La démonstration populaire qui a marqué le retour lundi après-midi à Dakar des Lions du football après leur victoire en finale de la Coupe d’Afrique des nations face à l’Égypte à Yaoundé ne semble pas avoir d’équivalent dans l’histoire récente du Sénégal. Des centaines de milliers de personnes – âges, catégories professionnelles et sexes confondus – ont accompagné l’entraîneur Aliou Cissé, la star Sadio Mané, le capitaine Kalidou Koulibaly et les autres joueurs dans une formidable procession populaire qui aura duré plusieurs heures entre l’aéroport militaire Senghor et le centre-ville. La journée, décrétée chômée et payée par le Président de la République, avait commencé très tôt avec des masses humaines venues de tous les horizons et convergeant vers le lieu d’accueil.
L’impressionnante marée humaine partie de la zone de Yoff pour rejoindre les grilles du palais de la République est au summum de l’excitation. Presque dans un état second. Les chants assourdissants des supporteurs et les vrombissements des moteurs de véhicules mettent le feu de la liesse à chaque mètre du parcours. Le rallye incessant de plusieurs centaines ou milliers de motos amplifie la sonorisation des lieux. Et quand les vuvuzelas s’y mettent, c’est le chaos sonore!
Perchés sur leur car, les Lions communient avec leurs fans tout en immortalisant des instants si rares dans le sport sénégalais de haut niveau. Le bus, confronté à la densité humaine qui se déplace avec lui, est contraint de bouger moins vite qu’une vieille tortue en quête d’endroit tranquille pour libérer ses œufs.
Sur la voie de dégagement nord (VDN), une des autoroutes urbaines les plus fréquentées de la capitale sénégalaise, l’extrême visibilité des couleurs nationales – vert, jaune et rouge – dans les accoutrements des manifestants, l’exposition des casquettes, des écharpes et des drapelets/drapeaux tricolores renvoie aux images du Carnaval de Rio, sans la samba. Chantant à tue-tête, des jeunes torse-nu, courant ou marchant, des femmes dans le même registre, ou penchés de l’intérieur de véhicules surchargés, continuent la procession vers le centre de la capitale.
Sur les ponts qui surplombent la VDN, plusieurs centaines de personnes assistent aux événements, en groupes et en familles. Des deux bords de la chaussée, des gendarmes en mode festif essaient tant bien que mal de prévenir tout accident en éloignant le public d’une route où la vitesse des véhicules ne semble plus limitée.
Un bus de la société publique de transports (Dakar Dem Dikk) est pris au piège de la foule, mais la bonne humeur des gens lui permet de s’en tirer à bon compte après plusieurs minutes de stagnation. Quelques instants plus tard, c’est un véhicule de supporteurs qui tombe en panne sur le côté gauche de la chaussée irritant la meute qui s’impatientait derrière. Le dévouement de quelques gaillards surexcités permet de libérer le passage.
Quand la nuit commence à tomber sur Dakar, le car des Lions était encore sur la VDN. Après avoir arpenté l’avenue Cheikh Anta Diop, le cortège est passé par l’université du même nom où attendait une forte colonie d’étudiants et de supporteurs. La destination finale n’aura été atteinte qu’après plusieurs heures de procession. Presque la durée d’un vol entre Dakar et Yaoundé…
L'après-midi du mardi 8 février, les joueurs de l’équipe nationale, le staff, l’encadrement et les personnalités de la République sont conviées au palais de l’avenue Senghor pour une réception grandiose. Sadio Mané et ses camarades seront décorés et récompensés par Macky Sall en présence de leurs familles. En attendant, le chef de l’État leur a encore mis la pression en perspective de la double confrontation contre… l’Égypte au mois de mars prochain pour la Coupe du monde de novembre-décembre 2022 au Qatar.