Les deux anciens concurrents irréconciliables du secteur de la sidérurgie, le magnat russe Alexeï Mordachov et l'Indien résidant en Grande-Bretagne Lakshmi Mittal, semblent avoir trouvé des points de convergence. On a appris le 31 janvier qu'ArcelorMittal achèterait pour 720 millions de dollars trois mines de charbon appartenant au patron de Severstal. Grâce à cette transaction, l'ambitieux homme d'affaires indien a enfin réussi à pénétrer sur le marché russe où il a l'intention de s'implanter durablement.
Il y a deux ans, il semblait bien que rien n'était en mesure de rapprocher Alexeï Mordachov et Lakshmi Mittal. Le magnat russe de l'acier s'apprêtait alors à conclure la "transaction du siècle", prévoyant une fusion entre Severstal et le géant européen Arcelor. Mais Mittal avait raflé la mise au dernier instant en proposant un meilleur prix aux actionnaires. Ainsi était né ArcelorMittal, leader mondial incontesté de la production d'acier, et qui le restera probablement longtemps encore.
Cependant, les affaires passent avant tout. Quelque temps après, Severstal et ArcelorMittal avaient tenté de coopérer dans la production de tôles d'acier galvanisées, très demandées dans l'industrie automobile russe en pleine expansion. Il est vrai, ArcelorMittal s'est retiré par la suite de cette production. On vient donc d'apprendre cette nouvelle transaction entre les deux compagnies, portant sur les mines de charbon Pervomaïskaïa, Berezovskaïa et Anjerskaïa, d'un rendement total de plus de 3 millions de tonnes de charbon à coke par an. En plus de ces trois mines qui se trouvent dans la région de Kemerovo, ArcelorMittal recevra une usine de traitement du charbon et trois entreprises annexes.
Une question se pose: pourquoi Severstal s'est-il débarrassé d'un actif aussi attrayant en le vendant à son "ex-ennemi juré"? Les explications des représentants de Severstal sont pour le moins lapidaires: la grande entreprise de production d'acier du groupe qui se trouve à Tcherepovets (région de Vologda) couvre la majeure partie de ses besoins en houille grâce aux mines de Vorkouta. Par conséquent, elle peut parfaitement se passer du charbon de Kemerovo, d'autant que Lakshmi Mittal a (une nouvelle fois...) proposé un bon prix. Tout cela est assez étrange, compte tenu de la conjoncture très favorable sur le marché du charbon à coke, qui fait l'objet d'une forte demande.
Selon Evgueni Riabkov, vice-directeur du département analytique du groupe d'investissement AntantaPioglobal, les deux compagnies s'étaient probablement entendues sur la vente de ces mines au moment du retrait d'ArcelorMittal de la production de tôles galvanisées. Severstal a besoin d'argent, car son patron a l'intention d'acheter des actifs d'extraction d'or, a estimé l'expert pour RIA Novosti. Qui plus est, Severstal se positionne comme un producteur d'acier de bonne qualité, et il ne souhaite pas être surchargé d'actifs de production de matières premières.
Les intérêts de Lakshmi Mittal sont évidents. Après avoir créé un géant de l'acier, il ramasse, tel un bulldozer, des actifs de matières premières dans le monde entier. L'année dernière, il avait déjà tenté d'acquérir des mines de charbon en Iakoutie, mais n'avait pas été autorisé à participer aux enchères. Lakshmi Mittal a donc enfin obtenu son premier actif appréciable en Russie. Grâce à cela, ArcelorMittal a fait passer de 10% à 15% son approvisionnement interne en charbon.
Si l'on s'en tient aux paroles de Lakshmi Mittal, cette transaction n'est qu'un début, qui lance le renforcement des positions de son groupe sur un marché russe de l'acier en plein développement. Et pour se faire définitivement une place dans l'industrie sidérurgique russe, déjà partagée entre plusieurs grands acteurs locaux, il devra probablement s'allier avec l'un d'eux.
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