Jean-Pierre Vidal a eu "beaucoup de problèmes" dès qu'il a appris que ce n'était pas sa mère biologique qui prenait soin de lui, à environ neuf ans. Il a vécu jusqu'à 62 ans persuadé qu'il était né sous X, la faute à une erreur dans son dossier. L’État a reconnu sa responsabilité, ce qui n'est pas encore le cas des autorités départementales.
Enfance
Le garçon est né le 4 septembre 1956 à Saint-Flour (Cantal). Àl'age de deux ans, sa mère l’a confié à une nourrice.
"J’y suis resté à peu près jusqu’à l’âge de huit-neuf ans. C’est à peu près à ce moment-là que j’ai découvert que ma nourrice n’était pas ma mère biologique", raconte-t-il à France 3.
En apprenant cette nouvelle, il a changé: Jean-Pierre se décrit à cette époque-là comme "agressif". Il a refusé d'aller à l'école. Lorsqu'il a été placé dans un pensionnat de Murat, le "choc a été terrible".
"Àpartir de là, j’ai eu beaucoup de problèmes. J’ai connu plusieurs familles d’accueil, notamment une famille qui était violente envers moi. Je suis tombée dans une famille d’agriculteurs où les enfants placés étaient pris pour en faire des ouvriers pas chers. J’ai aussi dû être hospitalisé à 14 ans dans un établissement spécialisé à Montpellier car je déprimais beaucoup."
Un espoir d'adoption a plané un peu dans l'air, mais ne s'est jamais réalisé. Une famille de médecin à Montpellier souhaitait le faire, mais n'en avait pas assez les moyens.
Recherche de ses racines
Aujourd'hui commerçant à Espinat, Jean-Pierre a commencé à rechercher ses origines à 14 ans.
"À chaque fois, on me disait que j’étais né sous X et qu’on ne pouvait me dévoiler mes origines. En 1985, j’écris au département en disant que je voulais connaître mes origines. Je me suis rendu à la DDASS direction départementale des Affaires sanitaires et sociales du Cantal. Une éducatrice m’a dit que ce n’était pas la peine de revenir, que le dossier était protégé et que je ne connaîtrai jamais mes origines", déplore-t-il sur France 3.
Pourtant, il n'a pas mis fin à sa quête. En essayant d'obtenir des informations une nouvelle fois, en 2019, il a appris qu'"il y a[vait] eu un gros problème dans le dossier". Il a été alors convoqué pour lui communiquer l’identité de sa mère. Mais elle était morte en 1996 d'une tumeur.
À qui la faute?
En fait, l’homme avait le droit d’ouvrir ces documents dès ses 18 ans. Il a ainsi pu apprendre qu'il avait une sœur, un frère, des cousins et une tante. Ce qui n'annule nullement le fait qu'il s'est senti "brisé" dans sa jeunesse.
Son désir à présent consiste à ce que "chacun reconnaisse ses responsabilités". Si "l’État a reconnu ses torts", le département du Cantal "rejette la faute" sur sa hiérarchie.
"Ma mère avait donné toutes les consignes pour que je puisse obtenir des informations sur elle", explique le commerçant. "Je veux que ce procès fasse un cas de jurisprudence. Je suis contacté par des personnes qui sont dans le même cas que moi. J’attends d’être indemnisé sur cette situation", insiste-t-il.
Son avocat exige une réparation de 400.000 euros, se fondant "sur la notion de préjudice extraordinaire, dans des affaires hors normes".
"C’est un immense gâchis. C’est une vie brisée. Il a réussi à faire sa vie sur un certain nombre de plans mais il y a toujours ce manque", indique Me Jacques Verdier à France 3.
Une audience est prévue le 7 février au tribunal judiciaire d’Aurillac. Le délibéré est attendu dans les deux mois prochains au maximum.