Zemmour condamné, victime d’une justice politique ou victoire de l’antiracisme?

Le tribunal correctionnel de Paris a jugé Éric Zemmour coupable de "complicité de provocation à la haine" pour ses propos sur les mineurs isolés. Stéphane Troussel, partie civile, espérait la privation des droits civiques du candidat.
Sputnik
"Ils n’ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c’est tout ce qu’ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu’ils viennent". Pour ces propos tenus sur les mineurs isolés étrangers dans l’émission "Face à l’info" sur CNews en 2020, le tribunal correctionnel de Paris a condamné Éric Zemmour à 10.000 euros d’amende. La justice a déclaré l’ex polémiste et désormais candidat à la présidence de la République coupable de "complicité de provocation à la haine" et de complicité "d’injure à l’égard des personnes immigrées". Le directeur de la publication de CNews a quant à lui écopé de 3.000 euros d’amende, ont annoncé les parties civiles.

Un verdict idéologique?

Une décision "importante", s’est félicité Me Arié Alimi, "parce que derrière ce projet médiatique, il y a un projet politique. C’est un projet de haine, qui tend à stigmatiser les personnes en raison de leur origine, de leur confession, en raison de leur race", a affirmé l’avocat.
Éric Zemmour, qui n’était pas présent au tribunal, a dénoncé un verdict abscons: "je suis condamné pour complicité d’incitation à la haine raciale, vous voyez déjà la complexité de la formule, qui ne veut rien dire".
Il a par ailleurs jugé qu’on lui faisait un "faux procès" reposant sur des propos qui tiennent de la "querelle sémantique". "Pour les Français qui sont agressés, qui sont volés, voire qui sont violés, qui sont parfois tués, par ces clandestins qu’on appelle mineurs isolés, la sémantique est quelque chose d’assez subalterne", a-t-il affirmé. En outre, à l’instar de son avocat, Me Olivier Pardo, qui a expliqué que la condamnation n’était pas "solidement argumentée juridiquement", Éric Zemmour a tenu à rappeler sa ligne de défense:

"Que je sache, ces immigrés clandestins que l’on appelle des mineurs isolés ne sont pas une race, donc je ne vois pas comment il peut y avoir d’incitation à la haine raciale."

Au tribunal, Me Olivier Pardo a abondé dans ce sens: "Il y a eu une sorte de transformation de la poursuite, nous étions poursuivi pour les migrants isolés et voilà que nous sommes condamnés sur les immigrés. Il s’agit d’un dévoiement."
Alors, pour le candidat à la Présidentielle (Reconquête), cette condamnation est idéologique: "je suis une fois de plus l’objet et la victime d’une justice politique", a taclé l’ancien chroniqueur de CNews. S’il a néanmoins reconnu avoir un agenda judiciaire chargé, il estime que c’est parce que l’"on veut par la justice me faire taire, parce que je suis le seul candidat à l’élection présidentielle à poser cette question majeure de l’immigration, de l’identité de la France et du grand remplacement", a avancé l’ex-polémiste.

Des propos qui fracturent la société française?

Du côté des parties civiles, le verdict sonne comme une mise en garde "à tous les hommes politiques qui, dans le sillage d’Éric Zemmour, ont envoyé ces dernières semaines des signaux à l’extrême droite", a lancé Samuel Thomas, président de la fédération nationale de la Maison des Potes, une association luttant contre les discriminations et le racisme.
"J’espère que cette décision va marquer un coup d’arrêt dans l’escalade et la banalisation des propos racistes qui n’ont pour but que de fracturer la société française à des fins électorales", a indiqué à la sortie de l’audience Stéphane Troussel, président du département de la Seine–Saint-Denis.
Cependant, Samuel Thomas voulait que la justice soit plus dure à l’égard d’Éric Zemmour. Selon lui, la "condamnation est très faible", "nous aurions espéré la privation des droits civiques", a-t-il poursuivi.

"Éric Zemmour va pouvoir continuer sa carrière politique. Les tribunaux devraient réfléchir à des sanctions beaucoup plus sévères contre ces individus, car ils ne sont pas près de s’arrêter. La privation des droits civiques serait la sanction la plus efficace pour stopper les velléités de propager la haine raciste", a affirmé le responsable associatif.

Selon Me Pardo, Éric Zemmour devrait faire appel "et ce d’autant que sur la réalité des faits, on a eu le 29 septembre 2021 un rapport du Sénat qui vient confirmer en tout point sur le fond ce que dit Éric Zemmour", a argué son conseil.
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