"Vous savez, avec 1.000 ou 2.000 francs CFA [trois euros, ndlr], on peut faire beaucoup... il suffit parfois d'un sandwich ou d'un Coca-Cola et vous avez 2.000 manifestants dans la rue", a déclaré Jean-Christophe Belliard, ambassadeur de France en Côte d’Ivoire, en allusion aux manifestations qui ont bloqué durant plusieurs jours un convoi militaire français au Burkina Faso comme celles en soutien au gouvernement malien à Bamako.
Pour ce diplomate français qui a fait cette déclaration le 20 février lors d’une émission sur une chaîne de télévision privée ivoirienne dont il était l’invité, sur la thématique "Bamako-Paris, divorce consommé", "il y a très probablement une instrumentalisation" derrière ces sorties massives et le plus souvent hostiles à la politique française observées dans ces pays du Sahel. "La manipulation fait partie aujourd’hui des relations internationales", a-t-il soutenu.
Les affirmations de l’ambassadeur ont suscité le courroux de nombreux internautes qui les trouvent, pour la plupart, injurieux et condescendants.
Tout comme ces internautes, Jean-Blaise Ayéméné, président du Réseau des communicateurs panafricains (REZOPANACOM) interrogé par Sputnik, s’est offusqué de cette sortie de Jean-Christophe Belliard.
"Comprenez les propos peu sages et courtois de ce diplomate. S'exprimer ainsi sur un plateau de télé, quand on est à ce niveau de responsabilité, il faut comprendre que la France a touché le fond. Avec ces insultes et cette agressivité verbale, elle essaye de cacher son échec et son humiliation, elle pleure en fait et c'est tout à l'honneur des Maliens et au-delà, des panafricanistes. Cela dit, l'ambassadeur explique au passage comment son pays, la France, a toujours procédé directement ou indirectement pour obtenir les rares mobilisations qui la soutenaient dans les pays africains. C'est un gros aveu, et nous le notons", analyse-t-il.
Ce leader d’opinion, par ailleurs secrétaire national chargé de la coordination des activités des structures spécialisées et de la mobilisation des militants au sein du Parti des peuples africains Côte d'Ivoire (PPA-CI, la formation politique créée en octobre 2021 par l’ancien Président Laurent Gbagbo) –qui n’a officiellement pas réagi aux propos du diplomate français–, estime que "la France exprime ici [par la voix de son représentant, ndlr] sa grande frustration, car c'est le crépuscule de son règne et de celui des Occidentaux sur l'Afrique et c'est tant mieux pour nos pays". "La France et les pays de l'Union européenne qu'elle a mobilisés pour envahir le Mali ont pratiquement été boutés hors de ce pays sans rien pouvoir y faire, car avec la présence militaire de la Russie, les Maliens ont préparé leur action en amont", ajoute-t-il.
"La vigilance et la mobilisation doivent être de mise du côté des Maliens, des panafricanistes, mais aussi des Russes qui, aujourd'hui, sont un soutien important et efficace dans la lutte pour la libération et la souveraineté de nos États africains en général et du Mali en particulier. Car ces impérialistes français ne s'en iront pas totalement sans rien tenter d'ignoble comme ils l'ont déjà fait dans plusieurs pays", prévient Jean-Blaise Ayéméné.
Et selon lui, la situation du Mali évoque à certains égards celle de la Côte d’Ivoire il y a quelques années.
"En dehors de la façon dont ils sont venus au pouvoir, nous saluons et soutenons la résistance des dirigeants de la transition et surtout du peuple malien. Cette situation nous rappelle un peu la résistance que nous avons menée en Côte d'Ivoire avec le Président Laurent Gbagbo de 2000 à 2011. Ce qu'ont subi les Ivoiriens pendant ces moments difficiles a enseigné les dirigeants maliens qui avancent plutôt bien actuellement, surtout que ce sont pratiquement les mêmes bourreaux avec les mêmes pratiques qu'ils ont en face. Cela ne peut que nous rendre solidaires et admiratifs du peuple malien", se réjouit le militant panafricaniste.