La Commission européenne, qui enquête depuis 2017 sur les programmes de délivrance de "passeports dorés" par le Vanuatu donnant lieu à de sérieux doutes, notamment en raison de failles de sécurité, a jugé justifiée une suspension partielle et proportionnée de l’accord d’exemption de visa avec l’archipel.
Ces programmes permettent aux citoyens de pays tiers d'obtenir la citoyenneté du Vanuatu, donc un accès sans visa à l'UE, en échange d'un investissement minimal de 130.000 dollars (114.000 euros).
Le 12 janvier, la proposition de décision du Conseil sur la suspension a été publiée sur son site. Elle fait suite à des échanges approfondis avec les autorités du Vanuatu, y compris des avertissements préalables sur la possibilité d'une suspension.
Des lacunes dans le contrôle de sécurité
Sur la base des informations reçues de la part du Vanuatu, la Commission a conclu que ses programmes destinés aux investisseurs présentaient de graves défaillances.
Les préoccupations tiennent notamment à l'octroi de la citoyenneté à des candidats répertoriés dans les bases de données d'Interpol, ce qui soulève des inquiétudes quant à la fiabilité du contrôle de sécurité.
En outre, le délai moyen de traitement des demandes est trop court pour permettre une sélection approfondie et aucun échange d'informations n’a lieu avec le pays d'origine ou l'ancienne résidence principale des demandeurs avant l'octroi de la citoyenneté.
Pis encore, le taux de refus est très faible: jusqu'en 2020, une seule candidature a été rejetée.
Une mesure ciblant les passeports délivrés à compter de mai 2015
La suspension s'appliquerait à tous les titulaires de passeports ordinaires délivrés à compter du 25 mai 2015, date à laquelle le Vanuatu a commencé à délivrer un nombre substantiel de passeports en échange d'un investissement. Ces titulaires ne seraient donc plus autorisés à se rendre dans l'UE sans visa (mais conserveraient la possibilité de demander un visa pour visiter l'UE).
La suspension devrait être levée si le Vanuatu introduisait des mesures suffisantes pour éliminer ou atténuer substantiellement les risques de sécurité pour l’UE et ses États membres.
Des passeports délivrés à des personnes faisant l’objet de procédures judiciaires
Cet été, le Guardian s’est procuré une liste de 2.000 personnes ayant obtenu un "passeport doré" du Vanuatu depuis 2020.
Parmi elles se trouvent quelques hauts responsables politiques, comme l’ancien Premier ministre libyen Fayez al-Sarraj, ou Alaa Ibrahim, gouverneur dans la banlieue de Damas et proche du clan Assad. Mais aussi des personnalités moins recommandables, comme le célèbre escroc Gianluigi Torzi, accusé d’avoir soutiré 15 millions d’euros au Vatican.
Selon le quotidien britannique, la plupart font l’objet d’allégations, d’enquêtes et de procédures judiciaires en cours. Quelques-uns ont fait l’objet de poursuites seulement après avoir obtenu la citoyenneté du Vanuatu.