Le conte de fées de Natalia Vodianova

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Ou le destin rêvé d'une vendeuse de légumes devenue reine des podiums...
Ou le destin rêvé d'une vendeuse de légumes devenue reine des podiums

Par Anatoli Korolev, RIA Novosti

De nos jours, Natalia Vodianova fait partie du Top-10 des mannequins les plus sollicités et les mieux payés du monde. Elle vit à New York, l'année dernière elle a mis au monde un deuxième enfant, une fille qu'elle a baptisée Neva, du nom de la célèbre rivière russe, et son premier-né, Lucas, est automatiquement devenu membre de l'aristocratie, son mari, Justin Trevor Berkeley Portman, étant un lord et un baronnet.

Cependant, il y a seulement sept ans, Natalia vendait encore avec sa mère des fruits et légumes sur un marché de Nijni Novgorod. Sa mère était seule pour nourrir ses trois filles, dont une handicapée. Son père est parti quand elle avait deux ans.

Pendant pratiquement toute son enfance, Natalia a été famélique. Mais, s'étant habituée à la faim, elle ne se plaignait pas. A 16 ans, mesurant 1 mètre 76, elle pesait moins de 50 kilos.

C'est de ces conditions extrêmes qu'est née sa beauté de femme enfant à la mine un peu boudeuse, au visage presque idéal de Lolita, à la fois tendre et têtu. Vodianova s'est échappée d'un conte où l'héroïne est exposée aux tracasseries d'une sorcière qui l'oblige à chercher dans un tas de légumes les carottes les plus rouges, les choux les plus consistants, et ce, à mains nues et sous la pluie, le tout en souriant d'un sourire éclatant. Et gare à cette Cendrillon si elle fléchit. Mais Natalia n'a pas fléchi. Elle souriait. Car il fallait nourrir sa soeur malade.

Le rôle de la sorcière a été confié à un envoyé de l'agence photographique française Viva, qui est tombé sur cette Cendrillon sur le marché, comme le veut la légende. L'agent a convaincu la jeune fille de prendre le risque d'aller à Moscou pour participer à une séance photo organisée par l'agence. Et ensuite? Ensuite le destin a fait son oeuvre.

Si seulement Kate Moss, l'égérie de Calvin Klein à l'époque, avait pu pressentir que son sort était déjà entre les mains d'une petite vendeuse de légumes bon marché.

Revenons un peu sur l'Histoire.

La magie des visages russes fascina pour la première fois l'Europe après la révolution bolchevique de 1917. Divas russes et aristocrates ruinées se précipitèrent en foule en Occident, apportant avec elles le culte des lignes brisées, la pâleur, la grâce féminine, le charme du cygne mourant. C'est la grande danseuse Anna Pavlova qui incarna le visage de cette première "vague russe". 70 ans passèrent avant que l'Occident ne tombe une nouvelle fois amoureux des femmes russes. Avec la chute du rideau de fer, de nouvelles jeunes femmes russes se sont lancées à la conquête des quatre centres mondiaux de la mode: Londres, Paris, New York et Milan. Natalia Semanova et Olga Pantushenkova ont été parmi les premières. Mais les héroïnes de cette deuxième vague manquaient de fragilité, du charme exquis de l'idéal. Elles savaient trop bien résister aux difficultés de la vie. Cette vague russe a duré à peine quelques années.

Natalia Vodianova a inauguré une nouvelle époque.

Sans même soupçonner que le destin lui ouvrait déjà la porte, Natalia est tout simplement venue participer à la séance photo de Viva à Moscou, et elle y a fait fureur. On lui proposa de venir jusqu'à Paris, mais à la seule petite condition d'apprendre l'anglais en trois mois... Paniquée, elle appela à la maison pour demander conseil: les cendrillons sont toujours des filles modèles. On avait promis de lui payer quelque 400 dollars. "Maman, j'en enverrai 200 à la maison".

Vodianova apprit l'anglais en trois mois.

Elle s'installa à Paris.

Elle se mit à envoyer à sa mère et ses soeurs les 200 dollars qu'elle leur avait promis.

Elle avait 17 ans à peine.

Entre-temps, son visage d'enfant boudeur, le regard un peu par en dessous de ses grands yeux bleus, son caractère accommodant, sa patience, son corps idéal et son charme d'écolière éblouirent le monde de la mode. En 2001, le magazine "W" qualifia Vodianova de plus grande sensation du monde des mannequins.

Et déjà, elle attendait un enfant du baronnet.

Natalia fit la connaissance de Justin lors d'une soirée à Paris. Ils tombèrent amoureux, mais le jeune lord ne se pressait pas de mener sa petite amie jusqu'à l'autel. Il ne savait pas que l'idéaliste assumerait tout elle-même et lui épargnerait les soucis. Fronçant les sourcils, notre Cendrillon se préparait à accoucher. Ce n'est pas vraiment la manière dont se comportent les jeunes femmes occidentales, qui ont toujours dans leur sac à main les moyens nécessaires, ou, dans les cas extrêmes, demandent à leurs amis de leur payer les services d'une avorteuse.

Natalia avoua plus tard qu'en étant déjà au septième mois de sa grossesse, elle n'osait toujours pas demander à Justin comment ils allaient vivre après l'accouchement. Elle se préparait à perdre son écervelé de petit ami, au nom de son enfant, et finalement... le mariage fut célébré à Saint-Pétersbourg! Un garçon est né, qui reçut le nom de Lucas. Très vite, le petit, grâce à sa mère, devint le bébé le plus célèbre de l'industrie de la mode, car Natalia se faisait souvent photographier avec lui, ne voulant pas se séparer de son adorable fils.

Un mois seulement après les couches, Vodianova posait déjà pour les campagnes publicitaires Louis Vuitton, puis Gucci.

En septembre 2002, Natalia Vodianova devint le mannequin le plus demandé de la Semaine de la mode de New York, invitée par 19 couturiers à la fois. Elle bossait d'arrache-pied, comme elle en avait pris l'habitude déjà à l'époque des légumes. Avec le sourire et sans se plaindre. En supportant la faim.

Vint alors le sommet du succès.

La capricieuse star Kate Moss a lâché qu'elle ne commençait pas sa journée sans avoir bu un verre de champagne, après quoi le puriste Calvin Klein a renoncé à ses services et rompu le contrat avec elle. C'est Natalia Vodianova qui devient la nouvelle égérie de Klein, signant le contrat le plus mirobolant de l'histoire de la marque. Personne ne s'était vu encore payer une telle somme.

A l'heure actuelle, Natalia Vodianova est l'un des mannequins les plus sollicités du monde, elle a des contrats publicitaires avec Gucci, Cerruti, L'Oréal, Louis Vuitton... Au classement des top-modèles, elle est quatrième, mais elle n'y est pas la seule Russe. Plusieurs autres vedettes originaires de la province russe en font partie, comme Eugenia Volodina de Kazan (11e position) ou Anna Vyalitsyna de Nijni Novgorod (24e). La troisième vague des vénus russes à l'étranger a montré au monde le charme de la liberté, la tendresse de la beauté, tout cela accompagné de la persévérance des idéalistes.

Elles sont toutes nées dans les choux, ces cendrillons venues du froid.

"Les Portman n'ont jamais travaillé, explique Natalia. Personne, et Justin non plus. Je suis la première femme parmi les Portman qui fait de l'argent".

Ultime détail:

Avant le jour du Nouvel an 2007, Natalia a offert à la ville de Nijni Novgorod une cité pour enfants, c'est-à-dire une installation haut de gamme avec un bateau à deux ponts, une pyramide et un chemin de fer funiculaire, des rampes de skate et de roller, un terrain de basketball et de football. Un terrain destiné aux enfants souffrant de paralysie cérébrale y est également aménagé.

Encore une toute dernière chose.

La maison new-yorkaise de Natalia et Justin se trouve non loin de l'ancien emplacement du World Trade Center. Le 11 septembre 2001, le jeune ménage (y compris le futur Lucas) ont échappé de justesse à la mort, dix jours après le mariage.

Le destin choie toujours cette jeune femme, tout comme le Fantôme de l'Opéra est toujours amoureux de sa chanteuse.

L'avis de l'auteur ne coïncide pas forcément avec celui de la rédaction.

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