Du nouveau sur le système de Saturne

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MOSCOU, 23 décembre - Youri Zaïtsev, expert à l'Institut de recherches spatiales de l'Académie des sciences de Russie - RIA Novosti.

La station interplanétaire automatique Cassini voyage depuis dix-huit mois déjà dans le système de Saturne où elle continue de faire des découvertes et de transmettre des informations précieuses sur Terre.

Elles sont si nombreuses qu'elles suffiraient pour écrire plusieurs livres. Nous allons donc nous limiter aux résultats les plus importants des recherches effectuées durant l'année qui s'en va.

Un événement effectivement inédit s'est produit au début de l'année : le 14 janvier la sonde européenne Huygens s'est posée en douceur sur la surface de Titan, le plus gros des satellites de Saturne. Les données recueillies par la sonde ont été envoyées vers Cassini qui les a retransmises sur Terre où elles ont été captées par 17 radiotélescopes installés aux Etats-Unis, au Japon, en Chine et en Australie. Cassini a analysé les signaux émis par la sonde pendant les 147 minutes et 13 secondes qu'a duré sa descente et pendant 72 minutes et 13 secondes avant que l'appareil orbital ne se trouve "à l'ombre" du faisceau radio des antennes de Huygens. Le radiotélescope australien a cependant continué de recevoir les signaux de la sonde pendant encore deux heures environ.

Malheureusement, la Terre n'a pas reçu la moitié des données recueillies par la sonde, notamment toute l'information sur les vents dans l'atmosphère de Titan, et plus de la moitié des quelque 750 photos prises. Une bévue en est la cause : les programmeurs ont oublié de doter le logiciel d'un des deux canaux du récepteur de Cassini de la commande actionnant sa mise en marche.

Pendant que la sonde transmettait ses informations, elle s'est enfouie dans le sol à 10-15 cm de profondeur. L'appareil qui ne s'était pas encore refroidi a fait fondre partiellement le sol constitué d'un mélange de glace d'eau et d'hydrocarbures qui a dégagé du méthane dont les émissions ont été enregistrées par la sonde. Evidemment, le sol au point d'atterrissage était imprégné de méthane liquide qui constitue la matière des précipitations périodiques sur Titan. L'analyse chimique de l'atmosphère a montré que la quantité de méthane, de carbone et d'autres éléments change avec les saisons. Par contre, la sonde n'a pas découvert de lacs de méthane liquide.

En 2006 Cassini s'approchera encore à treize reprises de Titan, dont six fois à moins de 950 km. Cela promet de nouvelles découvertes.

Actuellement, les scientifiques connaissent 47 satellites de Saturne. 34 d'entre eux, dont les 16 découverts par Cassini, ont été baptisés. En février 2005 la station est passée à 6 189 km d'Atlas et l'a photographié, de même que Prométhée et Pandore. Ces satellites ont une structure poreuse et ressemblent à un amas de gravillons et de glaçons. En mars, la station a fourni des photos d'Epiméthée montrant deux cratères importants, jusque là inconnus. Epiméthée et Janus qui tournent de façon synchrone autour de Saturne sont composés principalement d'une glace d'eau friable. Il est possible qu'ils soient nés de l'éclatement d'un corps céleste. Les photos de Mimas montrent un cratère d'impact de 130 km de diamètre. A en juger par sa dimension, la collision dont il a résulté a failli détruire le satellite. Les photos d'Encelade prises à 500 km de ce nain permettent de constater que les cratères d'impact sont très peu nombreux à sa surface, que la température y est très basse (-2000°C) et qu'il y fait très clair car le satellite reflète plus de 90% de la lumière solaire. La sonde a découvert aussi des geysers en activité et une atmosphère de vapeur d'eau. Sur Dioné, la sonde a aperçu des fissures et crevasses grandes et claires sur une surface assez sombre. La surface de Téthys est beaucoup plus claire et comporte des cratères plus nombreux que Dioné. Il y a, sur Téthys, des failles de 5 km de profondeur, dont la plus importante s'étire sur 2 000 km. La surface de Rhéa est marquée d'un cratère en matière claire qui a résulté d'un impact relativement récent. Vers la fin de l'année, Cassini a photographié Hyperion et Telesto.

Les anneaux de Saturne ont également fait l'objet d'études approfondies qui ont établi qu'ils diffèrent les uns des autres par leur structure : par la densité de la matière, la taille des particules (de moins de 5 cm à plusieurs mètres) et par d'autres caractéristiques physiques.

Analysant l'information fournie par Cassini les scientifiques ont été frappés par la complexité incroyable de la magnétosphère de Saturne et du plasma (flux aimanté de particules chargées) qu'elle renferme. Ils ont établi que les anneaux, les "lunes" de glace et l'atmosphère de Titan participent à la formation des flux tourbillonnaires de plasma de Saturne. Cela distingue la magnétosphère de Saturne de celle de la Terre. Mais elle ressemble à celle de Jupiter en ce qui concerne les propriétés dynamiques. Il a été également établi qu'en certains endroits le plasma retenu par Saturne a une composition chimique semblable à celle du plasma qui entoure les comètes.

Quatre zones plasmiques ont été découvertes sur Saturne. Elles ont une composition chimique et une fluidité différentes. La Terre possède deux zones analogues : le plasma de l'ionosphère prédomine dans l'une et le plasma des vents solaires dans l'autre. Il y a aussi une autre différence : le plasma de la Terre tourne avec la planète à 25 000 km d'elle. Saturne retient son plasma à une distance pouvant atteindre 1,5 million de km! A cette distance se trouvent également les anneaux de la planète et la majorité de ses satellites, avec Titan et son atmosphère, qui sont exposés à l'action des flux de plasma de différentes compostions chimiques. D'autre part, les différents types de plasma s'interagissent par des procédés chimiques et électromagnétiques.

Les réserves de plasma dans la magnétosphère de Saturne sont sans cesse complétées sous l'effet des rayonnements ultraviolets du Soleil. Avec les photons venant directement de l'astre, ses électrons et ions bombardent la surface des satellites de glace, des anneaux de Saturne et l'atmosphère de Titan. Ils possèdent assez d'énergie pour libérer de la glace et ioniser des molécules d'eau ou d'azote primaire. Les particules nouvellement ionisées s'accélèrent sous l'action du champ magnétique en rotation rapide de Saturne et ce processus se renouvelle. De l'avis des chercheurs, pour comprendre ce processus de A à Z, ainsi que l'origine des anneaux de Saturne, on aura besoin de toutes les sept dizaines de révolutions autour de la planète que Cassini aura à effectuer durant les années suivantes.

Cependant, de l'avis du docteur ès sciences physico-mathématiques Vladimir Tchernyi, l'origine mystérieuse des anneaux de Saturne résiderait dans la supraconductibilité de la matière. Lors d'une conférence de presse donnée au siège de RIA Novosti il a présenté aux journalistes (et non aux représentants de sa profession) sa théorie de la nature électromagnétique de la formation des anneaux saturniens par les particules supraconductrices du nuage protoplanétaire... Le moins que l'on puisse dire est que cette théorie suscite beaucoup de doute chez les spécialistes.

Tout d'abord, le Dr Tchernyi n'explique pas ce qui, dans les anneaux de Saturne, constitue le milieu supraconducteur. Ce ne serait quand même pas la glace! Même si les anneaux primitifs comportaient des éléments ayant cette qualité, ils devaient inévitablement les perdre au cours de l'évolution. La théorie est exposée de façon descriptive et son auteur juge prouvé ce qui ne peut être considéré que comme une hypothèse.

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