Prochaine visite de Poutine à Kiev: L'Ukraine d'aujourd'hui est la Russie d'hier

S'abonner

MOSCOU, 16 mars. /par Piotr Romanov, RIA Novosti/. Le 19 mars le président russe Vladimir Poutine se rendra à Kiev. La mission n'est pas facile. Il sera accueilli par un président sur lequel il ne misait pas, par une première ministre contre laquelle des procédures judiciaires ont été mises en mouvement en Russie, et par des relations bilatérales qu'il faudra reconstruire après la "révolution orange". Le voyage de Iouchtchenko en janvier à Moscou a, certes, contribué à faire rentrer les relations russo-ukrainiennes dans le cadre de la décence, mais c'était plus une visite protocolaire qu'une rencontre de travail. L'essentiel, pourtant, ce sont les affaires.

Il est évident qu'à l'opposé de la Russie qui a connu, à l'époque d'Eltsine, une révolution démocratique avec ses côtés positifs et négatifs, aucun cataclysme sérieux, réellement révolutionnaire ne s'est produit dans les autres anciennes républiques soviétiques qui ont composé la CEI : tout simplement, après l'éclatement de l'URSS l'ancienne nomenclature soviétique locale est arrivée au pouvoir dans ces nouveaux Etats et s'est habituée comme elle l'a pu aux nouvelles conditions.

Certains, comme Aliev-père en Azerbaïdjan, ont émergé en profitant de leur expérience politique. Turkmenbachi a été sauvé par le gaz et l'habitude du peuple de vivre sous le féodalisme. Ailleurs, les autorités se sont pendant longtemps maintenues à la surface grâce à la démagogie et à la débrouillardise. L'Ukraine nous en offre un exemple. Maintenant, avec un certain retard historique les mines révolutionnaires, le plus souvent, heureusement, dans une enveloppe de velours, ont commencé à exploser dans l'espace post-soviétique. Ce qui d'ailleurs était prévisible.

Commentant à une certaine époque la fin du premier mandat présidentiel de Vladimir Poutine, l'auteur de ces lignes relevait, entre autres choses, les risques évidents auxquels le locataire du Kremlin serait confronté dans l'avenir le plus proche, y compris dans l'arène politique extérieure. En premier lieu celui de l'instabilité politique dans plusieurs pays voisins. Il était indispensable de maintenir pendant le deuxième mandat des relations normales, de bon voisinage, avec ces voisins, indépendamment de la couleur du pouvoir en place.

Bien entendu, tout ne dépend pas du leader russe mais, compte tenu du poids de la Russie, c'est naturellement Moscou qui devait endosser la majeure partie de la responsabilité du maintien de la stabilité à la frontière et de la défense des intérêts nationaux.

En Géorgie ou en Moldavie, la Russie n'a pas eu la chance d'avoir des interlocuteurs compréhensifs. Il ne faut donc pas trop reprocher à Vladimir Poutine le refroidissement du climat sur ces axes. Imprévisibles, M. Saakachvili ou M.Voronine ont plus d'une fois mis la diplomatie russe dans l'embarras.

L'Ukraine, c'est différent. Là, les intérêts de la Russie sont de loin plus importants et les erreurs de la partie russe sont suffisamment évidentes, mais l'essentiel est que bien des événements actuels en Ukraine, à la différence, par exemple, de la Géorgie, sont faciles à prévoir. En fait, ce qui se passe aujourd'hui en Ukraine est une sorte de déjà-vu politique.

L'Ukraine d'aujourd'hui, c'est la Russie d'hier, c'est-à-dire la Russie d'Eltsine. Le même enthousiasme au départ, le même révolutionnarisme péremptoire, le même romantisme au détriment du pragmatisme tranquille, les mêmes promesses irréalisables faites au peuple, la même "crème" humaine, malheureusement inévitable, dans les échelons supérieurs du pouvoir. Et enfin la même foi aveugle en l'"aide obligatoire de l'Occident".

Seul le temps peut guérir ces maux. Et aussi la Russie, qui s'en est déjà rétablie.

Forte de cette expérience, la Russie peut donner à l'Ukraine de bons conseils pour éviter au moins une partie des erreurs commises par les jeunes réformateurs russes. Si, bien entendu, les Ukrainiens veulent bien écouter les Russes. Si ce n'est pas aujourd'hui, ce sera demain ou après-demain. Il appartient à Poutine de saisir avec tact le moment opportun.

Nul doute que ce moment arrivera tôt ou tard. Le marché et la géopolitique ont leurs principes qui ne sauraient être annulés dans les relations entre la Russie et l'Ukraine, qu'on le veuille ou non.

L'essentiel est de comprendre qu'ayant essuyé une défaite en Ukraine sur le court terme, la Russie finira par obtenir un succès à plus long terme. Quand on le comprend, on peut préparer avec plus d'assurance le voyage à Kiev.

Inutile de paniquer.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала