La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

La campagne de discréditation du projet de Gazoduc nord-européen se poursuit. Le débat a été relancé par une lettre de l'Académie des sciences d'Estonie, qui s'est opposée à ce que la filiale de Gazprom, Nord Stream, soit autorisée à mener la prospection du fond marin dans la zone économique estonienne. "Le comportement de Gazprom, estiment les chercheurs, ne s'inscrit pas dans les rapports économiques qui existent parmi les Vingt-Sept, car le monopole russe exploite les avantages du marché énergétique ouvert de l'UE tout en bloquant la pose d'un gazoduc entre l'Asie centrale et l'Europe et en empêchant les compagnies étrangères de mettre en valeur des gisements gaziers russes" (Postimees, 01.08). "Dans une rédaction moins fleurie, l'avis rendu par l'Académie serait le suivant: hypocrite, Gazprom est une arme entre les mains du Kremlin, ses gazoducs explosent, et il échappe à toute responsabilité en cas d'impact sur l'environnement" (Delfi, 01.08).

Les médias ont accueilli avec agacement les critiques de la Russie et de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) qui s'en sont pris au rassemblement des anciens de la division des Waffen SS à Sinimäe. Les analystes tentent d'expliquer la prise de position du président de l'APCE par des intérêts économiques de sa famille en Russie. "Les critiques du président de l'APCE, René van der Linden, vis-à-vis de l'Estonie étonnent, et c'est un euphémisme. M. van der Linden pense que le rassemblement de Sinimäe et le jeu paramilitaire Erna Retk (du nom d'un groupe de sabotage nazi) témoignent d'une montée de néonazisme en Estonie, d'où la nécessité d'exercer des pressions politiques sur Tallinn. Est-ce bien vrai que la déclaration de M. van der Linden s'explique par des intérêts économiques de sa famille en Russie? Rappelons que parmi les rares voix critiques qui ont commenté les événements d'avril en Estonie figurait celle de (l'ex-chancelier allemand) Gerhard Schröder dont la fortune dépend également du Kremlin" (Eesti Päevaleht, 03.08).

LETTONIE

Les analystes concluent à l'imminence d'un conflit global entre deux civilisations, russe et américano-britannique. La Russie, selon la presse, cherche à tout prix à rétablir son statut de grande puissance, ce qui n'a pas manqué d'aggraver les tensions dans les relations russo-américaines. "Tantôt les deux grandes puissances se jettent dans les bras l'une de l'autre, tantôt elles sont au bord d'une guerre nucléaire... En Russie, on ne considère pas comme fort un Etat dont les citoyens ne participent pas docilement aux défilés militaires, et la démocratie dépend de la volonté du tsar. Les Américains, eux, ne comprennent pas comment on peut vivre sans tribunaux ni médias indépendants, sans opposition politique réelle, etc. D'où cette prise de position, dominante en Russie, sur la nécessité de la parité militaire avec les Etats-Unis. La Russie ne pense même pas qu'une vie sans parité militaire est possible" (Nedelia, 01.08).

LITUANIE

Les projets du mouvement pro-Kremlin Nachi qui souhaite créer une cellule en Lituanie suscitent de vifs remous dans la presse. En qualifiant cette initiative d'expansion politique du Kremlin, les analystes espèrent que le ministère de la Justice reconnaîtra ce mouvement de jeunes comme une organisation extrémiste et interdira ses activités en Lituanie. "La puissance russe dopée par les prix élevés du pétrole n'en finit pas de se renforcer, d'où l'essor de ses ambitions politiques. Dans les pays baltes, le Kremlin poursuit ses objectifs non seulement avec des moyens économiques et médiatiques, mais aussi en soutenant les associations politiques et sociales russophones sur le terrain" (Respublika, 01.08).

BIELORUSSIE

Selon des experts, l'appel d'offres sur la construction d'une centrale nucléaire en Biélorussie, annoncé récemment par Minsk, lancera un nouveau jeu politico-économique avec Moscou. "La centrale nucléaire sera construite près de Moguilev, à seulement 500 km de Moscou. Naturellement, le président biélorusse ne pouvait pas s'empêcher d'exploiter cet événement pour faire chanter l'administration russe... La construction en Biélorussie d'une centrale nucléaire par le français Areva est à peine probable. L'appel d'offres est un nouveau subterfuge des Biélorusses. De facto, la Russie se voit proposer un marché: l'annulation des dettes gazières de Minsk aujourd'hui contre la construction d'une centrale nucléaire demain, avec un crédit russe. Si ce beau rêve devient réalité, nul ne le sait. Minsk est préoccupé par les livraisons de gaz qu'il reçoit aujourd'hui. Pendant plus de dix ans, le président biélorusse a promis à la Russie une intégration complète pour "demain", ce qui ne l'empêchait pas de recevoir des hydrocarbures russes aux tarifs symboliques "aujourd'hui"" (Narodnaïa Volia, 02.08).

UKRAINE

Evoquant le nouveau conflit gazier entre la Russie et la Biélorussie, la presse fait remarquer que la crise de janvier a eu un dénouement extrêmement désavantageux pour Minsk - une augmentation du prix du gaz et un contrat de vente d'une partie du système biélorusse de transport de gaz. Les analystes y perçoivent même un scénario éventuel de l'évolution à l'avenir des relations entre Moscou et Kiev et mettent en garde l'Ukraine face au prix des concessions consenties à la Russie. "La Biélorussie est tombée elle-même sous un joug, cédant pratiquement son seul atout - le transit. Désormais, on va tout simplement la dévorer progressivement, lui arrachant des entreprises, changeant sans cesse de premiers ministres et fixant n'importe quels prix du gaz... Toute cette histoire doit sans doute donner aux autorités ukrainiennes pas mal d'information utile, matière à réfléchir. Nul n'ignore que les Russes nous font régulièrement des propositions sur une exploitation conjointe du pipeline. Qui plus est, ils invoquent ces mêmes arguments qu'ils ont auparavant employés pour amadouer la Biélorussie: nous allons fixer pour vous un bon prix du gaz de sorte que vous ne penserez même plus à ce problème! A l'exemple de la Biélorussie, on voit bien qu'en réalité cela signifie tout simplement la saisie d'entreprises pour les dettes et un redressement judiciaire. Or, l'exemple de la Biélorussie n'est pas unique en son genre. A une certaine époque, le fameux programme "Biens contre dettes" a été imposé à l'Arménie où les Russes se sont emparés des entreprises stratégiques" (Gazeta-po-kievski, 02.08).

Les journalistes sont persuadés que la querelle diplomatique russo-britannique n'est qu'une conséquence d'un conflit d'intérêts économiques et géopolitiques de ces deux Etats. "Comme toujours, il ne s'agit là que de l'argent. Les Russes ont privé British Petroleum (BP) de l'accès de ses richissimes gisements de pétrole, ce qui a mis Londres en colère. Ajoutez-y, en outre, la transformation pratique de Londres en QG international de millionnaires russes en exil qui relancent les prix de l'immobilier londonien et "soudoient" sans nul doute des politiques locaux. Et vous verrez devant vous tous les éléments indispensables à l'organisation par l'Occident d'une nouvelle croisade, campagne lancée pour "délivrer" le pétrole des propriétaires despotiques" (2000, 03.08).

MOLDAVIE

Somme toute, la Russie a perdu sa "bataille" pour le Kosovo, affirment les observateurs à Chisinau. Quant à Tiraspol, il ne lui reste qu'à espérer que l'Organisation des Nations Unies tiendra compte d'un éventuel veto russe et refreinera quelque peu la reconnaissance du Kosovo. "Mais si l'ONU reste quand même à l'écart, alors que la reconnaissance du Kosovo viendra de la part de ceux qui préconisent aujourd'hui son indépendance, le processus de règlement transnistrien deviendra l'un des éléments de cette chaîne d'événements imprévisibles qui s'étaient déclenchés dans les Balkans" (Nezavissimaïa Moldova, 03.08).

GEORGIE

Nul ne doute en Géorgie que c'étaient justement des avions russes qui ont bombardé le 6 août dernier le territoire géorgien. Les médias sont unanimes dans leur évaluation de l'incident. Ils le qualifient d'acte d'agression ouverte de la part de la Russie. Les experts exposent différentes versions des raisons pour lesquelles Moscou s'est livré à cette provocation. "La Fédération de Russie est l'ennemi pour la Géorgie, et ce fait est incontestable. Il suffirait cinq minutes tout au plus à un appareil volant de ce type pour couvrir la distance entre le lieu du bombardement et le centre de Tbilissi. Il n'y a rien de sacré pour ces gens"; "C'est un test. Un test pour voir la réaction de la Géorgie et de la communauté internationale pour envisager sans doute à l'avenir des actions plus sérieuses"; "C'était sans doute... l'occasion de démontrer une fois de plus aux Géorgiens que la Russie n'était pas faible comme certains le pensent"; "Cela pourrait être dans l'intérêt des militaires et en premier lieu des généraux et de certaines forces politiques en Russie" (News-Georgia, 07.08).

La reconnaissance de l'indépendance du Kosovo est pratiquement considérée comme un fait accompli. Nombreux sont ces journalistes qui estiment qu'après cela, la Russie ne tarderait pas à reconnaître l'indépendance de l'Abkhazie. "Le sort du Kosovo est décidé. Par conséquent, le nôtre le sera sous peu", a déclaré le leader abkhaze Sergueï Bagapch" (24 saati, 01.08). "Quand le Kosovo sera officiellement reconnu, la Géorgie aura de très graves problèmes... En janvier prochain, la Russie se propose de reconnaître officiellement l'Abkhazie" (Rezonansi, 02.08).

KAZAKHSTAN

Les analystes sont étonnés par la position de Moscou qui ne manifeste que peu d'intérêt pour Achkhabad, alors que les États-Unis sont de plus en plus présents au Turkménistan. Selon les experts, la déclaration du président Berdymoukhammedov sur la coopération gazière avec la Russie et le Kazakhstan dans la région de la mer Caspienne n'empêchera pas le Turkménistan de participer à la pose d'un nouveau gazoduc au fond de la Caspienne. Ce gazoduc permettra à l'Asie Centrale d'accéder aux marchés mondiaux en contournant la Russie. "Pour le moment, le soutien russe au Turkménistan est purement diplomatique. Les investisseurs russes et les coentreprises sont quasiment absents dans la république. La coopération gazière et pétrolière russo-turkmène est également insignifiante, à part l'achat de gaz turkmène par la Russie qui en revend à l'Europe. Qui plus est, le monopoleur gazier russe Gazprom a déjà laissé entendre qu'on ne pouvait pas intensifier la coopération gazière avec le Turkménistan avant l'organisation d'un audit indépendant permettant d'évaluer les réserves de gaz turkmènes, et d'établir si la république était capable de respecter ses engagements" (Delovaya Nedelia, 06.08).

Selon les observateurs, la récente rencontre des muftis de certaines républiques russes du Caucase du Nord avec le président américain témoigne que les régions musulmanes russes ont des tendances séparatistes. Les analystes considèrent que les États-Unis cherchent à détruire la Russie en l'entourant d'États hostiles et en oeuvrant à l'intérieur du pays. "Seule la Russie garde toujours le statut douteux d'empire après l'effondrement des nombreux empires au XXe siècle. Ce statut est à l'origine de beaucoup de problèmes russes. Le pays souffre de contradictions internes et certains hommes politiques occidentaux en profitent. Le président George W. Bush a récemment invité les muftis des républiques nord-caucasiennes dans son ranch familial. L'ancien président américain Bush père participait également aux discussions avec les dignitaires religieux russes. Ce fut un coup dur pour l'amour-propre de la Russie" (Aykyn Apta, 02.08).

OUZBEKISTAN

Les médias affirment que les travailleurs migrants sont obligés de veiller eux-mêmes à leur sécurité en Russie, où la police se montre indifférente face à un regain de violence à l'égard des étrangers. "A Moscou, les skinheads ont perdu une bagarre contre des ressortissants d'Asie Centrale... Le conflit aurait été provoqué par des jeunes nationalistes. Certains blessés font partie d'organisations nationalistes de jeunes. Mais il semble que les ressortissants des pays caucasiens et asiatiques soient déjà habitués à se promener armés dans Moscou la nuit pour pouvoir se défendre: les Asiatiques étaient en effet munis d'un couteau" (Muslim Uzbekistan, 02.08).

TURKMENISTAN

Pour certains analystes, une amélioration des relations turkméno-russes est peu probable. "Le Turkménistan ne s'est pas rapproché de la Russie, bien au contraire, malgré toutes les prévisions et déclarations des experts et hommes politiques russes. Certes, le président Berdymoukhammedov entretient toujours de bonnes relations avec le Kremlin et flirte avec les sociétés gazières russes. Mais ses priorités sont le renforcement du Turkménistan en Asie Centrale et la Chine, que l'on considère déjà comme un partenaire stratégique d'Achkhabad. Par ailleurs, M. Berdymoukhammedov coopère activement avec des sociétés occidentales" (Turkmenia.info, 03.08).

TADJIKISTAN

La presse estime que les pays de la région sont capables de régler leurs problèmes nationaux et régionaux sans l'assistance russe. "Les contradictions et accusations réciproques restent assez nombreuses dans la région, mais les récents propos des dirigeants centrasiatiques montrent qu'ils souhaitent surmonter ces obstacles. Le Kirghizstan a choisi le Kazakhstan comme patron régional. Le Tadjikistan pourrait préférer le Turkménistan - Douchanbé a promis une amitié éternelle à Achkhabad. En échange, il recevra tout prochainement un milliard de kWh d'électricité dont il a besoin. La rancune oubliée, l'Ouzbékistan a apporté son soutien au président Berdymoukhammedov dans la construction du gazoduc turkméno-chinois, dans l'espoir d'en tirer un bénéfice. Premièrement, le pipeline devrait passer par l'Ouzbékistan, deuxièmement, Tachkent pourrait ainsi exporter son gaz vers la Chine en tant que membre du projet" (Sobytia, 02.08).

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