Burkina: "un marabout multiplicateur de billets" arrêté, la Toile fait le procès de ses victimes

La police burkinabè a récemment mis fin aux activités d’un soi-disant marabout qui abusait de la confiance de ses clients en leur faisant miroiter sa prétendue capacité à multiplier les billets de banque. Mais de nombreux internautes estiment que les victimes de cet indélicat escroc sont plus à blâmer que lui.
Sputnik
Vous avez toujours rêvé d’un moyen simple et efficace pour multiplier vos billets de banque, votre or ou tout autre objet précieux? Alors Yassia Porgo est votre homme. Du moins, c’est ainsi qu’il se présentait, jusqu’à sa récente interpellation par la police burkinabè.
Depuis Boulbi, un village situé à la périphérie sud de la capitale Ouagadougou où étaient installés ses bureaux, ce jeune homme d’une vingtaine d’années répondant au doux pseudonyme de "Mor Wibga" (Wibga signifiant épervier en langue mooré), fondait sans pitié sur ses clients qui croyaient naïvement en ses capacité à multiplier l’argent et autres biens qu’ils lui remettaient.
La nouvelle de l’arrestation de ce prétendu marabout amuse dans l’ensemble les internautes, qui s’en donnent à cœur joie. "Recrutez-le au trésor public, il va y faire valoir sa compétence", ironise un internaute. "Ce monsieur mérite d’être chouchouté. Mettez-le de côté, en cas d’embargo économique [en allusions aux sanctions de la CEDEAO contre le Mali et dont la menace pèse également sur le Burkina, ndlr] contre le Burkina Faso, il sera notre banque centrale", renchérit un autre.
Mais certains, plus sérieusement, estiment que les victimes que la police appelle à venir témoigner sont autant sinon plus à blâmer que le prétendu marabout lui-même. "Je pense qu’il faut sanctionner aussi ceux qui ont le goût du gain facile. Cela pourrait également servir de leçon pour tous. On ne peut pas concevoir que certains s’imaginent avoir de l’argent aussi facilement", déclare un internaute. "Les victimes sont tout autant coupables. Elles doivent être jugées pour des faits de complicité de blanchiment de capitaux", ajoute un autre.
Joint par Sputnik, Nikiema, un jeune désœuvré de 21 ans, victime présumée de Mor Wibga, réagit aux commentaires de ces internautes:

"C'est facile de juger les autres derrière son smartphone, mais quand on n’a jamais été dans une situation désespérée, il y a certaines choses qu’on ne peut pas comprendre. Moi je n’ai pas de parents, je survis au jour le jour grâce à de petits jobs çà et là. Alors quand j’ai vu l’année dernière [2021] l’annonce de ce marabout sur Facebook, je n’ai pas hésité", confie-t-il.

Nikiema n’a pas eu à faire le déplacement jusqu’à Boulbi, mais a eu le privilège de pouvoir consulter en ligne. "Je lui ai envoyé 35.000 francs CFA [53 euros, par mobile money], il devait me renvoyer 350.000 (533 euros) la semaine suivante. Je n’ai jamais rien reçu depuis. J'ai vu que la police demande aux gens de venir témoigner, je ne compte pas y aller, ce qui est fait est fait, j’ai retenu la leçon", dit-il.

Un type d’escroquerie qui a le vent en poupe

Ces dernières années, les pays d’Afrique de l’Ouest connaissent une flambée d’escroqueries d’un genre qui pourrait prêter à sourire si les conséquences pour les victimes n’étaient pas réelles. En effet, des arnaqueurs qui n’hésitent pas à se faire passer pour des marabouts, féticheurs et autres mystiques proposent, en toute impunité sur les réseaux sociaux -Facebook en particulier-, de multiplier de façon exponentielle l’argent de leurs clients.
Les principes sont généralement les mêmes: soit de donner au prétendu marabout une somme d’argent et d’espérer recevoir jusqu’à 10 fois plus au bout d’une poignée de jours, soit de se procurer auprès de lui un "portefeuille magique" qui fournit chaque jour une quantité fixe de billets de banque sur une période donnée.
Cette publication est censée être le retour d’expérience d’un client satisfait de son portefeuille magique et qui partage avec les internautes le contact de son fournisseur dont il fait ainsi la publicité mensongère.
La cupidité aidant, cette escroquerie ne cesse de prospérer sur les réseaux sociaux. Et tout porte à croire qu’elle a encore de beaux jours devant elle, au regard de l’apparent laxisme des autorités.
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