Les écueils de l’Union pour la Méditerranée

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A deux mois de la conférence du 13 juillet à Paris, qui devra consacrer la constitution de l’Union pour la Méditerranée, il s’avère que tous les pays candidats de la future Union n’ont pas opté définitivement pour ce projet grandiose, chapeauté par le président français Nicolas Sarkozy, et qu’il reste encore pas mal d’écueils sur la voie vers elle. En témoigne, en particulier, la visite lundi dernier du chef de la diplomatie française Bernard Kouchner en Algérie

A la conférence de presse commune avec le collègue algérien Mourad Medelci à l’issue de sa visite en Algérie le ministre des AE Bernard Kouchner a reconnu qu’il n’avait toujours pas réussi à obtenir des réponses aux questions liées à la position de la direction algérienne concernant l’Union pour la Méditerranée. Ayant noté le haut niveau des rapports bilatéraux entre l’Algérie et la France, il a déclaré, d’autre part, que « tout n’était pas réglé concernant l’organisation et les projets de l’Union pour la Méditerranée ». Bernard Kouchner a de même informé les journalistes n’avoir pas eu de confirmation claire concernant la participation personnelle du président d’Algérie Abdelaziz Bouteflika au sommet de Paris en juillet. Paris semble en effet être sérieusement préoccupé par l’attitude pleine de retenue de l’Algérie envers la future Union, écrit notre observateur Alekseï Grigoriev. Et cela alors qu’au début les dirigeants algériens, tout comme les leaders de la plupart d’autres pays de la côte septentrionale et orientale de la Méditerranée, se sont montrés en somme bienveillants au sujet de l’idée du président Sarkozy des les grouper au sein de l’organisation régionale avec les 27 pays membres de l’Union Européenne.
Les avantages politiques, économiques, humanitaires, sociaux d’une telle association, comme ils sont présentés par l’architecte en chef de l’Union pour la Méditerranée, paraissent vraiment fort attrayants. Après plusieurs mois d’efforts français en faveur de la nouvelle organisation au sein de l’UE, dont beaucoup de membres soupçonnaient au début la France de la créer exclusivement dans son intérêt, on a fait des promesses aux 10 pays riverains de la Méditerranée, qu’il serait semble-t-il difficile de refuser. Dans le même temps, il y a des raisons d’affirmer que les priorités annoncées de la nouvelle Union, dont la lutte contre le terrorisme et l’émigration clandestine, n’étaient que l’encadrement du problème essentiel de l’UE. Il est question d’une colossale dépendance de l’Europe déficitaire en énergie des sources extérieures d’hydrocarbures. Avant tout vis-à-vis de la Russie, sur laquelle tombe déjà un quart du volume du gaz consommé par elle. Peut-être, bien est-ce une simple coïncidence, mais l’idée du président Sarkozy touchant l’Union pour la Méditerranée n’a reçu un développement énergique qu’après que la question sur la formation d’une organisation gazière sur le modèle de l’OPEP pour le pétrole, engageant la Russie, l’Iran, l’Algérie, le Qatar et d’autres pays, eut devenue proche de se concrétiser en un projet politique et énergétique. Nombreux sont les analystes à penser qu’en proposant d’étendre ses contacts avec des pays de l’Afrique du Nord et du Proche-Orient, l’Union Européenne veut voir dans la nouvelle organisation des pays riches en hydrocarbures, avant tout, en gaz. L’Algérie en est justement un. Le président français Nicolas Sarkozy a visité ce pays à deux reprises en douze mois. En avril à Alger la ministre de l’Intérieur de France Michèle Alliot Marie a plus d’une fois répété les propos du président Sarkozy au sujet de ce que Paris considérait l’Algérie comme son partenaire stratégique. Le chef de la diplomatie française Bernard Kouchner parlait lui aussi lundi dernier à Alger de l’importance stratégique de l’Algérie pour la France, comme pour toute la future Union pour la Méditerranée. Il a de même annoncé la visite ici au mois de mai du ministre de l’Ecologie de France Jean-Louis Borloo, suivie de celle du Premier ministre François Fillon. Ce dernier devra signer des accords importants de coopération bilatérale avec l’Algérie en matière de défense et du nucléaire civil, l’entente à propos desquels vient d’être conclue par le chef de la diplomatie française. On comprend que tout ce ballet diplomatique poursuit les buts cardinaux de Paris – parachever la normalisation des rapports avec l’Algérie, commencée déjà par le président Jacques Chirac, et obtenir son accord pour s’engager dans l’Union pour la Méditerranée. Il est significatif que ce lundi Bernard Kouchner a promis à la direction algérienne que le texte de la Déclaration sur la fondation de l’Union ne serait pas publié tant que l’Algérie et quelques autres pays candidats ne se seront pas définitivement prononcés au sujet de la nouvelle organisation. Il a de même rassuré ses interlocuteurs algériens que rien n’était encore décidé à propos du siège de la capitale de la nouvelle Union, que les rumeurs situaient à Tunis. Une certaine pression est exercée ainsi sur Alger en vue de le convaincre pour le moins de ne pas empêcher le processus de la formation de la nouvelle Union, parce que d’autres pays candidats pourraient suivre son exemple. Les organisateurs de la nouvelle Union ont donc d’ici au 13 juillet pour enlever les écueils empêchant sa formation. Quant à l’Algérie, son président Abdelaziz Bouteflika a dit qu’ont attendait de connaître le contenu concret de ce projet.

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