Le président de la fondation "Politika", le célèbre politologue russe Viatcheslav Nikonov, a estimé: "Dans le livre "My Life", les lecteurs américains se sont sans doute intéressés à une seule et même chose, et plus précisément à ces passages de l'autobiographie de Bill Clinton où il s'agit de l'ancienne stagiaire de la Maison-Blanche - Monica Lewinsky". Pour ce qui est des Russes, ils porteront évidemment leur attention à d'autres choses, est l'avis de Viatcheslav Nikonov. Ils voudront savoir ce que l'ex-Président des Etats-Unis écrit de la Russie et ce, d'autant plus, poursuit le président de la fondation "Politika", que Bill Clinton s'est plutôt illustré en "bon connaisseur de la vie en Russie".
L'engouement de Bill Clinton pour la Russie date de ses plus jeunes années. Encore adolescent, il se passionna pour les écrits des grands classiques russes. En 1970, il arrive pour la première fois à Moscou, en y apportant, entre autres, dans ses bagages, des romans de Léon N.Tolstoï et de Dostoïevski. Commele fait remarquer Viatcheslav Nikonov, dans ses mémoires, Bill Clinton évoque Moscou de l'époque où figure inévitablement "un bonhomme du Comité de sécurité d'Etat qui mène avec le jeune Américain des entretiens salutaires interminables". On y trouve aussi la description d'une "étudiante à l'Université de l'amitié des peuples Patrice Lumumba" qui avait invariablement partagé les festins moscovites" du futur Président des Etats-Unis.
Les relations de Bill Clinton avec l'ex-Président de Russie, Boris Eltsine, étaient pratiquement idylliques. "La Russie se présentait à Bill Clinton comme une sorte de champ de bataille entre des forces blanches et des forces noires, fait remarquer le président de la fondation "Politika". Les premières y étaient incarnées par Boris Eltsine lui-même et son Premier ministre russe de l'époque, Viktor Tchernomyrdine, alors que les dernières y étaient représentées par le leader des communistes, Guennadi Ziouganov, et le leader du Parti liberal-démocrate (LDPR), Vladimir Jirinovski". Bill Clinton avait toujours tenu à ce que Boris Eltsine reste au pouvoir, résume le politologue.
Et d'ajouter que dans les questions de l'élargissement de l'Alliance de l'Atlantique Nord, Bill Clinton avait cherché, par conséquent, à ne pas compliquer la vie à Boris Eltsine. En 1995, par exemple, le Président américain avait même promis à son homologue russe qu'il n'y aurait pas d'élargissement de l'OTAN avant les présidentielles de 1996 en Russie". Et quand "Boris Eltsine adhéra finalement au programme "Partenariat pour la paix", cela fut bel et bien interprété comme son aval quasi formel pour l'élargissement de l'Alliance de l'Atlantique Nord", indique Viatcheslav Nikonov.
D'autre part, la décision des Etats-Unis de se retirer du Traité sur la défense antimissiles (ABM) de 1972 (ce traité soviéto-américain avait retenu la course aux armements) avait été dicté, comme l'avoue Bill Clinton lui-même, par le désir d'arracher au Congrès un plus important financement des programmes balistiques.
"C'est un "Harry Potter" politique, a dit du livre "My Life" le rédacteur en chef de la revue "Knijnoié obozrenié" ("Nouveaux livres" - NDLR) - Alexandre Gavrilov. D'après ce dernier, l'autobiographie de l'ex-Président américain a toutes les chances de devenir un best-seller dans sa catégorie.
Alexandre Gavrilov considère comme la plus intéressante cette partie du livre qui est notamment consacrée au procès au cours duquel Bill Clinton avait été obligé de déposer, sous serment, en décrivant les détails les plus intimes de ses relations avec Mademoiselle Lewinsky. "C'est un livre sur un particulier, homme intéressant à étudier. C'est l'histoire d'un leader politique qui est en train de vivre son revers. Somme toute, l'expérience d'une victoire sur un insuccès n'a pas de frontières nationales et peut sans doute être utile toujours et partout ", résume le rédacteur en chef de la revue "Knijnoié obozrenié".
Le livre ne manque pas de faits très intéressants en soi. Ainsi, Bill Clinton, dont les honoraires littéraires pour "My Life" se sont montés à 10 millions de dollars, alors que, dans les années de sa jeunesse, il arrivait à peine à joindre les deux bouts, tout en s'évertuant à se nourrir avec un petit dollar par semaine. A l'époque, il pensait sérieusement à une carrière de musicien ou de médecin. A son propre aveu, il finit par choisir la politique, car il la considérait tout simplement comme un métier de loin plus facile. Chose curieuse: il s'est même avéré qu'il se trouve en liens de parenté avec l'actuelle Président des Etats-Unis, George W. Bush, bien que ce soit à la 13-ème génération.
Les mémoires de l'ancien Président US peuvent-ils exercer un impact sérieux sur le déroulement de la campagne présidentielle aux Etats-Unis cette année? Cela est fort peu probable, estime Viatcheslav Nikonov. Et quant aux élections de 2008, tout porte à croire que c'est Hilary Clinton qui y serait la plus puissante candidate démocrate à la présidence et ce, d'autant plus que celle-ci ne le cède pratiquement en rien à son époux quand il s'agit d'écrire des mémoires.
