Un professeur de Sciences Po Grenoble accusé d'islamophobie suspendu pour diffamation

Un professeur de Sciences Po Grenoble, accusé d'"islamophobie" en début d'année, a été suspendu de ses fonctions par la direction qui lui reproche d'avoir tenu, depuis, des "propos diffamatoires", a-t-on appris lundi de sources concordantes.
Sputnik
Cette sanction a conduit le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, à suspendre les financements accordés à l'établissement par la collectivité.
L'arrêté de la directrice de l'IEP Sabine Saurugger, révélé par Le Figaro, vise des interviews accordées début décembre par l'enseignant, Klaus Kinzler, au site de l'hebdomadaire Marianne, au quotidien L'Opinion et à la chaîne CNews.
Le professeur d'allemand a, selon la directrice, "gravement méconnu à plusieurs obligations", notamment en matière de "discrétion professionnelle". "Il y a lieu à saisir le conseil de discipline", ajoute-t-elle dans l'arrêté qui le suspend pour quatre mois.
Dans ses interviews, l'enseignant a décrit l'IEP comme un institut de "rééducation politique" en accusant un "noyau dur" de collègues, adeptes selon lui des théories "woke", d'endoctriner les étudiants, et la direction de l'IEP de laisser faire.
Pour ses avocats, qui dénoncent une "chasse aux sorcières", M. Kinzler "a été contraint de prendre la parole afin de se défendre" après avoir été mis en cause "sur la place publique".
"Ça empoisonne ma vie mais il faut peut-être aller jusqu'au bout pour savoir qui a le droit de dire quoi et dans quelle situation", a déclaré l'enseignant à l'AFP, évoquant un possible recours devant le tribunal administratif.
Contactée, la direction de l'IEP de Grenoble n'a pas souhaité réagir à "une mesure interne". Le 13 décembre, dans une interview à Marianne, Mme Saurugger avait pris la défense de l'établissement.
"M. Kinzler reproche un certain nombre de faits qui ne sont pas exacts. Il dit notamment que la direction ne l'a jamais protégé. Sciences-Po Grenoble est un établissement où la liberté d'expression et la liberté d'enseignement se trouvent au coeur du projet académique", avait-elle dit.

Origines de l'affaire

À l'origine de l'affaire, fin 2020, M. Kinzler et une collègue historienne avaient échangé des courriels véhéments à propos d'une journée de débats intitulée "racisme, antisémitisme et islamophobie", terme dont il contestait le caractère scientifique, tout en critiquant l'islam.
Le 4 mars, M. Kinzler et un autre enseignant avaient été la cible d'affichettes les accusant d'"islamophobie", placardées par des étudiants et relayées sur les réseaux sociaux par des syndicats.
La directrice de l'IEP avait condamné "très clairement" ces affiches, tout en estimant que la façon dont M. Kinzler parlait de l'islam était "extrêmement problématique".
Le 26 novembre, 16 des 17 étudiants de l'IEP poursuivis devant une instance disciplinaire ont été relaxés, tandis que la ministre de l'Enseignement supérieur avait préconisé des sanctions à leur encontre. Un seul a fait l'objet d'une exclusion temporaire avec sursis.
Dans un communiqué, M. Wauquiez a justifié sa décision de suspendre les financements régionaux - environ 100.000 euros par an hors investissement sur projets, selon l'exécutif - par une "longue dérive idéologique et communautariste", qui vient selon lui de "franchir un nouveau cap" avec la suspension de l'enseignant.
Selon lui, "une minorité a confisqué le débat" au sein de l'établissement, "sans que la direction ne prenne la mesure de cette dérive préoccupante".
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