Dmitri Rogozine démissionne de la présidence du parti Rodina

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Par Sergueï Kovalev, commentateur de RIA Novosti.

Dmitri Rogozine a décidé de quitter son poste de président du parti Rodina (Patrie). "En partant de considérations tactiques et à l'issue de consultations avec mes partenaires et amis politiques (le Kremlin n'en fait pas partie), j'ai pris la décision de quitter tous les postes significatifs au sein du parti, dont celui de président", a-t-il déclaré, cité par le quotidien Kommersant.

Le sixième congrès du parti Rodina se réunira samedi 25 mars. Ses délégués s'apprêtaient à y régler le sort de leur président. Et ils avaient beaucoup de questions à poser à Rogozine.

A l'approche du congrès, le président de Rodina a fait l'objet de violentes critiques.

Nikolaï Novitchkov, président de la Coalition des forces populaires patriotiques de Rodina, avait notamment fait savoir son intention d'obtenir la démission de Rogozine et le retrait des instances dirigeantes du parti d'Alexandre Tchouïev et Andreï Saveliev, responsables, selon lui, "du bourbier xénophobe dans lequel le parti s'est enlisé". Novitchkov a été soutenu en ce sens par le président du Parti social-démocrate de Russie Vladimir Kichenine, le président de l'Association sociale-démocrate de Russie Oleg Evdokimov, le président du mouvement "Centre social-démocrate de Russie" Alexandre Gorbounov et le président de l'Union des jeunes sociaux-démocrates Oleg Venevitine.

Ces derniers ont signé un accord de coopération, prenant l'engagement de "mettre en place une vaste coalition de forces socio-démocrates et socialistes de Russie (...), prête à remporter les prochaines élections à la Douma".

Dans un premier temps, les pères fondateurs de Rodina avaient positionné le parti comme une formation sociale-démocrate, à tendance "nationaliste éclairée". Mais son dirigeant s'était mis à "flirter" avec le nationalisme le plus marginal, encourageant, de l'avis de ses opposants, des tendances frôlant le nazisme. Un message antisémite adressé par le groupe parlementaire de Rodina à la Douma au Parquet général avait provoqué un vrai tollé au sein du parti. De nombreux partisans de Rogozine qui se veulent libéraux avaient alors tourné le dos au parti.

Un spot publicitaire - "Nettoyons Moscou des déchets" - que le parti avait diffusé en prévision des élections de décembre 2005 à l'Assemblée législative de Moscou, et reconnu par la justice comme incitant à la haine ethnique, avait aussi joué un rôle sinistre dans l'histoire de Rodina. Résultat, les candidats du parti avaient été interdits d'élection à Moscou, puis dans sept autres régions du pays.

Dmitri Rogozine en appelait à l'opinion mondiale, affirmant que "dans le monde, on ne croirait pas à la légende sur le "nazisme à la russe". Il estime que même avec cette image-là, son parti sera capable de remporter les élections à la Douma en 2007. Mais de nombreux délégués du congrès de samedi refusent d'entendre ses explications. Andreï Roujnikov, de la Sibérie occidentale, a par exemple déclaré que les "agissements ultranationalistes et xénophobes de Rogozine jetaient un discrédit sur le parti aux yeux de l'opinion". Roujnikov estime également que l'unique issue à cette situation est la démission de Rogozine.

Membre de la présidence de Rodina, Oleg Volkov, de la région de Lipetsk, est lui moins catégorique, mais la politique de Rogozine ne l'arrange pas non plus."Le parti traverse une crise profonde (...) et essuie défaite après défaite; le temps est venu de soulever la question de la responsabilité du chef", a-t-il dit. "Tout leader doit être assez courageux pour reconnaître ses erreurs et assumer ses responsabilités", estime le membre de la présidence de Rodina.

La filiale de Tchouvachie (Volga) du parti a fait parvenir un message spécial au congrès. Ses auteurs affirment que Rogozine et son entourage sont "préoccupés uniquement par la préservation de leurs propres positions à la direction du parti", proposant d'exclure Rogozine "pour incitation à la haine ethnique, xénophobie, et pour avoir flirté avec des éléments fascisants et marginaux".

C'est donc décidé : Rogozine s'en va. Mais Rodina réussira-t-il à se débarrasser de son image de parti xénophobe et ultranationaliste ? Seuls les membres du parti et leurs futurs électeurs pourront, à terme, répondre à cette question.

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