L'avion régional russe RRJ accède au marché mondial

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MOSCOU, 27 décembre (par Andreï Kisliakov, commentateur politique de RIA Novosti).

L'un des programmes aéronautiques les plus dynamiques et probablement le plus ambitieux réalisés actuellement en Russie est celui qui concerne l'avion commercial régional russe RRJ (Russian Regional Jet), dont le premier exemplaire devrait prendre l'air dès 2006.

Les avions de la famille RRJ sont un produit associant des solutions techniques de pointe, de bonnes performances de vol et de bons indices économiques, auxquels il convient d'ajouter l'infrastructure de soutien moderne du maître d'ouvrage.

Il est incontestable que la Russie progresse sur le marché mondial des avions régionaux. On en veut pour preuve la signature, fin novembre 2005, entre la compagnie russe GSS (Avions civils Sukhoï) et la société de leasing Concord Aviation basée à Dubai, d'un contrat portant sur la livraison de quarante avions russes de 95 places (version RRJ95).

Dans le même temps, la Russie défend ses positions sur le marché intérieur des avions moyen-courriers: toujours en novembre, GCC et Aéroflot ont signé un contrat concernant la livraison de trente RRJ. Le montant de ce contrat est évalué à 820 millions de dollars. Quelque temps auparavant un accord préliminaire avait été conclu au sujet de la livraison de RRJ à la compagnie aérienne Sibir. La société de leasing Finansovaïa figure parmi les acheteurs potentiels du RRJ les plus importants.

Le ministère russe de l'Industrie et de l'Energie voit dans le RRJ un projet des plus prometteurs, à même d'assurer une percée qualitative de l'industrie aéronautique russe et de hisser cette dernière au niveau des grands avionneurs mondiaux, et pour cette raison il entend financer la création du RRJ à hauteur de 36 milliards de roubles (le dollar s'échange contre environ 28,8 roubles). Les concepteurs de l'avion ont également obtenu des garanties de prêts. Dans le même temps, le RRJ est un projet foncièrement commercial et ici l'Etat n'intervient que comme investisseur, l'argent sera restitué au trésor au fur et à mesure des ventes des appareils fabriqués en série.

Le fait que les ventes d'avions aient commencé dès l'étape de la conception constitue une première dans la pratique russe.

En toute justice il faut quand même relever que le RRJ n'est pas du tout un produit cent pour cent russe, mais le fruit d'une large coopération internationale avec les principaux fournisseurs mondiaux d'éléments d'aéronefs. Le RRJ sera notamment doté de moteurs SaM146 conçus par PowerJet, une entreprise mixte de la société française Snecma (Safran Group) et du groupement russe science-production Satourn. Le premier SaM146 sera testé au mois de mars 2006 à bord d'un avion-laboratoire Il-76 et en octobre de la même année c'est équipé de ces moteurs que le premier exemplaire expérimental du RRJ prendra l'air.

Parmi les autres fournisseurs étrangers d'éléments, signalons des sociétés comme Tholes (avionique), Liebherr (systèmes de commande), Honeywell (installation de propulsion auxiliaire), Messier Dowty (châssis), Intertechnique (circuit de carburant), Hamilton Sundstrand (système d'alimentation électrique), Air Cruisers (équipements de sauvetage) et plusieurs autres. Il convient de souligner que beaucoup d'entreprises russes interviendront ici en qualité de sous-traitants.

Il va de soi que tous les éléments importés dont le RRJ sera truffé seront homologués selon les standards internationaux. Les experts russes et étrangers se rejoignent pour dire que le RRJ95, tout comme les appareils de la même famille RRJ60 et RRJ75 posséderont de sérieux atouts à l'exportation. Il importe ici que le prix du RRJ sur le marché occidental sera de 10 à 15% plus bas que celui des concurrents. Pour ce qui est des acheteurs russes du RRJ, le gouvernement russe est disposé à abaisser ou à supprimer totalement les taxes frappant les éléments importés dans le cadre de ce projet.

Les études de marketing révèlent que dans les 15-20 années à venir le marché mondial pourrait avoir besoin d'environ 800 RRJ, dont 300-350 appareils resteraient sur le marché intérieur russe. Les premières livraisons de RRJ devraient avoir lieu en 2008. Une chose parfaitement possible grâce au procédé d'assemblage sans bâti emprunté à Boeing et permettant de réduire de 30% la quantité de travail nécessaire et, partant, la durée de la construction des avions.

En ce qui concerne le concurrent du RRJ, le moyen-courrier ukrainien An-146, il a pris l'air pour la première fois en décembre 2004. La procédure d'homologation devrait prendre fin dans le courant du premier semestre 2006. Initialement, il était prévu que la fabrication en série du An-148 aurait lieu dans les ateliers de la Société aéronautique anonyme de Voronej (BASO) et de l'usine aéronautique Aviant à Kiev. Cependant, après l'élection du nouveau président ukrainien et le refroidissement qui s'est ensuivi dans les relations entre les deux pays les préparatifs en vue de l'assemblage de l'avion à la BASO avaient pratiquement cessé. Le feu vert pour l'An-148 n'a été donné que tout récemment. A la fin du mois d'octobre BASO et ANTK Antonov ont passé un contrat de licence permettant de lancer dès 2006 la fabrication en série de cet avion en Russie.

En principe, Sukhoï et Antonov pourraient ne pas être concurrents, il suffirait pour cela que le premier commence la production d'appareils de 95-110 places avec un rayon d'action accru (3.000-5.000 kilomètres) et le deuxième celle de moyen-courriers de 70-80 fauteuils (1.000-2.000 kilomètres). Ici la Russie serait intéressée à la fabrication d'An-148 du moment que cet appareil est constitué à 69% d'éléments provenant d'entreprises aérospatiales russes.

En Russie c'est la société Ilyushin Finance C° (IFK) qui est chargée du leasing financier et opérationnel de ces avions. A l'heure actuelle, elle possède un portefeuille d'accords fermes et précontractuels portant sur 54 appareils. En outre, la compagnie ukrainienne Aerosvit Airlines et la République du Kazakhstan ont annoncé qu'elles souhaitaient faire l'acquisition respectivement de 10 et de 7 An-148 fabriqués à Voronej. Au cours des dix années à venir, la BASO devrait sortir quelque 250 avions.

L'accord de licence a ceci d'important qu'il autorise la Russie à modifier l'An-148 de base pour en faire des versions transport militaire, cargo, cargo-passagers, etc. Selon les experts, les Forces armées et les autres structures de force de la Russie pourraient avoir besoin de 200 de ces appareils, notamment pour la surveillance maritime, la lutte contre le brouillage radio-électronique, la reconnaissance radio-technique et tactique. Les An-148 pourraient également être utilisés comme poste de commandement volant et avions ravitailleurs.

Par ailleurs, la réalisation du programme An-148 assurerait plusieurs années de travail au personnel de la BASO.

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