D'une part, on ne peut que se réjouir des succès de l'Etat russe qui possède la VTB. En continuant à acheter des actions, il pourrait détenir une part dans EADS qui lui permettrait de participer à sa direction, ce qui ouvrirait de nouvelles possibilités d'extension de la coopération entre le consortium et la Russie. D'autre part, si les plans de privatisation de la VTB débattus ces dernières années de façon plus ou moins animée deviennent réalité, il pourrait s'avérer que l'achat d'actions d'EADS n'est qu'une étape du transfert du capital public à l'étranger.
Un repartage grandiose de la propriété a eu lieu ces dernières années en Russie. L'Etat a éloigné d'une manière ou d'une autre les managers et les entrepreneurs de l'époque d'Eltsine des projets les plus avantageux. L'affaire Ioukos est l'exemple le plus éclatant de ce repartage. "L'ère Poutine" s'achèvera dans deux ans. L'expérience historique enseigne que l'arrivée d'un nouveau leader, même s'il appartient à la même équipe que le président actuel, entraînera un nouveau repartage de la propriété. Par conséquent, le meilleur moyen de conserver la fortune pour ceux qui ont des doutes sur leurs perspectives sous le nouveau pouvoir est de la transférer à l'étranger.
Sans une couverture idéologique appropriée, elle suscitera de nombreuses élucubrations. Ainsi, la tentative avortée du chef de Severstal Alexeï Mordachov de fusionner avec la compagnie luxembourgeoise Arcelor, deuxième producteur mondial d'acier, a été présentée non pas comme un transfert par l'homme d'affaires russe de ses capitaux à l'étranger, mais comme l'absorption du numéro un mondial de la sidérurgie par un entrepreneur russe, et comme l'accès du capital russe aux actifs européens prometteurs. La déclaration selon laquelle en achetant des actions la banque publique russe essaie d'accéder à la direction du consortium aéronautique européen apparaît donc comme un bon argument en faveur de l'exportation des capitaux.