Présidentielle française 2022

Zemmour contre l’accueil des réfugiés ukrainiens, une prise de position risquée?

Alors que le conflit russo-ukrainien oblige des centaines de milliers de personnes à trouver refuge, notamment en Pologne, Éric Zemmour s’est opposé à leur accueil en France. Une position qui détonne parmi les candidats à la Présidentielle.
Sputnik
"Il n’est pas bon d’arracher les gens comme ça loin de leur pays, de déstabiliser la France qui est déjà submergée par l’immigration". Fidèle à sa ligne anti-immigration, Éric Zemmour, candidat à la présidentielle Reconquête!, s’est dit opposé à l’accueil des réfugiés ukrainiens en France, le 28 février sur RTL. Selon lui, il serait préférable que les personnes fuyant le conflit russo-ukrainien restent en Pologne, car "ils pourront plus facilement rentrer chez eux quand la guerre sera finie".

"Je pense que les Polonais ont décidé de tous les accueillir. Je pense qu’il nous faut aider les Polonais à les accueillir", a-t-il plaidé.

Un soutien qui passerait notamment par la levée des sanctions décidée par la Commission européenne contre Varsovie. Les autorités polonaises pourraient pourtant être très rapidement débordées. Depuis le début de l’opération militaire russe, ce sont plus de 500.000 personnes qui ont quitté l’Ukraine pour trouver refuge dans les pays voisins, d’après le Haut-commissaire de l’Onu aux réfugiés, Filippo Grandi. Dans le détail, au 28 février, plus de 280.000 Ukrainiens sont arrivés en Pologne, près de 85.000 en Hongrie, 36.000 en Moldavie, 32.000 en Roumanie ou encore 30.000 en Slovaquie.
Un exode massif qui devrait s’accentuer au fil des semaines si le conflit venait à perdurer. Selon l’Onu, l’Union européenne doit se préparer à crise humanitaire de "proportions historiques": "plus de sept millions" de personnes pourraient être déplacées.

La France "prendra sa part", sauf pour Zemmour

Ainsi Emmanuel Macron a-t-il annoncé, à l’issue du Conseil européen exceptionnel du 25 février, que "la France, comme tous les autres pays européens, prendra sa part" afin d’"assister la population ukrainienne", mais également à "accueillir" des réfugiés. Parmi les candidats déclarés à la Présidentielle, Marine Le Pen (RN) a estimé le 25 février sur RMC qu’il faut "bien sûr" accueillir les Ukrainiens qui souhaitent venir en France, en vertu de la convention de Genève sur le droit de la guerre. De l’autre côté de l’échiquier politique, Jean-Luc Mélenchon (LFI) a indiqué le même jour sur Franceinfo que "si nous sommes solidaires de l’Ukraine, c’est le moment de le manifester". Une position également partagée par Yannick Jadot (EELV), Anne Hidalgo, François Roussel (PCF) ou encore Nicolas Dupont-Aignan (DLF).
Arrivée d’Ukrainiens en Europe
Les Français semblent d’ailleurs majoritairement sur la même longueur d’onde. En témoigne le sondage mené par Harris Interactive pour RTL, qui indique que 79% d’entre eux sont favorables à l’accueil, dont 42% se disant "tout à fait favorable" à une telle politique.

Une immigration de qualité?

Si Éric Zemmour devance désormais Valérie Pécresse et talonne Marine Le Pen dans les études d'opinion (respectivement 15%, 11% et 18% selon Harris Interactive), il est aussi en tête des personnalités les plus rejetées (57%) selon le baromètre Odoxa, publié le 22 février. Cette sortie sur les réfugiés ukrainiens pourrait-elle donc lui être politiquement préjudiciable? L’ex-chroniqueur de CNews assume ses propos: "Il y a l’émotion de l’homme face à ce malheur ukrainien et il y a après la tête. L’homme d’État est celui qui voit le plus loin après l’émotion", a-t-il argué.
Pour l’entourage d’Éric Zemmour, il s’agirait d’une "position de principe", mentionne le Nouvel Obs. En effet, en se déclarant contre l’accueil des Ukrainiens, le candidat de Reconquête! ne pourra être accusé de "deux poids, deux mesures", souligne un membre de son équipe. En clair, d’être conciliant pour l’accueil d’Européens en grande majorité chrétiens, alors qu’il prône une tolérance zéro pour les réfugiés venant d’Afrique ou du Moyen-Orient.
Une distinction que l’éditorialiste Christophe Barbier n’a d’ailleurs pas hésité à faire. En effet, il a souligné que les Ukrainiens "sont des Européens de culture". "Et puis nous ne sommes pas face à des migrants qui vont passer dans une logique d’immigration", a-t-il affirmé. Le député Modem Jean-Louis Bourlanges a quant à lui estimé que la France bénéficiera d’une "immigration de grande qualité dont on pourra tirer profit".
Des considérations qui ont des répercussions sur les réfugiés d’origine africaine ou indienne vivant en Ukraine. Selon CNN, les étudiants étrangers qui tentent de quitter le pays disent être victimes de racisme de la part des forces de sécurité et des agents frontaliers dans les gares où se pressent les civils qui fuient les zones de combat. Le mot-dièse #AfricansInUkrain circule d’ailleurs sur les réseaux sociaux pour dénoncer certains comportements jugés xénophobes.
Un traitement confirmé par une jeune étudiante en première année de médecine. "Une Ukrainienne est arrivée, elle n’a rien eu à dire et ils l’ont laissée passe. Quand ils ont vu l’Ukrainienne arriver, ils nous ont même frappé pour qu’on la laisse passer", a-t-elle raconté au média Brut.

"Même si ce n’est pas notre pays, ça ne veut pas dire qu’on n’est pas humains", a tenu à rappeler l’étudiante.

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