Quelques événements de la vie de la Russie

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MOSCOU, 25 novembre. (Par Youri Filippov, commentateur politique de RIA Novosti). Le début du cycle planétaire annuel, la naissance du Christ, la solidarité des femmes et des travailleurs, la date de la fondation de l'armée et de la marine, la souveraineté de l'Etat, la Victoire sur le fascisme allemand, l'expulsion des interventionnistes polonais. Qu'est-ce que ces événements ont de commun? Voilà une question à laquelle même le plus ignare des Russes répondrait sans la moindre hésitation. Chacun des événements susmentionnés est célébré en Russie comme une fête nationale.

A la fin du mois de novembre, la Douma (chambre basse du parlement russe) a approuvé la conception d'une loi instituant de nouvelles dates fériées et en annulant plusieurs anciennes. Après que le document aura été entériné par le Conseil de la Fédération (chambre haute) et signé par le président, des congés de Nouvel An seront légalisés pour la première fois en Russie: grâce au pont de la Noël ajouté aux jours chômés les Russes pourront pendant onze jours oublier les soucis du travail.

Outre ces fêtes de famille que sont le Nouvel An et la Noël, la Russie célèbre aussi des fêtes à caractère social: la Journée internationale de la femme (8 mars), la Journée de la solidarité internationale des travailleurs (1-er mai), par exemple. Pour beaucoup d'hommes le 8 mars est la seule et unique journée de l'année où ils font la vaisselle, le ménage et le marché. Par contre, la solidarité du 1-er mai n'a presque plus aucun sens en Russie. Depuis plusieurs années les habituels contingents d'ouvriers industriels s'éclaircissent progressivement et le "nouveau prolétariat" - entendez par là les fonctionnaires et les employés des services - délaisse les traditions, préférant jouir du 1-er mai comme une journée de repos supplémentaire.

La Journée du défenseur de la Patrie (23 février) est jour férié depuis peu, mais contre toute attente elle n'a pas acquis de teneur patriotique particulière, devenant plutôt le "pendant masculin" du 8 mars. Les Russes ne se sont pas encore entièrement faits à la Journée de la Russie (12 juin). En 1990, c'est ce jour là qu'avait été adoptée la Déclaration sur la souveraineté étatique de la Russie et depuis elle est considérée comme le point de départ de l'histoire russe post-soviétique.

La Journée de la Victoire (9 mai) figure parmi les fêtes célébrées avec le plus grand entrain en Russie. Au hit-parade, elle ne le cède qu'au Nouvel An. A l'époque soviétique la victoire dans la Seconde Guerre mondiale (en Russie la participation de celle-ci au conflit /1941-1945/ est appelée Grande Guerre patriotique) avait été célébrée dans des centaines de films et de livres. Les manifestations commémoratives annuelles, la célébration des anciens combattants avaient créé un culte de la Victoire toujours bien vivant. Il est remarquable que cette fête commémorée "les larmes dans les yeux" (l'URSS avait perdu 27 millions de ses ressortissants dans cette guerre) n'a jamais été empreinte de sentiments anti-allemands.

Les Russes sont sûrs que tout sentiment anti-polonais sera exempt de la Journée de l'unité (4 novembre), récemment instituée par la Douma. Le 4 novembre 1612, l'armée populaire des états généraux, composée de représentants des ethnies slaves et turques peuplant la Russie, avait chassé de Moscou les interventionnistes polonais et libéré le trône pour la dynastie des Romanov, qui ensuite devait gérer la Russie pendant plus de 300 ans.

Les Romanov ont été déchus en février 1917 et quelques mois plus tard, le 7 novembre, les bolcheviks emmenés par Lénine ont accédé au pouvoir en Russie. Pendant très longtemps cette date a été célébrée comme l'anniversaire de la Grande Révolution socialiste d'octobre. Le culte d'Octobre surpassait celui de la Victoire. Les immenses réalisations du pays dans les domaines de la science et de l'enseignement, qui en l'espace de quelques décennies avaient permis de passer de l'araire à l'exploration spatiale, de moderniser l'industrie, d'améliorer considérablement le niveau de vie général et aussi de vaincre dans la Grande Guerre patriotique étaient associées à Octobre rouge.

Cependant, la date du 7 novembre ne figure plus parmi les fêtes russes. La principale raison en est que la marche en avant du socialisme avait été accompagnée de sacrifices énormes. La violence de la guerre civile, l'élimination massive des koulaks (paysans riches) pendant la collectivisation de l'agriculture et les répressions politiques pas moins massives dans les années 30 ont dissipé l'auréole de la Révolution d'Octobre en 1991, après la perte du pouvoir par le Parti communiste et la désintégration de celui-ci. Pendant quelques années encore le 7 novembre a été commémoré, ensuite il a été proposé de le considérer comme la Journée de la concorde et de la réconciliation. Mais cette idée n'a pas abouti: ce jour là les communistes organisaient leurs défilés avec portraits de Staline et mots d'ordre antigouvernementaux tandis que les descendants de ceux qui avaient souffert à 'époque soviétique tenaient leurs propres rassemblements, sans vouloir eux non plus se réconcilier avec leurs anciens offenseurs.

Telles sont les fêtes nationales - anciennes et actuelles - célébrées en Russie. Certaines d'entre elles sont liées à des fragments du passé, qui symboliquement survivent dans le présent et créent une vision du futur. Seulement il est une fête en Russie qui n'a rien de symbolique et qui est on ne peut plus réelle. C'est le Nouvel An, un événement universel mille fois célébré et que le sera encore mille fois avec la même ferveur.

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