"Je ne fête jamais mon anniversaire. Je trouve que c'est une occasion inappropriée pour réunir une foule de gens. Ce dimanche, je travaillerai comme toujours dans mon atelier", a-t-il précisé.
Cela fait plus de 30 ans que Mikhaïl Chemiakine a quitté la Russie pour s'installer aux Etats-Unis. Il y a un an, il s'est établi en France.
"La France, je l'ai choisie parce que je la connais bien. J'ai quitté les Etats-Unis pour me rapprocher de la Russie, parce que je travaille beaucoup en Russie et pour la Russie, mais psychologiquement et physiquement il me serait pénible d'y revenir. Avec mon expérience de sculpteur, trouver un local et recommencer à vivre en Russie serait très difficile. Je n'y ai rien hormis un bureau que je loue à Saint-Pétersbourg pour ma fondation. Mais je sers et je servirai la Russie. La plupart de mes projets sont liés à ce pays. On ne choisit pas sa patrie", a-t-il dit.
Les projets de Mikhaïl Chemiakine sont essentiellement liés à la Russie, même s'il doit en réaliser quelques-uns en France. Actuellement, il travaille à la création d'un monument consacré aux Français qui ont aidé les juifs à échapper aux nazis sous l'occupation. Le monument sera érigé à Châteauroux, dans l'Indre, où réside actuellement l'artiste. Enfin, M. Chemiakine envisage de multiplier ses expositions en France.
"Je possède 2.000 mètres carrés d'un ancien couvent faisant partie du château de Charles VII à Loches (Indre-et-Loire), a-t-il expliqué. Si je parviens pas à me procurer l'argent pour le restaurer, j'y ouvrirai un centre d'exposition de peintres russes et originaires du Caucase du Nord, car j'ai du sang caucasien dans les veines. Je vais promouvoir l'art russe. De là, nous lancerons, comme on écrit dans les journaux, notre expansion culturelle".
Quant à la Russie, Mikhaïl Chemiakine projette de travailler beaucoup en Sibérie. "J'aime les gens de là-bas. Ils sont très intéressants et diffèrent beaucoup des Moscovites et des "pseudo-Moscovites". Dans la province, je trouve des motifs intéressants et utiles pour mon métier et pour l'art des gens qui y vivent".
L'artiste russe a reconnu que ses oeuvres n'étaient pas très demandées à Saint-Pétersbourg, où il travaille essentiellement pour la scène. Il a déjà créé cinq ballets pour le théâtre Mariinski. En outre, M. Chemiakine créera des enseignes pour les kiosques à journaux de Saint-Pétersbourg. "Je voudrais - et je le peux - faire beaucoup plus pour la ville, mais pour le moment Saint-Pétersbourg devra se contenter du Chemiakine qui leur est proposé", a-t-il regretté.
Pour Mikhaïl Chemiakine, il est inutile de réfléchir à son rôle dans l'art russe et mondial. "Aujourd'hui, tout ce qui se passe dans l'art évoque dans ma mémoire ce que les Français appellent "bordel", passez-moi le mot. Tout est concentré chez les commerçants. On lance de nouveaux noms, on fait la promotion de minimalistes et de conceptualistes, autrement dit des courants faciles à manipuler. Les artistes font des choses qui, tout compte fait, n'ont rien à voir avec leur métier. Moi, je sais bien que je resterai toujours un artiste russe. Et c'est le temps qui déterminera ma place dans l'histoire", a-t-il résumé.
Mikhaïl Chemiakine est docteur honoris causa de l'Université de San-Francisco (1984) et membre honoris causa de l'Académie européenne des beaux-arts (1987) et de la New York Academy of Sciences. Il est également lauréat du Prix d'Etat de la Fédération de Russie.
On trouve des monuments signés Chemiakine à New York, Paris, Londres, Saint-Pétersbourg et Moscou.
