A la différence des opérateurs traditionnels, les virtuels ou MVNO (pour Mobile Virtual Network Operator) n'ont pas de fréquences radio, ni d'équipements personnels. Ils achètent en gros des ressources à des opérateurs réels et puis, en usant de différentes méthodes de marketing, proposent sur le marché un service sous leur propre marque. La situation est analogue dans l'industrie du tourisme où il existe des tour-opérateurs qui organisent des voyages à forfait et les vendent en gros aux agences touristiques. Ou dans le commerce où il y a des ventes en gros ou en détail. Du point de vue du consommateur, il n'y a aucune différence entre les opérateurs traditionnels et virtuels : seuls les tarifs diffèrent, et la méthode de promotion du service. Le Conseil scientifique et technique du ministère des Technologies de l'information et des Télécommunications a décidé de créer deux zones MVNO expérimentales. Ainsi que l'a expliqué le ministre Léonid Reïman, pour protéger les droits de l'abonné, son ministère propose de lui offrir par la voie législative la possibilité de garder son numéro de téléphone lorsqu'il changera d'opérateur.
Ce service n'est pas ignoré dans le monde et il se développe rapidement dans de nombreux pays. Il favorise tout d'abord la concurrence entre les opérateurs. L'abonné peut changer d'opérateur tout en conservant son numéro. Autrement dit, il choisit ainsi le meilleur fournisseur sans rien perdre. Ce service sera disponible sur le marché russe dès l'année en cours. Des licences ont été délivrées à NMT (pour Narodny mobilny telefon) et ZAO Evroset. Les deux sociétés ont été créées en 2004 spécialement pour réaliser des projets MVNO.
Ce sont deux entreprises d'orientationstrès différentes. NMT a été créée avec le soutien de l'administration de Moscou. D'après son directeur général, Vladimir Choulga, 10% de ses futurs abonnés seront recrutés parmi les couches de la population aux ressources modestes qui bénéficieront de la téléphonie mobile à des tarifs réduits.
ZAO Evroset a été fondée par Federalnaïa sistema Evroset, une des unités du réseau commercial Evroset (51%), et ZAO TM SAT, distributeur exclusif des services de téléphonie mobile par satellite Thuraya sur le territoire de la Russie (49%). Le directeur des technologies de l'information d'Evroset, Andréi Volodine, a annoncé que la carte SIM de cette entreprise mixte sert à assurer l'accès aux services de téléphone mobile Thuraya aussi bien terrestre que satellitaire.
Les deux entreprises projettent de lancer leurs zones expérimentales en avril. Les tests dureront six mois après quoi il sera décidé de procéder à leur exploitation commerciale. NMT aura sa zone MVNO à Moscou. Evroset n'a pas encore fait son choix définitif.
Par la suite, des réseaux virtuels seront déployés sur l'ensemble du territoire du pays. NMT a déjà trouvé un partenaire régional, le holding Tele2-Rossia. "NMT souhaite profiter de nos réseaux GSM régionaux pour fournir des services d'opérateur virtuel. Nous sommes prêts à entamer une telle coopération", a déclaré le président de Tele2-Rossia, Iouri Dombrovski. Tele2-Rossia ne cache pas qu'il entrevoit son avenir dans son extension géographique avec l'aide de MVNO, en premier lieu à Moscou. A propos, dans la majorité des pays d'Europe Tele-2 agit justement en tant qu'opérateur virtuel : en Norvège (sur le réseau Telenor), aux Pays-Bas (Telfort), en Autriche (Connect Austria), en Finlande (Radiolinjia) et en Allemagne (O2).
L'apparition de MVNO est capable de modifier la situation sur le marché russe des télécommunications. Avec l'arrivée d'opérateurs virtuels la technologie de prestation de services peut changer, on verra notamment s'accentuer la tendance à séparer le service des réseaux et la distribution des produits. Les opérateurs mobiles qui possèdent des fréquences et construisent des stations de base se chargeront des réseaux, tandis que la distribution des services sera confiée aux sociétés qui sont plus près de l'élaboration des produits, aux distributeurs de contenus et aux opérateurs MVNO. Autant dire que la division en commerce de gros et de détail sera plus nette.
En ce qui concerne le détail, le modèle MVNO peut et doit stimuler les fournisseurs de contenus. Dans l'idéal, les distributeurs de contenus doivent encaisser jusqu'à 80-90% des recettes de ces services pour avoir intérêt à les développer.
L'apparition d'opérateurs virtuels doit favoriser aussi le développement des réseaux de téléphonie mobile de la troisième génération (3G). Dans les réseaux 3G, la liaison vocale (fonction téléphonie classique) n'est pas le service principal, l'attention étant surtout accordée à la transmission de données et à d'autres produits proposés par les distributeurs de contenus. Avec l'actuelle gamme modeste des services chiffrés demandés sur le marché, le passage momentané au réseau 3G risque de s'avérer prématuré. Les opérateurs virtuels doivent alors assumer un rôle important dans la formation de nouvelles activités sur le marché russe des télécommunications mobiles. Le directeur général de NMT, Vladimir Choulga, a expliqué la situation ainsi : "Si nous n'arrivons pas à créer de telles conditions, il sera inutile de nous attaquer aux réseaux 3G parce qu'il serait absurde de déployer ce genre d'équipement pour les seules communications vocales. Les réseaux 3G ne doivent être implantés que pour des services nouveaux. Si nous ne pouvons pas garantir la liberté et l'avantage commercial aux fournisseurs de contenus, nous n'arriverons jamais à bout de cette mission. De ce point de vue, il nous importe de procéder dès maintenant à l'implantation de MVNO et de mettre en place avec les fournisseurs de contenus des relations avantageuses pour eux".
