Un partenariat fondé sur le pragmatisme

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Par Alexeï Makarkine, directeur adjoint du Centre de technologies politiques-RIA Novosti

La dernière visite du président russe Vladimir Poutine en Azerbaïdjan s'est déroulée dans le contexte positif qui caractérise actuellement les rapports entre Moscou et Bakou.

Selon le président russe, en effet, ces rapports représentent "un facteur de stabilité politique dans la région caucasienne". Ces tendances positives sont fondées sur le pragmatisme qui, dans les relations internationales, joue souvent un rôle plus important que des sympathies - ou antipathies - passagères.

En effet, la Russie est l'un des grands partenaires économiques de l'Azerbaïdjan, notamment pour les questions énergétiques, qui ont été débattues par le président russe et son homologue azerbaïdjanais Ilham Aliev.

Ainsi, à la veille de la visite du numéro un russe, le ministre azerbaïdjanais de l'Industrie et de l'Energie, Natik Aliev, déclarait que son pays ne limiterait pas les importations de gaz ni d'électricité depuis la Russie. Le fait est que Bakou avait décidé d'acheter à l'Iran une partie du gaz dont elle a besoin, mais il est désormais clair qu'il s'agit d'une diversification partielle de sources d'énergie et non d'une révision des priorités. L'oléoduc Bakou-Novorossiïsk reste un projet économique d'importance stratégique : cette année, il transportera 3 millions de tonnes de brut azerbaïdjanais vers l'Europe (c'est un chiffre minimal et il est fort possible que cet indice sera dépassé).

Un dialogue positif a lieu sur toutes les autres questions, du statut du Haut Karabakh (enclave arménienne qui refuse la souveraineté de Bakou, ndlr) à la coopération sur la Caspienne. On ne saurait affirmer qu'il s'agit de questions simples, mais les deux pays possèdent une riche expérience du compromis. Il y a cinq ans, par exemple, Moscou et Bakou avaient trouvé un langage commun dans la question très compliquée du partage du fond de la Caspienne. A l'époque, les deux capitales avaient réussi à la régler, en débouchant sur un accord à long terme. La coopération bilatérale dans la lutte antiterroriste se développe également, ce qui est surtout d'actualité pour la Russie qui doit assurer la sécurité au Caucase du Nord.

Mais la philosophie de la diversification est propre à la politique azerbaïdjanaise en général. Bakou entretient de bons rapports aussi bien avec les Etats-Unis qu'avec l'Iran, en dépit des désaccords qui divisent ces deux pays. L'Azerbaïdjan développe ses rapports avec la Russie, dans le cadre de la CEI, mais maintient sa présence au GUAM, une organisation créée en contrepoids de la CEI et qui regroupe l'Ukraine, la Géorgie et la Moldavie. Il n'y a rien d'étonnant à ce que les grandes puissances mondiales aient reconnu les résultats des récentes élections législatives azerbaïdjanaises l'an dernier - seule la quantité de "réserves" nuançait leurs réactions, par exemple, de la part des Etats-Unis, ce qui ne revêt pourtant pas, pour le gouvernement de Bakou, une importance de principe. Mais toute diversification est fondée sur des positions de base. Et les rapports Bakou-Moscou sont prioritaires pour l'une et l'autre capitale.

Mais le caractère positif des rapports entre les deux pays est aussi visible d'après des gestes symboliques. Une fois à Bakou, Vladimir Poutine s'est immédiatement rendu sur la tombe de Gueïdar Aliev, homme dont les activités avaient défini la politique locale pendant des dizaines d'années (il était à l'origine des rapports entre la Russie et l'Azerbaïdjan indépendant).

Autre signe, l'ouverture officielle de l'Année de la Russie dans ce pays du Caucase du Sud. Au programme, une multitude d'événements culturels pour tous les goûts, par exemple, le festival consacré au centenaire de Dimitri Chostakovitch, avec la participation du célèbre maestro Mstislav Rostropovitch. Bakou attend aussi le Premier salon international du Livre russe, les tournées du Théâtre de jeunes de Russie, ainsi que des programmes culturels présentés par les régions russes. L'Année sera fermée solennellement en décembre, lors d'une visite du premier ministre russe dans la capitale azerbaïdjanaise.

Les hommes d'affaires des deux pays assistent actuellement au Deuxième forum de coopération économique Azerbaïdjan-Russie, et les deux présidents ont inauguré à Bakou l'Exposition nationale russe qui réunit plus de 140 entreprises représentant 21 régions de la Fédération.

Le pragmatisme de Bakou sert d'antithèse à la situation qui prévaut dans les relations russo-géorgiennes, relations excessivement mues par des émotions négatives, marquées par l'exacerbation de vieilles contradictions et l'escalade de vieux conflits.

Par contre, dès qu'il s'agit de la priorité de l'économie sur la politique et de la raison sur les clichés idéologiques, les rapports bilatéraux non seulement se distinguent par une grande stabilité mais possèdent aussi un grand potentiel de développement.

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