Il reste un an avant l'élection présidentielle en Iran. Chaque action politique dans ce pays, qui, disons-le tout de suite, ne peut pas se vanter d'une extrême abondance en la matière, est liée d'une manière ou d'une autre à cet événement de premier ordre qui a lieu tous les cinq ans. Cela vaut également pour une certaine publication qui a récemment retenu l'attention de nombreuses personnes.
Le fait que cet article d'Ali Akbar Velayati, un des plus influents représentants de l'establishment de la République islamique d'Iran, qui a été pendant dix-sept ans ministre iranien des Affaires étrangères, ait paru dans le quotidien italien La Repubblica n'est probablement pas un hasard. Bien que Velayati soit privé depuis plusieurs années de la possibilité de s'occuper activement de politique étrangère, il a conservé son influence politique en devenant conseiller diplomatique de l'ayatollah Khamenei, leader spirituel de la République islamique.
Le diplomate iranien annonce dans son article que Khamenei mènera désormais lui-même les négociations sur le programme nucléaire ou, autrement dit, qu'il a libéré Mahmoud Ahmadinejad de cette fonction. La décision du leader iranien s'explique par la nécessité de rechercher un "compromis", "en raison de l'inquiétude générale" suscitée par la situation autour du programme nucléaire iranien.
Comme il ressort des paroles d'Ali Akbar Velayati, l'Iran est prêt à revoir les dispositions principales de la doctrine de politique étrangère du président actuel. Ainsi, l'affirmation selon laquelle le leader suprême "s'inspire dans ses actions de l'idée que la paix sur la planète est fondée sur la reconnaissance de la souveraineté des Etats et le respect des frontières internationales" témoigne clairement du fait que Khamenei n'a pas l'intention de "rayer Israël de la carte du monde". Il estime que "le destin politique des principaux pays qui existent actuellement dans la région doit être l'objet d'élections démocratiques, dont les résultats doivent être acceptés et respectés, si tout le monde - musulmans, Juifs et chrétiens - y participent librement".
De nombreux observateurs sont enclins à considérer cette formule comme la confirmation de la position officielle du pays à l'égard de la reconnaissance d'Israël formulée par l'ex-président Mohammad Khatami. Son essence se résume à ceci: si, un jour, un traité de paix ayant à sa base la coexistence de deux Etats est approuvé à la suite d'un vote palestinien, l'Iran rejoindra les Palestiniens et, par conséquent, pourra reconnaître Israël. Cette décision inattendue, à première vue, du leader spirituel iranien d'assumer la responsabilité de la politique étrangère peut avoir plusieurs explications.
Premièrement, l'Iran prépare le terrain avant d'amorcer le dialogue avec un nouveau chef de la Maison Blanche, il veut engager la discussion sur tous les problèmes clés, pour ainsi dire, à partir de zéro. L'Iran pourrait de cette manière gagner du temps, afin d'effectuer une percée dans la mise en oeuvre du programme nucléaire et d'apaiser les passions autour de ses rapports difficiles avec Israël.
Deuxièmement, le leader iranien a commencé à préparer le remplacement du maître du palais présidentiel et a choisi pour cela aussi bien le moment le plus propice (il reste un an avant l'élection) qu'un des points les plus vulnérables de la politique de Mahmoud Ahmadinejad, en le privant, de fait, d'une partie substantielle de ses fonctions.
La question de savoir qui remplacera Ahmadinejad, et s'il y aura en Iran une opération "successeur" à l'instar de ce qui s'est fait en Russie revient donc au centre de l'attention.
Des personnages qui avaient représenté l'Iran dans l'arène internationale il y a quelques années réapparaissent en ce moment sur le firmament politique du pays, entre autres, Ali Larijani, ancien compagnon de Mahmoud Ahmadinejad, ex-secrétaire du Conseil suprême de sécurité nationale. Il était d'ailleurs chef du groupe chargé des négociations sur le programme nucléaire, mais avait dû quitter l'équipe Ahmadinejad en raison de divergences avec ce dernier. Au printemps dernier, lors des élections au parlement, on considérait Ali Larijani qui s'est présenté en qualité de néoconservateur comme une alternative politique possible au cas où le régime au pouvoir perdrait rapidement des points avant l'élection présidentielle.
Ce pronostic commence à se justifier. L'aura d'Ali Larijani qui agit à présent dans l'arène politique en tant que président du parlement se renforcera probablement à la suite des récents événements. Il est vrai, on ne peut jurer de rien, car s'agissant de l'Iran, les prévisions politiques sont toujours chose très fragile.
Quoi qu'il en soit, la situation actuelle permet indéniablement de conclure que Mahmoud Ahmadinejad perd graduellement les instruments permettant d'influer sur la situation internationale. Cela signifie-t-il qu'il va quitter graduellement l'arène politique? Seul l'avenir nous le dira.
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