Obama à Berlin: gare aux lendemains de fête...

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Par Simon Koschut, pour RIA Novosti
Par Simon Koschut, pour RIA Novosti

Les Allemands attendent trop de Barack Obama. Il faut bien le comprendre. Ils espèrent avant tout d'Obama une politique qui soit à l'opposé de celle appliquée par George Bush junior et qu'il puisse traduire dans les faits. Le candidat démocrate incarne, pour les Allemands, ce à quoi ils aspirent depuis longtemps: une Amérique ouverte, tolérante, multiculturelle et prête au dialogue. C'est ce qui distingue Barack Obama de George W. Bush, dont il est une sorte d'antithèse. Autrement dit, les Allemands voient en lui un "bon Américain". Et Obama s'en sert, en se présentant comme un homme ouvert, tolérant et multiculturel. Les Allemands réagissent bien à cette approche, par conséquent, le discours prononcé par le sénateur de l'Illinois à Berlin lui assure de bons clichés pour sa campagne électorale.

Ici, à Berlin, il est accueilli non pas formellement, mais de facto, comme un président déjà élu. Si les Allemands pouvaient élire le président américain, Obama serait déjà élu. Mais tout se décidera aux Etats-Unis où la situation est bien plus complexe. Barack Obama ne devance John McCain que de 4%. Bien des choses peuvent encore arriver. Cependant, en Allemagne, ce fait n'est pas suffisamment pris en considération.

De plus, Barack Obama est considéré comme le nouveau messie, un sauveur qui devrait proclamer du jour au lendemain un nouveau paradis transatlantique. Mais cela n'aura pas lieu. S'il remporte l'élection, Obama sera contraint de s'occuper avant tout des problèmes économiques dans son pays. Quels que soient ses désirs, il ne pourra s'occuper de tout à la fois, il devra se soumettre au Congrès, respecter les principes de freins et de contrepoids et ne pourra pas diriger le pays sans tenir compte de la position du pouvoir législatif.

Le Congrès a déjà laissé entendre, par exemple, qu'il avait l'intention d'appliquer une politique plutôt protectionniste en matière de commerce et d'intervenir dans la politique écologique. Tout cela place dès maintenant Barack Obama dans un cadre assez étroit. S'il devient président, il avancera, tout comme son prédécesseur, de nombreuses exigences aux Allemands, par exemple, celle de participer plus activement aux opérations en Afghanistan ou en Irak.

Mais, pour l'instant, il ne peut aborder ces sujets difficiles que dans les grandes lignes, sans avancer d'exigences concrètes. En effet, Barack Obama n'est encore que candidat à la présidence. C'est pourquoi il s'en tient à un ton modéré en vue de s'attirer le plus de sympathies possible. Son discours de Berlin lui servira en outre à parer les critiques de ses adversaires, qui l'accusent de ne pas avoir une expérience suffisante en politique étrangère.

Il faudra probablement attendre son éventuelle accession au poste de président pour avoir un énoncé plus clair de ses positions. Dans l'ensemble, il est peu probable que Barack Obama justifie pleinement le grand espoir que les Allemands fondent sur lui. Cela pourrait poser problème, car après l'ivresse de la fête, vient toujours le dégrisement.

Simon Koschut est expert de la Société allemande de politique étrangère, spécialiste des Etats-Unis et des rapports transatlantiques.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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