Constantin Tsiolkovski est l'une des figures les plus insolites dans l'histoire de la Russie, voire même du monde entier.
Il est né dans la famille d'un noble polonais le 17 septembre 1857 (5 septembre d'après le calendrier julien - ndlr.). Enseignant de physique et de mathématiques dans la ville provinciale de Kalouga, quasi-sourd depuis l'âge de 14 ans, cet étrange anachorète crée un ouvrage unique sur la conquête de l'espace cosmique et fait paraître à ses frais un tout petit livre en 1903.
Rares sont ceux qui, à l'époque, ont remarqué l'ouvrage de ce rêveur, intitulé "L'exploration de l'espace cosmique par des engins à réaction". Aujourd'hui, cette étude peut être considérée comme le deuxième livre, après la Bible, à avoir bouleversé la civilisation humaine. La construction de fusées modernes, le principe de découpage des fusées en plusieurs tronçons, les moteurs à propergol liquide, les stations spatiales circulant autour de la Terre, le gyroscope en tant que fondement du vol automatique, ainsi que beaucoup d'autres piliers de l'astronautique moderne sont des inventions de Tsiolkovski.
L'espace est aujourd'hui le reflet de ses pensées.
Par ailleurs, la publication de son génial ouvrage n'a entrainé aucun changement dans la vie de cet ermite. Il continuait de confier ses doléances à son journal intime: pauvreté, problèmes de santé, surdité, incompréhension et solitude.
La révolution de 1917 a fait croire cette âme romantique en la possibilité d'une compréhension de la part du pouvoir. Il rédige alors un traité sur l'établissement du socialisme, ce qui lui vaut une adhésion immédiate à l'Académie socialiste. L'idée d'un triomphe universel du socialisme a enthousiasmé les nouveaux dirigeants du pays.
Tsiolkovski est aussitôt devenu la coqueluche du parti communiste.
Vladimir Lénine a signé en novembre 1921 un décret unique du Sovnarkom (Conseil des commissaires du peuple, remplissant les fonctions du gouvernement): "Prenant en considération les mérites particuliers dans le domaine de l'étude scientifique des problèmes de l'aviation, attribuer à C.E.Tsiolkovski une retraite viagère d'un montant de 500.000 roubles par mois - (une somme gigantesque à l'époque) -, tenant compte de toutes les augmentations des taux de salaires qui surviendront".
La "troisième Bible" de ce génial prophète, "L'organisation sociale de l'humanité", a été le fruit de ce soutien. On n'avait jamais vu jusque-là livre plus "absurde".
Pour résumer, Tsiolkovski y considère que ce n'est pas Dieu qui est à la base de l'univers, mais un être animé élémentaire et immortel, qu'il désigne comme "atome". Cet esprit assure l'existence de l'univers, en circulant entre les organismes. L'atome, selon Tsiolkovski, donne l'exemple de la future organisation de l'humanité. Les hommes devront se disperser sur les planètes du système solaire, plus tard dans les galaxies, et changer de fond en comble leur nature biochimique. L'homme du futur sera un "animal-plante" doué de raison qui se nourrira de l'énergie provenant directement du Soleil.
Sans connaître le nom de l'auteur de ce tableau, on aurait pu qualifier ces lignes "d'utopie d'un rêveur provincial". Cependant, tout ce qu'a prédit Constantin Tsiolkovski s'est réalisé jusqu'ici avec une précision effrayante. Il a été le premier à inventer un engin capable de pénétrer dans le vide du cosmos, à savoir la fusée. Il a été le premier à calculer la vitesse nécessaire pour échapper à l'attraction terrestre: 8 km/s. Il a été le premier à résoudre le problème de la maîtrise des flux de gaz brûlants, en dotant les tuyères de gouvernails spéciaux, et ainsi de suite.
Il n'a commis aucune erreur jusqu'à présent.
Or l'intuition du génie nous prédit que les hommes du futur seront des plantes vivantes se nourrissant de l'énergie solaire... Pour ne pas manquer d'énergie, ils déplaceront l'orbite terrestre en la rapprochant du Soleil.
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