La police met la pression sur des journalistes qui ont écrit sur un fonctionnaire dealer

"Vincent est flic… et dealer". Depuis des semaines, la police et le parquet de Paris tentent d’identifier la source d'un article de StreetPress qui a révélé le récit d’un policier qui vend des stupéfiants. Malgré la pression que la rédaction subit, StreetPress condamne "une atteinte directe à l’indépendance et à la liberté de la presse en France".
Sputnik
Le 5 octobre, StreetPress a publié un article sur la "deuxième vie" d’un jeune policier qui vendait de la drogue, "de la coke, de l’héro et de la beuh". Toutefois, le texte s’est avéré être un cauchemar pour la rédaction quand la police et le parquet de Paris s’y sont intéressés. Dans un texte datant du 6 décembre, la rédaction raconte ces embrouilles.
Mi-octobre, l’auteure de l’article a été contactée par la police qui lui demande l’identité de sa source. Peu après, elle a reçu une convocation pour être entendue par la brigade des stupéfiants. Son rédacteur en chef a alors pris attache avec le parquet de Paris pour lui signifier la politique du média: "en vertu des différents textes qui garantissent la liberté et l’indépendance de la presse, notre journaliste ne fournira pas l’identité de sa source".
Une fois rendue dans les locaux de la brigade des stupéfiants (DRPJ), la journaliste s’est vue refuser l’accompagnement de l’avocate de StreetPress pendant son audition… ce qui la pousse à ne pas y assister.
Le 30 novembre, c’est le directeur de publication de StreetPress qui a reçu une "réquisition judiciaire" issue par l’IGPN exigeant la communication de "toutes les informations […] permettant d’identifier le policier".
En cas de refus, la rédaction risque une amende de 3.750 euros et d’éventuelles nouvelles poursuites.

"Atteinte directe à la liberté de la presse"

Pour StreetPress, cette atteinte au secret des sources "est une atteinte directe à l’indépendance et à la liberté de la presse en France."
"Ce harcèlement est inadmissible. La protection des sources, définie tant comme l’informateur du journaliste que comme l’information qu’il ou elle reçoit, est garantie par l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 et consacrée par les juges européens qui la considèrent comme +l’une des pierres angulaires de la liberté de la presse+", écrit la rédaction, appelant au soutien, dont financier, de ces procédures judiciaires.

Ce que dit la loi

C’est la loi du 29 juillet 1881 qui assure la protection du secret des sources.
"Tout journaliste, au sens du 1° du I de l'article 2, a le droit de refuser toute pression, de refuser de divulguer ses sources et de refuser de signer un article, une émission, une partie d'émission ou une contribution dont la forme ou le contenu auraient été modifiés à son insu ou contre sa volonté. Il ne peut être contraint à accepter un acte contraire à sa conviction professionnelle formée dans le respect de la charte déontologique de son entreprise ou de sa société éditrice", dit-elle. "Est considéré comme une atteinte indirecte au secret des sources au sens du troisième alinéa le fait de chercher à découvrir les sources d'un journaliste au moyen d'investigations portant sur toute personne qui, en raison de ses relations habituelles avec un journaliste, peut détenir des renseignements permettant d'identifier ces sources".
Néanmoins, toute personne se prétendant journaliste ne peut bénéficier du secret des sources. Dans son alinéa 2, l’article 2 de la loi de 1881 restreint le champ d’application et la portée du principe général de protection.
Est ainsi concernée "toute personne qui, exerçant sa profession dans une ou plusieurs entreprises de presse, de communication au public en ligne, de communication audiovisuelle ou une ou plusieurs agences de presse, y pratique, à titre régulier et rétribué, le recueil d'informations et leur diffusion au public", souligne la loi.
L’article 2 bis de la loi de 1881 confirme que "tout journaliste" a le droit de "refuser de divulguer ses sources".
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