Alors que la pandémie de Covid-19 faisait le tour du monde, les groupes de réflexion et les fonctionnaires de l’UE ont prononcé les premières déclarations publiques à propos d’un système d’identité numérique à l’échelle européenne.
En 2020, dans son discours sur l’état de l’Union Ursula von der Leyen, avait déclaré que "la Commission proposera bientôt une identité électronique européenne sécurisée. Une identité fiable, que tout citoyen pourra utiliser partout en Europe pour n’importe quel usage, comme payer ses impôts ou louer un vélo. Une technologie qui nous permettra de contrôler quelles données nous partageons et l’usage qui pourra en être fait".
À l’époque, quiconque aurait avancé qu’un jour, les pays membres mettraient en place des QR codes liés à un statut vaccinal imposé par le gouvernement et à un système de passeport européen conditionnant les déplacements au sein de l’UE, aurait aussitôt été traité de complotiste. Pourtant, il est dorénavant facile de voir à quel point le système de QR code établi en raison des obligations sanitaires pourrait facilement glisser vers un système pérenne, généralisé et peut-être néfaste, vers une forme de système de crédit social.
Emmanuel Goffi, cofondateur du Global AI Ethics Institute et ancien officier de l’armée de l’air, évoque les implications éthiques de ce glissement:
"Il y a un problème sur les conséquences potentielles et les utilisations négatives de tout ce digital. Il y a aussi des problématiques éthiques sur la citoyenneté et la responsabilité des individus. La grosse difficulté est qu’aujourd’hui, personne ne veut s’attaquer à des problèmes éthiques réellement."
Pour l’éthicien, il y a un problème de transparence sur les objectifs à court et long terme des différents acteurs:
"La difficulté que je vois, ce n’est pas tant au plan national. Là où ça pose un problème, c’est quand on étend ça à l’Europe parce que ce n’est pas un groupe d’États homogènes. Ce qui m’inquiète, c’est que ces données vont être partagées avec des pays qui ont des visions du monde auxquelles je n’adhère pas."
En France, on peut se connecter à son compte de Sécurité sociale pour récupérer son certificat de vaccination avec son numéro de compte fiscal, normalement utilisé pour gérer ses impôts.
Le gouvernement est par ailleurs en train de finaliser le déploiement d’un "service public d’identité numérique" permettant d’accéder à des sites publics ou privés et d’effectuer des démarches administratives en ligne.
Que se passerait-il s’il y avait un problème, une faille ou si quelqu’un vous volait votre identité? Peut-on imaginer que si, ou quand, l’UE décidera d’accélérer la mise en place de cette identité numérique, vous serez alors entièrement dépendant de sa bonne volonté… et de sa compétence?
Emmanuel Goffi déplore un "déficit de volonté des citoyens de s’informer":
"On a un problème de responsabilité globale collective et individuelle. Il y a des dangers par rapport au numérique mais il n’y a pas de débat sur ces dangers. Les gens ne s’informent pas. On entend quelques voix ici et là mais dans la majorité des cas, les gens utilisent les outils digitaux, livrent de l’information sans se poser de questions."