Les problèmes baltes de l'Union européenne

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Par Piotr Romanov, RIA Novosti.

S'élargissant sans cesse à de nouveaux pays, l'Union européenne en tire naturellement des avantages, mais en subit aussi des inconvénients. Certains problèmes propres aux nouveaux entrants sont en passe d'être résolus demandant seulement un peu de temps et d'argent.

D'autres sont bien plus difficiles à régler car ils plongent leurs racines dans une histoire nationale compliquée. Le néofascisme en est l'exemple le plus éloquent. On ne peut pas dire que la vieille Europe se soit débarrassée de cette maladie qui perdure sous une forme rudimentaire dans de nombreux pays, y compris la Russie. Cependant, partout où pousse cette ivraie, l'Etat le combat comme il peut, et l'opinion publique en a honte.

Seuls les pays baltes, ex-républiques soviétiques depuis peu membres à part entière de l'UE, font exception à la règle. Il n'y a que là-bas que l'on considère les légionnaires SS comme des patriotes et des combattants de la souveraineté nationale, et qu'ils reçoivent honneurs et privilèges. Il n'y a qu'en Lettonie qu'on peut rencontrer un ancien des "Waffen SS" entouré de jeunes hommes robustes, se promenant fièrement au centre de la capitale en portant des drapeaux aux effigies sans équivoque et déposant des gerbes au pied du monument aux nazis.

Les actes des nazis baltes est une éternelle pomme de discorde entre Moscou et les pays baltes. Du point de vue des autorités en place dans les trois républiques, les légionnaires SS ont défendu l'indépendance des pays baltes contre les bolchéviques en combattant "simplement" dans les rangs de l'armée allemande. La Russie a sur la question un tout autre regard, qui est loin d'être aussi "simple". Un documentaire intitulé "Le nazisme à la balte", diffusé ces jours-ci à la télévision russe, a relancé la polémique et les attaques mutuelles.

Nikolaï Kabanov, l'un des rares députés d'origine russe à la Diète lettone, a été exclu de la commission parlementaire des affaires étrangères pour avoir organisé dans son bureau une projection du film à l'intention des médias lettons.

D'après Riga, le documentaire aurait été tourné "dans la pire tradition de la propagande soviétique". En Russie, on a de nouveau été saisi d'effroi en voyant les images d'archives montrant des Baltes, membres de la police locale dans le rôle de détachements punitifs et membres des Waffen SS, tirer sur la population civile - Juifs, Russes et Biélorusses confondus.

S'il n'était encore question que de lacunes historiques, ce serait un moindre mal, mais les députés baltes, auxquels on a donné la parole dans le documentaire, fabriquent un mythe aux yeux de tous et commencent même à y croire dur comme fer.

Je sais qu'une partie importante des populations baltes ne souhaitait pas vivre sous le régime des bolchéviques, mais il serait pervers de parler de lutte pour l'indépendance. Tout le monde sait que, selon la théorie raciale du IIIe Reich, les Baltes étaient placés un tout petit peu plus haut que les Juifs et les Slaves mais il était hors de question qu'ils reçoivent ne serait-ce qu'un peu d'indépendance des mains de Hitler et Himmler.

Selon les plans de Berlin, dévoilés lors du procès de Nuremberg, les pays baltes devaient après la guerre être encore plus morcelés et leur population déportée en Sibérie. Quant aux terres baltes, elles auraient dû être peuplées par des populations de "race" allemande. Ainsi, quand un Balte rejoint les SS pour massacrer des Juifs et des Russes, il s'agit non pas de "lutte pour l'indépendance", mais de vulgaire collaboration et de génocide.

Le destin des pays baltes, pris entre l'URSS de Staline et l'Allemagne nazie, n'était certainement pas enviable. A la veille de la guerre, les diplomates baltes oscillaient entre Moscou et Berlin, faisant des promesses des deux côtés en même temps, trahissant ainsi à la fois les Allemands et les Russes.

Cependant, il y avait une autre solution, puisqu'il est question de lutte pour l'indépendance. La Pologne, par exemple, a dignement perdu contre un adversaire bien plus fort qu'elle, à savoir l'Allemagne. Autre pays de la Baltique, la Finlande, qui a essuyé une défaite, même de manière formelle, contre l'URSS en perdant une partie de son territoire, a néanmoins remporté une victoire morale indiscutable et, ce qui est le plus important, a préservé son indépendance. Ni la Lettonie, ni l'Estonie, ni la Lituanie n'ont suivi cet exemple.

Le documentaire "Le nazisme à la balte" ne fait que rassembler des images des atrocités commises par les nazis baltes sélectionnées minutieusement dans les archives. On les voit entre autres en train de boire du punch et de s'amuser, en regardant Leningrad en train de mourir de faim. On voit également une femme internée dans le camp de concentration de Salaspils près de Riga alors qu'elle était encore petite fille. Notons en passant que dans les livres d'histoire actuels lettons, ce camp est encore appelé "établissement de rééducation par le travail". La rescapée raconte d'une voix entrecoupée de sanglots qu'on l'a emmenée voir une expérience lors de laquelle les médecins nazis ont arraché à sa mère ses deux jambes sans anesthésie. On voit également une fosse dans laquelle tombent les corps dénudés des Juifs baltes. Comme le raconte le rabbin Berl Lazar, avant la guerre, les Juifs appelaient Vilnius la "seconde Jérusalem", parce qu'ils représentaient la majorité de ses habitants. A présent, au centre de la ville se dresse une synagogue extraordinaire, mais vide. Enfin le documentaire se termine sur des images de Riga aujourd'hui: des légionnaires SS avec des fleurs.

Les anciens SS, comme tous les vieillards, auraient pu inspirer de la pitié s'il n'y avait pas à côté d'eux, et avec leur bénédiction, des jeunes Nazis lettons en train de chanter en c�ur une chanson qui raconte comment ils ont incendié "la maison des Russes". Ce n'est pas pour rien que les anciens affirmaient déjà qu'un loup peut changer de peau mais pas d'âme. La question est de savoir que l'UE va faire de cette âme?

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