Ce 21 novembre marque le 10e anniversaire de l’Euromaïdan, une série de manifestations massives ayant duré plus de trois mois en Ukraine en réponse à la suspension des préparatifs pour la signature d'un accord d'association entre Kiev et l'Union européenne. Les aspirations des manifestants sont-elles devenues une réalité? Sputnik Afrique explique.
Le slogan "L’Ukraine c’est l’Europe!"
La réalité: des millions d’Ukrainiens ont profité d’un régime sans visa pour s’échapper. L’UE promet seulement à l’Ukraine qu’elle l’intégrera peut-être.
En juin 2022, l'Ukraine a officiellement reçu le statut de candidat, et la Commission européenne a récemment recommandé d'entamer des négociations avec Kiev en vue de son adhésion. Pourtant, le début des négociations serait au bord de l’effondrement: la Hongrie et l'Autriche s'y opposent, l'Allemagne, la France et l'Italie se livrent à des jeux en coulisses, la Roumanie avance des exigences supplémentaires. Même la Pologne, qui était auparavant le soutien le plus ardent de l’Ukraine, a présenté des revendications supplémentaires. Selon le Premier ministre hongrois Viktor Orban, l’Ukraine est désormais "à des années-lumière de l’UE". Et même si les négociations sur son adhésion à l’UE commençaient, même s’il n’a pratiquement aucune chance pour l’instant, le processus, comme le montrent les précédents dossiers, pourrait durer des décennies.
Le slogan "Nous sommes unis!"
La réalité: une interdiction de la langue russe, des amendes aux vendeurs, aux chauffeurs de taxi, aux serveurs s'ils parlent à un client en russe. Et ce dans un pays où, à l'époque du Maïdan, selon un sondage Gallup, 80% des citoyens avaient qualifié le russe comme langue maternelle. L'éviction massive de la langue russe de toutes les sphères de la vie publique s'est transformée sous Volodymyr Zelensky en destruction de toute mention des liens historiques avec la Russie. Ainsi: les noms des villes, des rues, des places ont été changés, des monuments démolis, les biographies d'écrivains, d'artistes et de scientifiques russes ont été ukrainisées. Et en juillet 2021, la Cour constitutionnelle d'Ukraine a décidé que "les citoyens russophones d'Ukraine ne constituent pas une unité sociale intégrale en tant que groupe ayant droit à une protection juridique en tant qu'unité ethnique ou linguistique".
L’Église orthodoxe ukrainienne a été pratiquement liquidée, ainsi que son principal sanctuaire, la laure des Grottes de Kiev. L’opposition chassée, les hommes politiques et les dissidents expulsés du pays, emprisonnés ou tués. La Russie est devenue l'ennemi officiel de l'Ukraine.
Le slogan "La liberté ou la mort!"
La réalité: une mobilisation totale et violente de tous les hommes, y compris d’handicapés. Les véhicules blindés coûtent cher, il faut les mendier auprès de l'Otan.
Le souhait de prospérité économique
La réalité: le budget pour 2024 comprend un déficit record de 1.570 milliards de hryvnias, soit 43,5 milliards de dollars. La croissance du PIB est projetée à 4,6% et l'inflation à 9,7%. Selon le Premier ministre Denys Chmyhal, "près de 50% des dépenses" (1.690 milliards de hryvnias, soit 46,9 milliards de dollars) iront" à la défense et à la sécurité de l’Ukraine". Il est prévu de couvrir le déficit grâce à des prêts des États-Unis, de l'UE, du FMI et de la Banque mondiale. Dans le même temps, le ministre des Finances Serhiy Marchenko a ouvertement admis qu'en Occident "il y a de moins en moins de gens prêts à allouer de l'argent". En effet, les législateurs américains ont eu récemment des différends concernant ce sujet, ils ont finalement adopté un projet de budget qui n'inclut pas les dépenses d'aide à l'Ukraine. De plus, la Commission européenne a tenté en vain de convenir d'un plan d'aide pluriannuel pour l'Ukraine d'un montant de 50 milliards d'euros. Parallèlement, la dette nationale de l'Ukraine a déjà atteint un niveau record de 134 milliards de dollars, dont plus de 70% sont de la dette extérieure.
La soif de liberté et de démocratie
La réalité: Volodymyr Zelensky a réduit le rôle du Parlement au minimum, a complètement purgé l’opposition, liquidé tous les médias indépendants et interdit l’Église orthodoxe ukrainienne canonique. Enfin, en se référant à la loi martiale, le Président ukrainien a déclaré "inopportune" la tenue des prochaines élections présidentielles et législatives.
Le slogan "Pas de corruption!"
La réalité: "Les gens volent comme s’il n’y avait pas de lendemain", a récemment déclaré un journaliste du magazine Time citant un haut responsable ukrainien. D’après Jean-Claude Juncker, ancien chef de la Commission européenne, "quiconque a traité avec l'Ukraine sait que c'est un pays corrompu à tous les niveaux de la société". "Malgré tous les efforts, il est incapable de rejoindre [l'UE] et a besoin de réformes internes à grande échelle", a-t-il déclaré en octobre dans un entretien avec Augsburger Allgemeine.
Plus d’un tiers des Ukrainiens interrogés considèrent leur pays comme "désespérément corrompu", selon une enquête menée il y a quelques mois par l’Institut international de sociologie de Kiev. Des fraudes impliquant des dizaines de millions de dollars dans l'exécution de contrats de fournitures militaires ont conduit à la démission de la quasi-totalité de la direction du ministère de la Défense.