Le candidat à l'élection présidentielle Eric Zemmour a été condamné lundi à 10.000 euros d'amende pour provocation à la haine par le tribunal correctionnel de Paris pour ses propos sur les mineurs migrants isolés.
Absent pour le jugement comme lors du procès en novembre dernier, cet habitué des procédures judiciaires était jugé pour avoir qualifié les migrants mineurs isolés de "voleurs", "assassins", "violeurs" sur la chaîne CNews en 2020.
Le candidat va faire appel de la décision du tribunal correctionnel, a annoncé son avocat Olivier Pardo.
Déjà poursuivi à de nombreuses reprises pour injure raciale, provocation à la haine ou contestation de crime contre l'humanité, Eric Zemmour était cette fois cité à comparaître par le parquet pour ses propos sur les migrants mineurs isolés.
Les propos en question
Le 29 septembre 2020, lors d'un débat dans l'émission "Face à l'info" sur CNews après un attentat devant les ex-locaux de Charlie Hebdo, le polémiste affirmait: "Ils n'ont rien à faire ici, ils sont voleurs, ils sont assassins, ils sont violeurs, c'est tout ce qu'ils sont, il faut les renvoyer et il ne faut même pas qu'ils viennent".
"C'est une invasion permanente", "c'est un problème de politique d'immigration", avait-il ensuite vociféré dans cette émission dont il était chroniqueur.
Des "propos méprisants, outrageants" qui montrent "un rejet violent" et une "détestation" de la population immigrée et qui ont franchi "les limites de la liberté d'expression", avait estimé la représentante du ministère public.
"Il n'y a pas une once de racisme chez Eric Zemmour" qui ne fait que dire "la réalité", parfois de "manière brutale, avec ses mots", avait soutenu Me Olivier Pardo, évoquant "une position politique".
Pour le conseil, la citation pour provocation à la haine raciale ne se tenait pas: "Les mineurs isolés ne sont ni une race, ni une nation, ni une ethnie".
Le parquet de Paris avait par ailleurs requis 5.000 euros d'amende à l'encontre du directeur de publication de CNews, jugé au côté d'Eric Zemmour comme c'est l'usage dans les procès de presse.
Des associations outrées
Une trentaine d'associations se sont constituées parties civiles, dont SOS Racisme, la Ligue des droits de l'Homme (LDH) et la Licra, ainsi qu'une vingtaine de conseils départementaux - les mineurs non accompagnés étant pris en charge par l'aide sociale à l'enfance, gérée par les départements.
Dans leurs plaidoiries, les parties civiles avaient insisté sur la responsabilité de la chaîne d'information, dont le "discours de haine" est "le fond de commerce".
Les sorties controversées d'Eric Zemmour, 63 ans, contraint à la mi-septembre de quitter CNews en raison de ses ambitions présidentielles, lui ont valu depuis une dizaine d'années une quinzaine de poursuites en justice.
Plusieurs fois relaxé, il a été condamné à deux reprises pour provocation à la haine.
Le candidat d'extrême droite doit être jugé en appel jeudi pour contestation de crime contre l'humanité après avoir soutenu en octobre 2019 sur CNews que le maréchal Philippe Pétain avait "sauvé" les juifs français.
Il avait été relaxé en février 2021, le tribunal estimant que les propos avaient été prononcés "à brûle-pourpoint lors d'un débat sur la guerre en Syrie".
Son avocat va demander le renvoi de cette audience, à moins de trois mois du premier tour de l'élection présidentielle et "parce qu'il s'agit d'un délit d'opinion", estime Me Pardo auprès de l'AFP.
La justice a par ailleurs fixé vendredi une nouvelle échéance pour Eric Zemmour: il sera jugé en mai 2023 pour diffamation aggravée, pour des propos tenus en 2019 sur le "mouvement féministe" et le "mouvement LGBT".