La nouvelle session de la Rada suprême de l’Ukraine, débutant ce mardi 1er février, a été marquée par l’initiative collective d’un groupe de députés qui se sont réunis autour de la tribune avec des drapeaux de plusieurs pays étrangers, dont ceux des États-Unis, du Canada et du Royaume-Uni.
Au cours de cette action, censée remercier certains États de leur soutien à l’Ukraine "confrontée à l’invasion et l’agression de Moscou", des élus ont décidé d’utiliser l’anglais dans leurs interventions non programmées.
"Nous sommes unis, nous sommes forts", a lancé en anglais une élue du parti Solidarité européenne de l’ancien Président ukrainien Petro Porochenko, ayant mis en avant que l’Ukraine était à l’avant-garde de la confrontation avec la Russie.
Une autre députée qui, comme le montre la vidéo, était en train de consulter une feuille de papier pendant le discours de sa collègue, a déclaré, également en anglais, que l’Ukraine qui, "depuis des siècles", avait lutté pour son indépendance, n’était pas l’Afghanistan.
Au cours de ces interventions le Président de la Rada, Rouslan Stefantchouk, a à plusieurs reprises rappelé aux députés de parler ukrainien.
"Chers collègues, je m’adresse à tous les orateurs. Pour nous montrer du respect à tous ainsi qu’à la langue ukrainienne, parlons ukrainien, et d’autres collègues vont traduire d’une façon ou d’une autre ", a-t-il déclaré.
L'incident survient dans le contexte d'une escalade de tensions autour de la crise ukrainienne.
Identité ukrainienne
Depuis l’éclatement de l’URSS et l’indépendance de l’Ukraine, les autorités officielles de ce pays historiquement multiculturel cherchent à imposer progressivement la dominance de la langue ukrainienne dans toutes les sphères de la vie publique.
Cette politique, qui prend la forme des lois adoptées par la Rada ukrainienne, est régulièrement critiquée par les minorités nationales du pays -dont les Hongrois, les Roumains, les Biélorusses, les Juifs, les Gagaouzes et les Russes.
La dernière loi sur l’enseignement secondaire général de 2020 a limité encore plus l’utilisation des langues des minorités nationales dans les écoles, ce qui a provoqué le mécontentement officiel de la Commission de Venise du Conseil de l’Europe, de la Hongrie et de la Russie.
Sous la pression européenne, les autorités ukrainiennes ont apporté des modifications à cette loi qui a octroyé un statut spécial aux "langues officielles de l’Union européenne" mais pas au russe, parlé -selon certaines estimations- par presque la moitié de la population du pays.
Dans le cadre d’une autre loi linguistique, Kiev est allé plus loin et a instauré un poste de commissaire de la langue ukrainienne qui veille à son utilisation exclusive dans toutes les sphères de la vie publique, au détriment des langues des minorités nationales.
En mars 2021, le secrétaire du Conseil de sécurité nationale et de défense de l’Ukraine et ancien maire de Lougansk Alexeï Danilov, a déclaré que pour se protéger de la Russie et consolider son indépendance, Kiev devrait faire de l’anglais la deuxième langue officielle du pays.