Rédigée par un groupe de pays emmené par les Etats-Unis, la résolution du Conseil de sécurité prévoyait des mesures sévères à l'encontre du Zimbabwe, notamment l'interdiction des livraisons d'armes, le gel des avoirs de Robert Mugabe et de 13 autres hauts responsables du pays, ainsi que l'interdiction pour eux de voyager à l'étranger. Ce document se référait au chapitre VII de la Charte de l'ONU qui permet de recourir à la force afin de faire appliquer une résolution.
Au cours de la réunion du Conseil de sécurité qui s'est tenue dans la nuit de vendredi à samedi, heure de Moscou, sous la présidence de l'ambassadeur vietnamien Le Luong Minh, neuf ambassadeurs ont voté pour la résolution S/2008/447, cinq autres ont voté contre, notamment les représentants russe et chinois, qui ont le droit de veto. L'Indonésie s'est abstenue.
Lorsque le projet de résolution a officiellement été rejeté, un scandale a éclaté au Conseil de sécurité. Bien que la Chine ait également mis son veto, l'ambassadeur britannique John Sawers a adressé ses principales accusations à la Russie, qualifiant son comportement "d'inexplicable". Selon lui, lors du sommet de Hokkaido, Moscou avait adopté avec les autres membres du G8 une déclaration contenant la promesse de prendre des mesures d'ordre financier contre le régime de Robert Mugabe. Comme les propos de l'ambassadeur britannique le laissent clairement entendre, la résolution sur le Zimbabwe aurait été torpillée par la Russie: si Moscou n'avait pas opposé son veto, la Chine n'aurait pas osé dire "non", afin de ne pas aggraver ses rapports avec la communauté mondiale à la veille des Jeux olympiques d'été prévus pour août à Pékin.
L'ambassadeur américain à l'ONU Zalmay Khalilzad s'est exprimé de façon encore plus vigoureuse que son collègue britannique. "Le comportement de la Russie met en doute la confiance envers elle en tant que partenaire du G8", a-t-il affirmé.
Cependant, l'ambassadeur russe Vitali Tchourkine a qualifié les accusations adressées à Moscou selon lesquelles il aurait abandonné les ententes intervenues à Hokkaido d'irresponsables et imprécises. Il s'avère que la Russie interprète la déclaration du G8 sur le Zimbabwe à sa manière et qu'elle y voit un sens complètement différent que celui qu'y voient ses partenaires occidentaux. M. Tchourkine a souligné que ce n'était pas par hasard que la déclaration du G8 ne mentionnait ni le Conseil de sécurité de l'ONU, ni les actions qu'il pourrait initier dans ces circonstances. D'après M. Tchourkine, ce projet de résolution constitue une "ingérence du Conseil de sécurité dans les affaires intérieures des Etats, ce qui va à l'encontre de la Charte de l'ONU".
D'ailleurs, estime un expert de l'ONU, le principal motif de ce veto ne concernait le Zimbabwe que formellement. Moscou ne pouvait tout simplement pas admettre la mise en oeuvre de l'idée des Etats-Unis de créer un précédent, sur la base duquel il serait possible de menacer de sanctions au niveau de l'ONU les pays dont les résultats aux élections ne plairaient pas aux Américains. D'après une source du quotidien Kommersant, "le précédent zimbabwéen aurait pu marquer le début de la légalisation des "révolutions de couleur" par le Conseil de sécurité de l'ONU".
En outre, comme l'a expliqué au quotidien Alexeï Malachenko, expert du Centre Carnegie de Moscou, en opposant son veto à la résolution du Conseil de sécurité sur le Zimbabwe proposée par les Etats-Unis, la Russie a considérablement augmenté les enjeux dans le marchandage géopolitique sur d'autres problèmes cruciaux, allant de l'Abkhazie à l'Iran. En torpillant la résolution sur le Zimbabwe, Moscou essaie de rendre Washington plus conciliant et, en même temps, de démontrer que les possibilités de la diplomatie américaine sont limitées.
Cet article est tiré de la presse et n'a rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.