Il y a 90 ans, le 30 janvier 1933, Adolf Hitler devenait chancelier du Reich, tout en dirigeant le Parti national-socialiste des travailleurs allemands, qui promouvait l’idéologie nazie. C’est l’événement qui marque le début de l’époque du nazisme allemand ayant conduit à la Seconde Guerre mondiale.
Interrogé par Sputnik, l’historien Stefan Bollinger revient sur les circonstances de l’ascension politique d’Adolf Hitler et de la formation de son système politique et idéologique, responsable de la mort de 55 à 60 millions de personnes partout dans le monde.
Montée du parti d’Hitler
Le Parti national-socialiste des travailleurs allemands (NSDAP), dont Hitler a été chef la majeure partie de son existence, a été fondé en 1920.
À l’époque, il y avait déjà des partisans et des sponsors des nazis, parmi lesquels le banquier von Schröder et le magnat industriel Thyssen, ainsi que Henry Ford, homme d’affaire américain. Ils se sont assurés qu'Hitler était capable de se ressaisir et de construire lentement un parti encore petit mais militant, explique l’historien.
"L'heure d'Hitler est venue avec la crise économique mondiale. La phase de stabilisation relative était passée, le pays plongé dans une crise économique et sociale, le système parlementaire ne résolvait plus les problèmes", a égrené M. Bollinger.
En 1929, cette situation économique alimentait les espoirs nationaux d’un homme fort qui pourrait faire revenir la paix dans le pays. La question se posait de savoir comment éviter une nouvelle révolution de chômeurs et d’affamés, comme celle de restaurer la puissance économique et militaire de l’Allemagne, poursuit-il.
En juillet 1931, une pétition signée par l’organisation économique Wirtschaftspolitische Vereinigung Frankfurt am Main a été envoyée au Président du Reich de l’époque, Paul von Hindenburg, demandant que soient transférés les pleins pouvoirs à Adolf Hitler. Mais c’est un autre événement qui a joué un rôle clé. Le 19 novembre 1931, les principaux représentants du monde des affaires ont été présentés au chef de l’État, avec la même idée.
Comment l’idéologie nazie s’est-elle imposée à l’époque?
Le spécialiste précise que les mouvements fascistes trouvent à se développer dans des sociétés plongées dans une crise. Ils aspirent à préserver l’ordre ancien et s’opposent aux mouvements communistes et socialistes.
Ils violent les droits démocratiques des civils ordinaires et sont prêts à exercer la violence pour atteindre leurs objectifs. Enfin, ils servent le pouvoir existant, les grandes propriétés agricoles et le capital.
Il ne faut pas oublier que les fascistes savent comment gagner la confiance des masses, pointe M. Bollinger. Ils utilisent la terreur, la manipulation, la démagogie et des offres sociales pour transformer les civils en leurs adeptes et complices.
C’est en profitant de la destruction des emplois pendant une crise économique et sociale et du déclin des classes moyennes, que les fascistes trouvent des partisans susceptibles d’être séduits par leurs promesses creuses et d’être intégrés dans leurs rangs.
En plus de cela, les nazis allemands cherchaient à exterminer les gens qu’ils considéraient comme des êtres inférieurs ("Untermenschen", des "sous-hommes"). Ces personnes étaient vues par les nazis comme des erreurs de la nature. Le racisme et la lutte contre les minorités ethniques constituaient également un composant mobilisateur important du mouvement nazi et, par la suite, de l’État nazi.
L’historien propose d’en tirer une leçon. Si la démocratie libérale ne se contente que d’une façade démocratique qui dissimule le capitalisme et si les forces bourgeoises prennent des positions aussi xénophobes et discriminatoires que les nouveaux éléments radicaux, l’État devient borgne. Il leur ouvre délibérément la porte d’accès à la police, au système judiciaire, à l’armée, à l’appareil étatique, à l’éducation et aux médias.