Les difficultés du protocole de Kyoto en Russie

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MOSCOU, 30 novembre (Tatiana Sinitsyna, commentatrice de RIA Novosti).

La 11e session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques qui se tient à Montréal (du 29 novembre au 9 décembre) est la première réunion des Parties au Protocole de Kyoto depuis son entrée en vigueur.

La conférence a pour objectif d'entériner officiellement les actes réglementaires du Protocole de Kyoto - les accords de Marrakech, de créer les structures internationales nécessaires en vue de mettre en oeuvre les mécanismes du Protocole de Kyoto, d'ouvrir les négociations formelles sur les engagements d'après 2012.

Serguei Kouraiev, responsable des programmes écologiques du Centre écologique régional russe, qui a participé à la conférence a déclaré: Nous nous attendons à des discussions difficiles en raison de la position intransigeante des Etats-Unis à l'égard du Protocole de Kyoto et du refus des pays en voie de développement de prendre des engagements en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre". Bien entendu, tout cela ne contribue pas à l'application du programme visant à réduire l'influence de l'activité humaine sur l'atmosphère, programme qui figure dans les documents du Protocole de Kyoto. De l'avis de Serguei Kouraiev, le destin de ce document international d'importance exceptionnelle est aujourd'hui mis en doute et perd ses perspectives.

Malheureusement, l'application du protocole de Kyoto progresse difficilement en Russie où elle est même suspendue. Il y a un an, en acceptant de ratifier ce document et en prenant de nouveaux engagements internationaux, la Russie a reçu de nouvelles possibilités d'attirer des investissements supplémentaires. Les débuts ont été énergiques. Aussitôt après l'entrée en vigueur du Protocole de Kyoto (février 2005), le gouvernement fédéral a adopté un Plan d'action en vue de mettre en œuvre le Protocole de Kyoto et a crée en mai la commission intersectorielle appelée "Kyoto".

Le temps passe et les résultats concrets sont absents. Les délais prévus par le Plan d'ensemble ne sont pas respectés sur tous les points. La base juridique de la mise en oeuvre des mécanismes du Protocole de Kyoto n'est toujours pas adoptée, le système national de recensement des émissions de CO2 n'est pas créé, il n'y a pas non plus de données sur l'absorption du gaz carbonique par les écosystèmes russes: les forêts, les marais, etc. En outre, pour que le système des rapports dans le cadre du Protocole de Kyoto fonctionne bien, il faut créer non seulement un système de recensement et de contrôle des émissions, mais aussi déterminer les droits d'émission. On ne parle pas non plus des nouveaux engagements à prendre après 2012.

Le retard peut s'expliquer par le fait que la base juridique est élaborée par divers organismes d'Etat: le ministère du Développement économique et du Commerce, le ministère des Ressources naturelles, le Service météorologique russe, etc. Mais la connaissance des causes ne simplifie pas le problème. Par exemple, le flou entourant la procédure d'élaboration et d'approbation des projets de mise en oeuvre commune empêche l'arrivée en Russie des investisseurs étrangers intéressés aux projets carboniques. Les accords peu nombreux conclus en été avec les pays étrangers sont sur le point d'être dénoncés. Le gouvernement n'a pas encore approuvé (à défaut de quoi leur mise en œuvre est impossible) les deux contrats de la Fondation énergétique carbonique de RAO EES Rossii (Electricité de Russie) avec l'Agence danoise de protection de l'environnement. Ces contrats prévoient la réduction des émissions de gaz carboniques par les entreprises Khabarovskenergo et Orenbourgenergo.

Le destin du Protocole de Kyoto en Russie sera probablement difficile. D'abord, de longs débats animés ont eu lieu sur sa ratification, ensuite il y a eu des atermoiements à la mise en œuvre du protocole. "L'absence en Russie de stratégie nationale de réglementation des émissions de gaz à effet de serre en tant qu'élément fondamental de la définition de la politique du pays, intérieure et extérieure, sur les problèmes du changement climatique est la cause principale de la situation observée, estime Serguei Kouraiev. C'est la raison de tous les retards dans l'adoption des documents, lois, actes réglementaires, etc. D'ailleurs, peut-il en être autrement, alors que ni le gouvernement, ni la société civile ne savent ce qu'il convient de faire au niveau national pour régler le problème et restreindre l'action de l'homme sur le climat. A mon avis, l'incompréhension est la conséquence d'un problème plus profond et plus vaste qui se pose au pays: l'absence de politique écologique nationale".

De plus, il y a des difficultés subjectives purement russes dans la mise en oeuvre des dispositions du Protocole de Kyoto. Selon Serguei Kouraiev, c'est, avant tout, la politisation de la participation de la Russie à toutes les transactions sur la réduction des émissions, en premier lieu, dans le commerce des quotas des émissions de gaz à effet de serre. On peut également citer le refus des ministères et des départements d'assumer une responsabilité pour la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto et l'attente passive des propositions des investisseurs potentiels. "Certains groupes se prononcent contre la participation de la Russie au Protocole de Kyoto, regrette Serguei Kouraiev. Les propos tenus à divers niveaux au sujet du Protocole de Kyoto selon lesquels il s'agirait d'une "carte jouée", d'une "page tournée", ce qui permet de négliger sa mise en œuvre, ne manquent pas de susciter l'inquiétude".

Quoi qu'il en soit, il y a un critère incontestable dans l'attitude envers ce problème: la Fédération de Russie doit respecter ses engagements conformément à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et au Protocole Kyoto.

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