La Russie pourrait se pencher davantage sur l'exportation de l'enseignement

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La Russie ne forme pas plus de cent mille étudiants étrangers par an. Sa part sur le marché international est faible. Seulement 5% des étudiants faisant leurs études à l'étranger choisissent la Russie.

La Russie ne forme pas plus de cent mille étudiants étrangers par an. Sa part sur le marché international est faible. Seulement 5% des étudiants faisant leurs études à l'étranger choisissent la Russie.

Les recettes russes en la matière ne dépassent pas les 150-200 millions de dollars, le pays ne contrôlant que 0,5% du marché mondial des services de l'enseignement.

Ce marché est partagé depuis longtemps. Les Etats-Unis occupent la position de leader incontestable, en contrôlant un tiers des finances qui circulent dans ce secteur. Mais même dans ces conditions-là, le volume de l'exportation russe de l'enseignement supérieur pourrait s'élever à 4 milliards de dollars, estiment les experts. Cependant, indique le ministre russe de l'Education et de la Science, Andreï Foursenko, dans un proche avenir, la Russie ne pourra pas tirer un grand profit de la formation de spécialistes étrangers.

La Russie compte en premier lieu sur les étudiants originaires de Chine, de l'Inde, de Corée du Sud, des pays de la CEI (Communauté des Etats indépendants) et des Etats baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), ainsi que les jeunes gens issus de la diaspora russe en Europe.

Ces pays-là manifestent un véritable intérêt pour l'enseignement russe, avant tout dans le domaine des sciences naturelles. Les traditions éducatives russes sont devenues depuis longtemps une marque déposée. Ce n'est pas un hasard si les physiciens, les chimistes, les biologistes, les médecins spécialistes et les programmeurs russes trouvent sans problème un emploi bien rémunéré à l'étranger.

Cependant, les pays mentionnés ci-dessus, et surtout la Chine et l'Inde, s'y connaissent eux-mêmes dans la demande internationale en matière d'enseignement. Le nombre d'étudiants étrangers en Chine a décuplé depuis 1990 pour se chiffrer à 50.000. Les jeunes étudiants chinois et indiens optent de plus en plus souvent pour les Etats-Unis et non pas pour la Russie en choisissant le pays où ils souhaitent faire leurs études.

Autrement dit, la Russie perd ses clients, bien qu'une année d'études coûte aux étrangers seulement 2000 à 5000 dollars. En comparaison, aux Etats-Unis, un étudiant étranger paie de 15.000 à 25.000 dollars par an, en Grande-Bretagne, de 12.000 à 20.000 dollars.

Il est d'autant plus regrettable de perdre des étudiants potentiels que, selon les prévisions de l'UNESCO, le nombre d'étudiants faisant leurs études en dehors de leur pays d'origine augmentera jusqu'à 5 ou 7 millions d'ici à 2025. Ce seront l'Inde et la Chine, et avec elles le monde arabe, qui "exporteront" la plus grande quantité d'étudiants.

Le caractère fondamental de l'enseignement est un patrimoine des plus précieux de la Russie. Le pays ne peut pas y renoncer s'il ambitionne de promouvoir l'exportation de son enseignement dans le contexte d'une compétitivité la plus féroce.

Si le système d'enseignement en Russie s'adapte au système occidental (la Russie participant au processus de Bologne), en adoptant le schéma d'enseignement à deux étapes (baccalauréat-maîtrise), la perte des qualités fondamentales de l'enseignement russe sera une faute impardonnable, avertissent les recteurs de nombreuses écoles supérieures russes, dont le recteur de l'Université Lomonossov de Moscou, Victor Sadovnitchi. Leur position est facile à comprendre: dans ce cas-là, l'enseignement russe sera encore moins compétitif.

Une autre chose est néanmoins évidente: il importe de moderniser le système d'enseignement dans le pays, pour qu'il réponde davantage aux besoins des consommateurs potentiels. Un équilibre doit être établi entre l'approche pragmatique et les principes fondamentaux essentiels, note le ministre russe de l'Education et de la Science, Andreï Foursenko.

Certaines écoles supérieures procèdent déjà à des études de marché indépendantes, étudient les tendances du marché international de l'éducation, fondent des centres chargés de mettre en œuvre des projets internationaux en matière d'enseignement, achètent de nouveaux équipements. Parallèlement, elles étudient les technologies modernes.

Une de ces technologies, à savoir l'enseignement à distance, vient d'apparaître en Russie. L'expansion dans ce domaine se fera encore attendre. Le libre accès à Internet reste encore un service de luxe pour un grand nombre d'établissements d'enseignement. Les filiales des écoles supérieures russes à l'étranger (ouvertes non seulement par des universités de Moscou, mais aussi par des écoles régionales) ne font pas preuve d'une activité trop énergique, et on ne s'attend pas ultérieurement à ce que celles-ci se développent.

Après dix ans d'indifférence à l'étranger, la langue russe commence à regagner du terrain. Par exemple, en Chine, le nombre de personnes étudiant le russe a presque doublé en un an seulement. 500.000 personnes déjà parlent russe dans le Céleste Empire.

Quoi qu'il en soit, il importe de pratiquer plus largement l'organisation de cours de langue pour les étrangers. Il faut également faire paraître des manuels et des disques compacts éducatifs en langues étrangères. L'infrastructure de l'enseignement, elle aussi, laisse à désirer: pour s'en rendre compte, il suffit tout simplement de regarder les foyers que les universités proposent aux étudiants étrangers.

La Russie procède à des échanges d'étudiants avec 30 pays, dont les Etats-Unis, l'Allemagne, l'Inde, la Finlande, l'Estonie, la Belgique, la République de Corée. Ces programmes offrent la possibilité de communiquer en langues étrangères, d'organiser des loisirs communs et des échanges professionnels. Ces échanges ne sont pas uniquement organisés sous l'égide du ministère russe de l'Education et de la Science.

Le Conseil russe de mobilité académique contribue lui aussi à l'échange international d'étudiants, d'enseignants, d'idées et d'expérience en matière d'enseignement. Cette association bénévole des écoles supérieures russes et d'autres établissements d'enseignement est un analogue du Conseil britannique (British Council), de DAAD (Office allemand d'échanges universitaires), d'EduFrance et d'autres organismes transnationaux d'enseignement.

Cependant, tous les efforts déployés aujourd'hui par la Russie sont insuffisants. Il importe de créer une organisation chargée de promouvoir énergiquement les intérêts russes en matière d'enseignement à l'étranger, une structure capable de réunir les écoles supérieures russes souhaitant avoir accès au marché international. Il s'agit d'une question de portée nationale, compte tenu de l'importance des ressources idéologiques et économiques de l'enseignement.

De plus en plus d'acteurs font leur apparition sur le marché international des services de l'enseignement. Même les petits pays cherchent à y trouver leurs créneaux, et y parviennent, en conjuguant tous leurs efforts. Les "anciens" acteurs, tels que les universités européennes, n'envisagent pas, de leur côté, d'abandonner le terrain. La Russie doit commencer par développer la sphère de l'enseignement: les réserves et l'expérience accumulées encore à l'époque soviétique le lui permettent. Si l'on y ajoute une publicité moderne correctement organisée et les nouvelles technologies, l'exportation de l'enseignement sera beaucoup plus efficace.

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