Par Vassili Zoubkov, RIA Novosti
La proposition de Vladimir Poutine, faite lors de son séjour à Tomsk, de modifier l'itinéraire de l'oléoduc Sibérie orientale - Océan Pacifique en vue d'éviter une pollution, même hypothétique, du plus grand réservoir d'eau douce du monde, le lac Baïkal, devient réalité.
Les écologistes russes et leurs collègues étrangers jubilent. Leurs manifestations et leur plainte déposée à la Cour suprême de Russie contre le projet du gouvernement de construction d'un oléoduc à proximité de la rive nord du lac ont été entendues par le président. Comme l'ont déclaré les Verts, s'il venait à se présenter pour un nouveau mandat, il recevrait des millions de voix supplémentaires de défenseurs de l'environnement.
Au début de l'année, le chef de l'Etat avait chargé les départements concernés par le projet d'achever en avril toutes les concertations à ce sujet. Le Service fédéral de surveillance écologique, technique et atomique (Rostekhnadzor), le Service fédéral de contrôle en matière d'exploitation des ressources naturelles (Rosprirodnadzor), le Comité d'Etat russe pour l'expertise industrielle (Glavgosexpertiza), le ministère des Situations d'urgence, la compagnie Transneft, principal exécutant du projet, et d'autres, avaient déjà approuvé les expertises des départements. La Cour suprême avait rejeté les plaintes des organisations écologistes et de certains citoyens, reconnaissant la légitimité de la décision du gouvernement sur l'oléoduc. Les travaux de construction du tube devaient commencer cet été en Sibérie orientale. Une cérémonie solennelle était même en préparation.
Les députés se trouvent également dans une situation embarrassante. Dans un premier temps, ils avaient inclus dans le projet de Code sur les Eaux la proposition de leurs collègues d'Irkoutsk d'interdire la construction d'ouvrages industriels dans la zone de protection des eaux du Baïkal, mais toutes ces précisions avaient totalement disparu en deuxième lecture.
Il s'avère que toutes les expertises et décisions prises ont induit la société en erreur. La sécurité du Baïkal
aurait pu être renforcée des dizaines, sinon des centaines de fois, simplement en éloignant l'itinéraire de l'oléoduc de 40 km au nord du lac.
Certes, les paramètres économiques du projet changeront. Semion Vaïnchtok, président de Transneft, a déjà déclaré que le nouvel itinéraire du tube serait rallongé de quelques centaines de kilomètres. Les dépenses s'accroîtront considérablement. Chaque tranche de 100 km de l'oléoduc reviendra à 350 millions de dollars. De nouvelles recherches s'imposent. Mais le lac Baïkal, de même que Paris, vaut bien une messe.
L'idée d'éloigner l'itinéraire de l'oléoduc plus au nord a été suggérée au président par l'académicien Nikolaï Laverov, mais le problème du Baïkal inquiétait depuis longtemps Vladimir Poutine. Les dirigeants de tous les départements intéressés ont probablement poussé un soupir de soulagement après la décision présidentielle.
Il faut rendre hommage au président de Transneft Semion Vaïnchtok, bien qu'il ait été surpris par la décision inattendue du chef de l'Etat. Néanmoins, laissant de côté les intérêts de la compagnie, il a soutenu cette idée, en déclarant que les changements apportés à l'itinéraire n'influeraient pas sur les délais d'achèvement de la construction de la première tranche.
Le lac Baïkal, lieu unique au monde, est l'objet de notre fierté, et sa défense pourrait bien devenir une idée nationale pour de nombreux Russes.
