reconnaissance frapperait sévèrement les intérêts commerciaux de notre élite politique en Occident. Ces gens se prononcent activement contre la reconnaissance, c'est pourquoi elle prendra sûrement plusieurs années".

Sergueï Markov, directeur de l'Institut d'études politiques: "Si l'Occident continue à soutenir Mikhaïl Saakachvili, ce qui s'est passé en Ossétie du Sud se répètera probablement. Dans ce cas, la préparation d'une nouvelle agression nous placera devant la nécessité d'accorder une aide et de défendre. La reconnaissance de l'indépendance nous permettra d'y introduire nos forces".

Gleb Pavlovski, président de la Fondation pour une politique efficace: "Nous investissons actuellement d'immenses sommes pour la reconstruction de l'Ossétie du Sud. Pouvons-nous être certains que cet argent ne sera pas pulvérisé par de nouveaux tirs de lance-roquettes multiples Grad? A l'étape donnée, la reconnaissance est nécessaire du point de vue pratique. Mais aucun miracle ne se produira si ces républiques ne deviennent pas d'emblée sujets des relations internationales. Cela peut demander quelques dizaines d'années".

Rossiïskaïa gazeta

Coopération avec l'Occident après le conflit géorgien: la Russie doit se décider

La Russie doit décider si elle souhaite poursuivre sa coopération avec la communauté internationale ou si elle préfère occuper une position relativement indépendante, lit-on vendredi dans les colonnes du quotidien Rossiïskaïa gazeta.

Les deux variantes présentent des côtés positifs et négatifs.

A l'étape actuelle, alors que la Russie a déjà entrepris plusieurs tentatives pour coopérer avec l'Occident et que celui-ci a totalement négligé ses arguments, il serait peut-être préférable pour Moscou de faire une pause, de sortir du jeu et de cesser de communiquer avec l'Occident. Mais cela porterait atteinte à tout ce que la Russie et l'Union européenne ont réussi à construire ensemble au cours de ces quinze dernières années. C'est pourquoi la Russie devrait, avant toute chose, retirer, comme le demande la communauté mondiale, ses troupes du territoire géorgien et les faire revenir à des positions où elles peuvent se tenir légitimement. A savoir, aux frontières qui séparent l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie de la Géorgie.

L'Occident, de son côté, doit, évidemment, envisager la situation d'un oeil plus réaliste et ne pas suivre le cours de la politique américaine qui vise à punir la Russie pour la manière dont elle a traité Saakachvili. L'Europe ne doit pas céder aux exigences de l'Amérique, qui ordonne aux Européens de transformer l'OTAN et l'Union européenne en une sorte d'instrument américain destiné à contenir la Russie.

La question principale se posera plus tard: quel avenir pour la Géorgie? Car il est absolument inimaginable aujourd'hui que l'Ossétie du Sud et l'Abkhazie puissent faire partie de la Géorgie.

Quelles sont les différentes issues possibles? Si la Russie se décide à annexer l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, le conflit s'aggravera encore davantage. Si la Russie reconnaît l'indépendance de ces deux républiques, elle risque également de se retrouver seule. Car aucun autre Etat ne voudra reconnaître l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud aussi rapidement. Aussi la démarche de Moscou doit-elle être soigneusement méditée.

Je pense qu'il n'existe qu'une seule issue: les parties doivent parvenir à un compromis et trouver pour la Géorgie le moyen de former une confédération composée de trois Etats. Ce serait une solution raisonnable, qui a d'ailleurs déjà été testée dans les Balkans.

La Géorgie en tant que confédération ne pourra pas, bien entendu, adhérer à l'OTAN. En revanche, les Abkhaz et les Sud-Ossètes recevront tous les leviers et les possibilités nécessaires pour contrôler leurs économies et mener leur propre politique. Dans le même temps, on pourrait ainsi éviter la désintégration complète de la Géorgie.

Par Alexander Rahr, expert du Conseil allemand pour la politique étrangère.

Kommersant

Dmitri Medvedev devient un homme politique indépendant aux yeux des Russes

Le conflit militaire en Géorgie, qui a marqué les cent jours de la présidence de Dmitri Medvedev, a conforté la popularité de celui-ci auprès de ses concitoyens, note vendredi le quotidien Kommersant.

La cote de popularité de Vladimir Poutine a également augmenté dans ce contexte, constatent les principaux services de sondage russes. Les Russes reconnaissent Medvedev comme le numéro un du pouvoir national, mais Vladimir Poutine demeure toujours l'homme politique le plus populaire.

L'opération "d'imposition de la paix" n'a entraîné aucune "envolée" de la popularité de Medvedev ou de Poutine. Cela est dû au fait, estiment les sociologues, que la cote de popularité des deux hommes politiques était déjà extraordinaire avant l'aggravation du conflit osséto-géorgien. Selon le centre d'analyse Levada, 70% des Russes approuvaient les activités du président au mois de juillet (contre 73% aujourd'hui). En ce qui concerne le premier ministre, l'augmentation en proportion est sensiblement la même: 80% en juillet et 83% aujourd'hui.

Aux yeux des Russes, le président est toujours la personnalité officielle numéro un, et ce, depuis ces quinze dernières années, souligne Valeri Fedorov, directeur général du VTSIOM (Centre russe d'étude de l'opinion publique). Cette attitude, selon lui, est permanente et n'a pas changé lorsque Dmitri Medvedev est devenu chef de l'Etat. Cependant, c'est Vladimir Poutine qui est l'homme politique le plus populaire auprès des Russes. C'est son nom qu'ils évoquent en premier lieu (55%) lorsqu'on leur demande de citer cinq ou six hommes politiques dont ils se sentent proches. Dmitri Medvedev vient en deuxième position avec 40%.

Les experts du centre Levada ont établi que de moins en moins de Russes ignorent qui détient le pouvoir réel dans le pays. Pour 14% des Russes, les événements survenus au mois d'août ont prouvé qu'il est entre les mains du président Medvedev (en juillet dernier, 9% seulement étaient de cet avis). 10% des personnes interrogées n'ont pas d'avis sur la question, contre 16% au début de l'année.

En regardant les reportages télévisés sur le conflit militaire osséto-géorgien, les Russes ont compris que le président Medvedev était capable de faire preuve de fermeté et en même temps de pondération, qu'il pouvait formuler des réclamations juridiquement impeccables contre la partie géorgienne tout en grondant sévèrement la Géorgie et ce, sans éviter les jurons, affirme Oleg Saveliev, porte-parole du Centre Levada. Cela a pu convaincre les Russes que, d'une part, Medvedev est un homme politique indépendant, et d'autre part, qu'il s'écarte de plus en plus de la tutelle de Poutine. En tout cas, en juillet dernier, 36% des Russes étaient convaincus que Poutine ne laisserait pas le pouvoir s'échapper de ses mains. Aujourd'hui, c'est l'avis de seulement 26% des sondés.

Vedomosti

L'armée russe a besoin d'être sérieusement réformée

Le conflit qui a eu lieu en Ossétie du Sud a donné à l'armée russe, et partiellement à la flotte, la possibilité de tester leur puissance et de cibler leurs défauts dans la lutte contre un adversaire notoirement plus faible, lit-on vendredi dans le quotidien Vedomosti.

Le développement ultérieur de la situation dépend, pour beaucoup, de l'évaluation que l'Etat et la société feront du bilan de la guerre et des leçons qu'ils tireront des actions militaires.

A première vue, la campagne rapide contre la Géorgie ne donne pas de raisons valables de s'inquiéter. Mais les résultats des combats ont de nouveau mis à jour les défauts de la préparation de l'armée russe et l'insuffisance de son équipement technique. De l'avis des experts du Centre d'analyse des stratégies et des technologies (CAST), ces opérations militaires ont montré que même les meilleures unités de l'armée russe sont dotées de moyens de reconnaissance, de commandement et de liaison dépassés. L'aviation russe, malgré sa supériorité indiscutable, n'a pas pu accomplir certaines missions.

Les spécialistes du CAST et du laboratoire d'économie militaire de l'Institut de l'économie de transition estiment que l'aviation russe n'a pas su paralyser les forces aériennes géorgiennes ni neutraliser les positions d'artillerie et les moyens de DCA de l'adversaire. Il s'est avéré qu'elle manquait d'avions modernisés emportant des bombes et des missiles modernes, capables d'atteindre des cibles tout en maintenant un risque minimum pour les civils.

Les troupes russes ont agi, pour l'essentiel, comme par le passé: des unités d'infanterie motorisée et de blindés ont combattu dans les montagnes. Bien que la formation d'unités de tireurs alpins ait commencé dans le Caucase du Nord depuis quatre ans, elles n'ont pas participé aux hostilités. Enfin, la DCA russe n'a abattu aucun hélicoptère ou avion géorgiens. Cela témoigne, de l'avis des experts, de la faiblesse des moyens dont sont dotés les troupes et de l'instruction insuffisante des équipages.

Certains militaires estiment que ce problème peut être réglé sans procéder à de sérieuses réformes dans l'armée, simplement en renforçant la capacité combative des troupes en les équipant de matériel nouveau. Les militaires espèrent que l'Etat tiendra la promesse faite par le premier ministre Vladimir Poutine de consacrer 70% du budget militaire au réarmement du pays.

Le programme russe de réarmement pour les années 2007-2015 s'élève à 4.900 milliards de roubles, soit 625 milliards de roubles par an (17 milliards d'euros). Mais la Russie dépense déjà des sommes considérables pour équiper son armée: 368 milliards de roubles, soit plus de 10 milliards d'euros, en 2008, c'est-à-dire à peu près autant que la France. Cependant, le niveau de préparation au combat de l'armée russe est sensiblement inférieur.

Le fait que de jeunes appelés sous les drapeaux aient été tués au cours de cette dernière campagne doit retenir l'attention de la société et l'obliger à penser aux sérieux problèmes qui existent dans la structure de l'armée, et à persuader les dirigeants du pays de la nécessité de passer à une armée de métier.

Ces articles sont tirés de la presse et n'ont rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.

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