La publicité électorale pour le candidat "Contre tous" est un droit civique légitime (SYNTHESE)

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MOSCOU, 14 novembre - RIA Novosti. La Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie a confirmé lundi le droit des citoyens de faire de la propagande pour le candidat "Contre tous" (une telle rubrique figure notamment sur les bulletins de vote dans la période post-soviétique de l'histoire de la Russie).

Faisant suite à la plainte du délégué aux droits de l'homme de Russie, Vladimir Loukine, la Cour a statué sur la constitutionnalité de certaines clauses des lois sur les garanties essentielles des droits électoraux et sur les élections des députés à la Douma d'Etat (Chambre basse du Parlement russe).

La Cour constitutionnelle a reconnu comme étant anticonstitutionnelles les normes "frappant d'interdiction la publicité électorale contre tous les candidats".

"A l'avenir, d'ici la décision du législateur (Parlement), la Constitution de la Fédération de Russie agira en direct sur cette question précise", a fait savoir à l'issue de l'audience le magistrat de la Cour constitutionnelle, Vladimir Yaroslavtsev.

L'une des normes de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, document auquel Vladimir Loukine se référait justement stipule notamment que toute personne bénéficie du droit à la liberté d'expression, bien que ce droit comprenne la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence de la part des autorités publiques.

Mikhaïl Mitioukov et Youri Charandine, représentants du chef de l'Etat et du Conseil de la Fédération (Chambre haute du Parlement russe) à la Cour constitutionnelle, n'ont pas été d'accord avec cette prise de position.

"La propagande contre tous ne contribue pas au meilleur exercice des droits civiques, car elle a pour objectif de ne pas élire les représentants des organes du pouvoir", a notamment estimé Mikhaïl Mitioukov.

Youri Charandine a fait remarquer, de son côté, que le droit à la publicité électorale ne revenait qu'aux candidats et à leurs représentants, mais comme, physiquement, le candidat "Contre tous" n'existait pas en réalité, un tel droit n'existait pas, lui non plus.

Le magistrat de la Cour constitutionnelle, Nikolaï Bondar, a exposé son point de vue particulier à ce sujet. Il a qualifié de "douteuses, voire erronées, les thèses sur lesquelles la décision de la Cour reposait". Autrement dit, Nikolaï Bondar considère comme incorrect l'assimilation du droit des citoyens à la publicité électorale avec le droit à la liberté d'expression.

Qui plus est, a fait remarquer le magistrat, en exhortant à voter contre tous, "on s'assigne en fait un objectif anticonstitutionnel, celui de ne pas reconnaître la validité des élections".

"Le législateur est en droit d'établir des restrictions aux votes "contre tous"", est l'avis de Nikolaï Bondar.

Et de signaler que la rubrique "contre tous" sur le bulletin de vote ne reste que dans certains pays-membres de la Communauté des Etats indépendants (CEI), et plus précisément en Ukraine, en Biélorussie, en Moldavie et en Arménie. "Tous les autres Etats de la CEI ont d'ores et déjà renoncé à une telle rubrique", a-t-il indiqué.

Le président du Comité pour la Législation constitutionnelle et les Structures d'Etat à la Chambre basse du Parlement russe, Vladimir Pliguine, a, par contre, appuyé la décision de la Cour constitutionnelle.

Quand son comité parlementaire recevra le texte de cette décision de la Cour constitutionnelle, les députés réfléchiront à des amendements éventuels à apporter à la loi "Sur les garanties essentielles des droits électoraux et des droits de participer au référendum des citoyens de la Fédération de Russie", a expliqué Vladimir Pliguine.

Selon lui, les parlementaires devraient étudier très attentivement cette décision. Et de préciser que si dans la législation électorale au niveau des régions, les bulletins de vote ne comportent de rubrique "contre tous", on ne peut évidemment pas faire de la publicité électorale de ce genre. Quoi qu'il en soit, a repris le président du Comité pour la Législation constitutionnelle de la Douma, cette question doit être examinée en rapport avec la décision d'aujourd'hui de la Cour constitutionnelle.

Le vice-président du Comité pour le Budget et les Impôts de la Douma, Andreï Makarov (Russie Unie), estime, pour sa part, que le droit des citoyens de faire de la propagande pour le candidat "contre tous" est tout à fait conforme à la Constitution.

"La propagande contre tous les candidats est objectivement l'une des composantes majeures du droit général de participer aux élections. Somme toute, la publicité électorale est le droit électoral du citoyen. Aussi, dicter à qui que ce soit l'objet de sa propagande électorale est-ce une violation pure et simple du droit à la liberté d'expression et à la liberté de la publicité électorale", a relevé Andreï Makarov.

Dans le même temps, cet avocat autrefois célèbre a reconnu que cette question ne relevait pas tellement du droit, mais plutôt de la politique. Selon Andreï Makarov, c'est la question de la maturité de la société. "Prenons l'exemple des pays, tels que les Etats-Unis, la France ou l'Allemagne. La rubrique "contre tous" est absente de leurs bulletins de vote. Mais est-ce que cela signifie qu'ils n'ont pas de démocratie?", se demande le député.

Or, en attendant, il n'est pas possible de supprimer totalement cette rubrique. "Y sommes-nous prêts? Pas tout à fait. Nous estimons qu'au niveau fédéral une telle rubrique est encore nécessaire. Aussi, ne peut-on sans doute envisager la suppression de cette rubrique qu'au niveau des régions", a dit Andreï Makarov.

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