La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

L'un des grands thèmes débattus par la presse locale est la fermeté de la réaction russe à la Loi sur la protection des cimetières militaires qui autorise les autorités estoniennes à transférer les restes de soldats soviétiques et à démanteler les monuments installés en leur honneur, notamment, celui au Soldat libérateur (dit "Soldat de bronze"), au centre de Tallinn.

En réponse, la presse fait mousser le thème de la déportation d'Estoniens après l'incorporation de la république dans l'URSS. Certains articles parlent des tombes d'Estoniens morts en Sibérie. Les journaux exigent que les chercheurs estoniens aient accès aux archives des services secrets russes pour connaître le sort des milliers de déportés. "Moralement, la Russie ne sent aucune responsabilité en matière de recherche et d'aménagement des cimetières estoniens (sur son territoire). L'expérience du passé témoigne plutôt d'une attitude négative de ses autorités envers cette idée, sinon de leur refus total. La cause en est connue : du point de vue de la Russie, l'Estonie, membre de l'OTAN, est un Etat inamical où sont poursuivis des russophones. Après l'échec des négociations russo-estoniennes sur la frontière, le bloc des accords réglementant les relations entre les deux pays, dont l'accord sur l'aménagement réciproque des tombes, a été remisé au placard ("Postimees", 18.01).

Critiquant la politique de M. Poutine, les journalistes appellent les pays de l'UE à s'ingérer dans le rapport des forces politiques russes et à appuyer l'opposition. "Le peuple russe a besoin de l'opposition pour cette bonne raison que, par cela même, son Etat aura un meilleur gouvernement. Il n'y a aucune raison d'avoir peur - ou de se sentir gêné - d'appuyer l'opposition démocratique - encore faible - en Russie, qui a dû fuir, en partie, à l'étranger. Les autorités russes doivent comprendre que leurs débats sur la souveraineté ne conviennent pas à un monde sans frontières. La société civile passe avant les frontières et c'est une bonne chose. Malgré des appréciations pessimistes, la fenêtre des possibilités est en ce moment ouverte pour la Russie. Profitons-en ! ("Postimees", 20.01).

LETTONIE

Le débat autour du projet d'accord sur la frontière avec la Russie est le thème central de la presse. Des experts soulignent qu'en signant cet accord la Fédération de Russie sera amenée à reconnaître en la personne de la Lettonie d'aujourd'hui le successeur de la République de Lettonie des années 1920 et 1930. "Afin que la Russie ne puisse, en se référant au traité sur la frontière, affirmer que la Lettonie est un Etat nouveau et non pas le successeur de la République de Lettonie occupée en 1940, et exiger dans la foulée, par exemple, de revoir le principe d'octroi de la citoyenneté, le parlement adoptera une loi spéciale qui consacrera la continuité de l'Etat letton (..). La solution juridique préparée est tellement fine que la Russie n'aura aucune raison ni possibilité de rejeter la conclusion du traité frontalier" ("Neatkariga rita avize", 17.10).

Une attention particulière est accordée à la question de l'éventuelle adhésion de Riga au projet de Gazoduc nord-européen. La proposition d'aménager et d'exploiter des réservoirs souterrains de gaz à Dobele pourrait intéresser, selon certains experts, les participants au consortium. "Le potentiel global des réservoirs souterrains de gaz en Lettonie s'élève à 50 milliards de mètres cubes et, sans aucun doute, ces capacités, dont celles de Dobele, représentent un intérêt pour la Russie" ("Biznes&Baltija", 22.01). "En Lettonie, on espère que notre pays sera intégré dans le système de transport du Gazoduc de l'Europe du Nord, ce dans quoi Riga fonde des espoirs particuliers. Le ministère de l'Economie a déjà fait appel à des fonds de l'UE pour mener des études géologiques, techniques et économiques en vue d'établir s'il est possible d'aménager près de Dobele un réservoir souterrain. Mais on ignore pour l'instant comment Moscou réagira à une éventuelle participation de la Lettonie" ("Telegraf", 22.01).

La presse calcule les dommages subis par les conserveries de poisson lettonnes après l'embargo décrété en octobre dernier par la Russie. Selon des spécialistes, ce "blocus poissonnier" a plongé le secteur dans une crise profonde. "La "guerre des sprats" qui se poursuit depuis quelques mois a provoqué une crise non seulement dans notre secteur poissonnier mais aussi a provoqué la chute des prix sur les marchés d'autres pays. Les producteurs lettons ont dû vendre leurs produits à des prix de dumping en Ukraine, au Kazakhstan et dans c'autres pays de la CEI" ("Telegraf", 17.01).

LITUANIE

Capitulant dans la "guerre de l'énergie" avec la Russie, le président biélorusse a remporté, de l'avis des médias locaux, une victoire tactique. "De sa rhétorique tonitruante rappelant ses menaces de "buter (les terroristes - ndlr) jusque dans les chiottes", Vladimir Poutine s'est soudainement mis à vanter des milliards de dollars de subventions à Minsk. Il aurait pu comprendre que pousser les choses un peu plus loin dans sa guerre avec Loukachenko, pour l'instant au moins, serait dangereux pour le Kremlin lui-même. Cette conclusion s'impose dès qu'on commence à évaluer les perspectives du régime d'Alexandre Loukachenko et si l'on n'oublie pas les scénarios d'avenir pour la Russie elle-même (...). Car M. Loukachenko espère rester au pouvoir bien plus longtemps que M. Poutine" ("Lietuvos rytas", 22.01).

Ceci dit, les conséquences du soutien russe au régime de Loukachenko sont appréciées comme catastrophiques pour la Biélorussie. "Grâce aux préférences politiques et économiques russes, la Biélorussie crée un modèle de socialisme policier de type stalinien, avec le maintien de géants industriels et des revenus économiquement injustifiés. Les conditions de la naissance d'une classe moyenne ne sont pas réunies. De profondes réformes de marché n'ont pas été menées. L'afflux d'investissements étrangers est limité, en raison de conditions qui sont considérées comme les moins propices dans le monde. Résultat, des milliers d'entreprises industrielles et des secteurs entiers de l'économie nationale sont en pleine dégradation. La Biélorussie commence à accuser du retard sur ses voisins, la Pologne et les pays baltes, qui achètent depuis longtemps l'énergie à des prix mondiaux et qui développent avec succès leur économie et leur industrie" ("Forumvilnius.lt", 23.01).

UKRAINE

La presse se montre sceptique quant aux perspectives de limiter les ambitions énergétiques de Moscou. La tentative de Kiev de participer au projet de construction du gazoduc Nabucco, entreprise par le président Viktor Iouchtchenko au cours de sa récente visite en Roumanie, a été qualifiée de peu réussie.

"Les volumes des livraisons de gaz d'Asie centrale ne sont pas illimités, de même que la capacité du tuyau. La Bulgarie et la Roumanie ont une situation géographique beaucoup plus favorable du point de vue de la construction d'un pipe-line que l'Ukraine, et il est peu probable qu'elles accueillent favorablement les propositions de Kiev de leur donner un coup de main" ("UNIAN", 17.01).

Selon les médias, des accords séparés entre Moscou et certains pays membres de l'Union européenne dans le domaine énergétique ne sont toujours pas exclus.

"La belliqueuse Merkel n'a rien dit de vexant à l'égard du chef du Kremlin... Elle a promis de faire valoir les intérêts russes dans le cadre de la prochaine réunion du G8 ("Gazeta po-kievski", 22.01).

"La Russie a toujours de puissants partenaires au sein de l'UE qui sont intéressés à ne pas dépendre des caprices de l'Ukraine et de la Biélorussie" (Revue russo-ukrainienne "Gouliaï-Pole", 22.01).

Selon des observateurs, le Kremlin est intéressé à maintenir le régime d'Alexandre Loukachenko dans l'objectif de satisfaire ses ambitions de superpuissance et de "détourner l'attention" de l'Occident, c'est pourquoi il continuera, ne serait-ce que dans une moindre mesure, de subventionner la Biélorussie.

"Pour la Russie, il est commode d'avoir un paria en Europe, pour que les critiques européennes soient dirigées en premier lieu contre la "dernière dictature" et non pas contre l'autoritarisme moscovite. La Russie continuera sans doute de soutenir le despote biélorusse, en partant du principe qu'il peut être un imbécile, mais, l'essentiel étant qu'il soit sous la houlette de Moscou" ("Korrespondent.net", 20.01).

MOLDAVIE

Les journalistes critiquent la nouvelle loi russe sur les migrations qui vient d'entrer en vigueur. Constatant les changements positifs pour les travailleurs étrangers, les médias expriment toutefois leurs préoccupations, car les nouvelles règles risquent selon eux d'aggraver le problème du nationalisme en Russie.

"Les critiques de la nouvelle législation affirment qu'elle ne fera qu'aggraver les tendances xénophobes et accélérer le déclin démographique. La population russe se réduit annuellement d'environ 700.000 personnes, et ce déclin serait encore plus évident sans l'afflux permanent d'immigrés" ("Nezavissimaïa Moldova", 18.01).

ARMENIE

Les médias considèrent le litige russo-biélorusse sur les prix des hydrocarbures comme une preuve des changements engagés dans les relations entre les pays membres de la Communauté d'Etats indépendants (CEI). Moscou est intéressé à réformer la CEI, estiment les analystes. "A l'exception d'un ou de deux pays, les Etats de la Communauté préfèrent manifestement la circulation à sens unique. Tout en reconnaissant le fait que la Russie a ses intérêts sur leurs territoires et qualifiant même les intérêts russes de parfaitement légitimes et de fondés, ils ne voulaient pas en tenir compte dans la pratique. Et Moscou en a eu assez... Qui plus est, certains faits et gestes du Kremlin laissaient clairement entendre que la Russie n'avait tout simplement plus besoin de la CEI, en tant que telle... La Russie a montré que pour chacun des pays de la CEI, elle avait sa méthode d'influence: politique pour les uns, énergétique ou de migration pour les autres... Quoi qu'il en soit, il s'agit sans doute d'une tendance et même, dans un certain sens, d'une méthode d'organisation de ces relations bilatérales que Moscou entend, de toute évidence, avoir dans un très proche avenir au lieu de ces rapports amorphes au sein de la CEI qui ne donnent pratiquement rien à la Russie elle-même" ("168 jam", 17.01).

GEORGIE

Les médias évaluent plutôt avec fatalisme les perspectives des relations russo-géorgiennes. De l'avis de bien des observateurs, la Russie et la Géorgie sont tout simplement vouées à des conflits vu leurs objectifs opposés en politique, et la reprise des contacts diplomatiques entre Moscou et Tbilissi ne change au fond rien du tout à la donne. "Les Russes changent de politique, mais nous ne devons pas nous bercer de l'illusion que la Russie puisse renoncer à ses ambitions impériales. Tout simplement, elle a mis en oeuvre un facteur plus puissant et plus perfide , qui est le facteur économique" ("Akhali taoba", 22.01). "La décision de faire revenir (à Tbilissi) l'ambassadeur (russe) ne signifie pas encore l'abandon par la Russie de sa politique à l'égard de la Géorgie... Nous nous voyons au sein des structures euratlantiques, alors que la Russie conçoit tout autrement le Caucase du Sud... Et cet antagonisme ne disparaîtra que quand une nouvelle réalité géopolitique se formera au Caucase du Sud" ("Akhali versia", 22.01). "La décision de faire revenir l'ambassadeur en Géorgie n'est qu'une farce politique, c'est aussi un élément du programme de réhabilitation de la réputation de la Russie en politique mondiale" ("Grouzia Online", 22.01).

La décision de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) de ne pas examiner à sa prochaine session la question des relations russo-géorgiennes a été accueillie très douloureusement en Géorgie. "Les démarches entreprises par Moscou afin d'atténuer le conflit ont été sans doute déterminantes... L'Europe pour laquelle sa sécurité énergétique s'était avérée cette fois plus importante a préféré reporter à plus tard l'examen de la question sur la Géorgie" ("24 saati", 23.01). "Poutine a prouvé avoir de l'influence non seulement à l'Organisation des Nations Unies, mais aussi au Conseil européen" ("Alia", 23.01).

AZERBAIDJAN

Les journalistes estiment qu'à en juger d'après l'attitude adoptée par Bakou face au conflit opposant Moscou et Tbilissi, les perspectives d'amélioration des relations russo-azerbaïdjanaises ne sont pas du tout évidentes. "La dégradation des relations entre la Géorgie et la Russie ont placé l'Azerbaïdjan devant un choix très difficile: coopérer avec la Russie dans le blocus de la Géorgie ou poursuivre, par contre, le soutien énergétique de la Géorgie dont le territoire est traversé par d'importantes artères énergétiques et de communication et qui est explicitement épaulée par l'Occident. Nul doute que dans ces circonstances le choix de la seconde variante par l'Azerbaïdjan est évident et sans doute justifié. Quoi qu'il en soit, on ne voit pas clairement les perspectives des tentatives actuelles de stabilisation des relations avec la Russie alors que cette dernière a déjà engagé tous ses puissants leviers de pression, tant sur la Géorgie que sur l'Azerbaïdjan" ("Zerkalo", 20.01). "Sur le plan stratégique, l'Azerbaïdjan ne peut tout simplement pas se permettre de se quereller avec la Russie. Et il ne s'agit pas seulement du problème des hydrocarbures ou de celui des marchands de rue. La frontière entre l'Azerbaïdjan et la Russie n'est toujours pas délimitée définitivement et il y existe même des tronçons faisant l'objet de griefs territoriaux réciproques... On ne doit pas non plus oublier les relations entre la Russie et l'Iran. La Russie peut bien s'entendre avec l'Iran et soulever la question du partage des eaux de la mer Caspienne. Et il peut s'avérer alors que bien des gisements que nous considérons comme les nôtres se retrouvent soit dans le secteur iranien, soit dans celui de la Russie ou du Turkménistan" ("Ekho", 23.01).

KAZAKHSTAN

Astana devrait profiter de la politique pragmatique de l'Allemagne, présidente de l'UE et du G8, qui cherche à régler le problème de la sécurité énergétique européenne en invitant les pays centrasiatiques à participer à la construction de pipelines contournant la Russie et au transport de pétrole, estiment les experts. "Selon les fonctionnaires européens, la mise en service de l'oléoduc Bakou-Ceyhan et du gazoduc Bakou-Tbilissi-Erzerum est importante pour l'UE, mais l'Europe est aussi intéressée à la réalisation d'autres projets de transport de produits énergétiques dans la région de la Caspienne et crée un groupe de travail approprié" ("Delovaya nedelia", 19.01).

KIRGHIZIE

Les journalistes présagent l'aggravation de la situation économique en Kirghizie, voire la crise de certains secteurs à la suite de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi russe sur les travailleurs migrants. "Certains produits textiles de bonne qualité vendus sur les marchés russes sont produits en Kirghizie. De nombreux ateliers textiles kirghizs vont rester sans débouchés, parce que la Russie a limité le nombre des ressortissants étrangers travaillant sur les marchés" ("Obchestvenny reiting", 18.01).

OUZBEKISTAN

Les médias analysent la situation en Ouzbékistan un mois après le décès du président Saparmourat Niyazov. Selon les experts, la mort du Turkmenbachi n'a pas eu de conséquences dramatiques et le programme des réformes proposé par les nouvelles autorités ne fera que geler la situation. Dans le même temps, les tentatives d'Achkhabad pour profiter des contradictions entre les intérêts américains et russes mettent en péril la stabilité au Turkménistan et dans l'ensemble de l'Asie Centrale. "L'amendement de la Constitution n'a pas changé la nature, le caractère ou la composition du pouvoir turkmène. Les réformes n'étaient pas appelées à provoquer un "dégel turkmène". La réaction dure aux actions de l'opposition indique que le pouvoir n'a pas l'intention de renoncer au patrimoine de Niazov... D'une part, Achkhabad mène des négociations avec les États-Unis et les assure de son attachement à la démocratie, d'autre part, il commence à retransmettre certaines émissions de la télévision russe... Cet "azimut politique" témoigne que les personnes au pouvoir n'ont pas de programme d'actions" ("Ferghana.ru", 22.01)

TADJIKISTAN

Les médias estiment que la Russie cherche à transformer l'Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) en une sorte d'OTAN au sein de la CEI. "Les relations entre la Russie et beaucoup de pays de la CEI et de l'Occident se dégradent chaque année. L'OTSC pourrait devenir un instrument important de préservation de l'influence politique de la Russie sur ses alliés peu nombreux dans l'espace postsoviétique. D'ailleurs, ce ne sera pas une chose facile. On s'en tient toujours au principe formulé par le président russe, à savoir transformer l'OTSC de bloc militaire en organisation de sécurité internationale capable de réagir à toutes les menaces, en une sorte de l'OTAN au sein de la CEI" ("Asia-Plus", 18.01).

Analysant la situation autour de l'octroi d'une licence de prospection sur deux champs de pétrole et de gaz tadjiks à la société russe Gazprom, les médias estiment que le risque est justifié. Gazprom prend des risques économiques importants en investissant dans les champs difficiles à explorer sans savoir le volume exact des réserves de pétrole et de gaz qu'ils recèlent. Mais il s'agit plutôt d'une initiative stratégique que d'un projet purement commercial pour le monopoleur gazier russe... Gazprom ne veut pas "perdre" ce pays", a dit un expert du ministère russe du Développement économique et du Commerce. Quant au Tadjikistan, il est intéressé à l'exploitation des gisements de gaz prometteurs, puisqu'il exporte presque 98% d'hydrocarbures" ("Kurier Tadjikistana", 18.01).

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