MOSCOU, 19 janvier - Piotr Gontcharov, commentateur politique de RIA Novosti. Mercredi 18 janvier, Paris a rejeté la proposition de Téhéran de reprendre les négociations, car avant leur redémarrage l'Iran doit revenir à son moratoire bénévole sur les travaux d'enrichissement d'uranium (auparavant, Londres et Berlin ont réagi de la même façon à cette initiative iranienne).
Apparemment, l'Iran serait prêt, à l'approche des négociations, à décréter de nouveau un moratoire sur l'enrichissement d'uranium. Quoi qu'il en soit, ce ne serait plus le même moratoire qu'autrefois. Son cadre serait cette fois bien plus large.
C'est qu'auparavant, il ne s'agissait pas de la suspension d'une partie des travaux, mais de l'ensemble des travaux liés à l'enrichissement d'uranium, à titre d'élément du moratoire bénévole adopté par l'Iran en réponse à un message approprié du Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Et c'est justement à ce point de départ que Téhéran doit revenir à la veille des négociations.
La Russie ne pourra soutenir l'Iran "qu'à certaines conditions bien connues qui prévoient le respect par Téhéran du moratoire sur l'enrichissement d'uranium", a déclaré mardi dernier le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, tout en se prononçant contre le renvoi du "dossier nucléaire" iranien devant le Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies.
Et c'est le deuxième problème clé dans la situation présente. Dans quel but, en effet, la "troïka européenne" (France, Allemagne, Grande-Bretagne) se propose-t-elle de soumettre à l'examen du CS de l'ONU un projet de résolution sur le programme nucléaire iranien? On apprend que ledit document appellerait délicatement l'Iran à "accorder son concours à l'Agence internationale de l'énergie atomique dans l'éclaircissement des questions concernant d'éventuels travaux en matière de mise au point de l'arme nucléaire". De toute évidence, les auteurs d'un document aussi correct espèrent que Téhéran pourra difficilement refuser de collaborer avec l'AIEA.
On a l'impression que la "troïka européenne" entend renoncer à une "attaque frontale" contre l'Iran sous-entendant l'ultimatum suivant: "le moratoire ou des sanctions immédiates", pour passer à la tactique des pressions échelonnées afin de maintenir Téhéran sous un contrôle permanent.
Une telle tactique permettrait de faire en sorte que l'Iran accepte finalement la coopération ultérieure avec l'AIEA, mais sous le contrôle du CS de l'ONU qui décidera, à son tour, d'adopter ou non des sanctions en fonction du comportement de Téhéran aux négociations avec l'Union européenne (UE).
Or, Téhéran n'a pas tardé à exprimer son attitude face à une telle perspective, en déclarant notamment qu'en cas du renvoi de son dossier devant le CS de l'ONU, l'Iran sortirait du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et du protocole additionnel au TNP. Alors, nul ne pourra reprocher à l'Iran quoi que ce soit, car la participation au TNP et au travail de l'Agence internationale de l'énergie atomique, créée notamment pour contrôler l'application du Traité de non-prolifération nucléaire, est tout à fait bénévole.
Force est de reconnaître que, jusqu'ici, Téhéran a réussi le plus souvent à imposer habilement son propre scénario aux négociations. C'est pourquoi on doit dès maintenant soit changer complètement le modèle "européen" des négociations soit essayer d'exercer des pressions extrêmement puissantes sur l'Iran, mais alors selon le "scénario américain". Et là, le rôle clé revient de toute évidence à Moscou et Pékin, en tant que membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU pouvant frapper de veto les résolutions de ce dernier.