Covid-19 à l’école: le gouvernement cherche-t-il "l’infection massive des enfants"?

Alors que le taux d’incidence explose chez les 6-10 ans, que le variant Omicron a fait son apparition, le gouvernement a décidé d’alléger le protocole dans les écoles primaires. Une décision inacceptable pour un collectif de parents d’élèves.
Sputnik

"À force, on n’est plus étonnés."

Au micro de Sputnik, le collectif École et familles oubliées fait part de sa résignation face au choix gouvernemental de ne plus fermer les classes de primaires et maternelles en cas Covid-19 détecté. Dorénavant, "lorsqu’un élève est testé positif, tous les élèves de la classe sont testés à leur tour et seuls les camarades testés positifs restent à la maison", a indiqué Jean-Michel Blanquer. Fidèle à son leitmotiv, le ministre de l’Éducation a rappelé que "notre boussole reste la priorité d’une école ouverte".
Une décision qui satisfait d’ailleurs certaines organisations, à l’image de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE). "Cela nous semble bizarre et surprenant de renvoyer à la maison des enfants qui ne sont pas malades, que ce soit pour le Covid ou une autre maladie. C’est aujourd’hui mieux pour les enfants. On s’est tous dit que le mieux pour les enfants, c’est de les avoir à l’école", a fait valoir sur BFMTVson représentant, Rodrigo Arenas.

Des indicateurs dans le rouge chez les tout-petits

En effet, le nombre de fermetures a explosé, entraînant de fait un casse-tête quant à la garde des enfants: le 25 novembre dernier, plus de 8.800 classes étaient closes, contre 4.100 une semaine auparavant. Une proportion somme toute logique au vu du taux d’incidence chez les plus jeunes.
Au 26 novembre, pour la tranche d’âge des 6-10 ans, il était de 618 pour 100.000 habitants, contre 292 pour 100.000 en population générale. En outre, il convient aussi de rappeler que le nombre de dépistages a également fortement augmenté: près d’un enfant sur dix a été testé sur cette période, ce qui contribue à gonfler ces résultats.

"Le taux d’incidence est en hausse et on allège le protocole, c’est donc inacceptable", juge néanmoins École et familles oubliées.

D’autant plus que le protocole expérimental, mené dans dix départements et visant à limiter le nombre de fermetures de classes, n’a pas forcément eu les résultats escomptés.

Un protocole qui n’a pas fait ses preuves

Dans les Landes par exemple, malgré cette expérimentation, 81 classes ont fermé. Un record, selon France bleu. Florence Comte, secrétaire et porte-parole du Syndicat des directrices et directeurs d’école (S2DÉ) et directrice d’école élémentaire à Puget-Ville, dans le Var, a indiqué sur France Info que le "bilan est négatif" dans son département. Notamment, car les cas positifs continuent d’exister et les classes… de fermer.

"C’est normal, puisque le dépistage “réactif”, qui est proposé maintenant, ne pouvait fonctionner ni pour prévenir les contaminations ni visiblement pour arrêter les fermetures", estime École et familles oubliées.

Dans les faits, ce nouveau protocole permet à un élève testé négatif le jour même ou le lendemain de revenir à l’école. Or, comme le temps d’incubation peut atteindre plusieurs jours, il pourra suivre ses cours en étant potentiellement porteur du virus. Pour éviter cet écueil, le conseil scientifique et le Conseil d’orientation de la stratégie vaccinale (COSV) a préconisé dans un avis datant du 13 septembre de procéder au dépistage systématique et de manière hebdomadaire de tous les enfants.
Le groupement de parents vient donc à se demander si "la stratégie de Jean-Michel Blanquer n’est pas l’infection massive des enfants pour obtenir une prétendue immunité naturelle".

"Si on tient compte de ce principe-là, évidemment les décisions sont cohérentes dans leur indécence", fustige le collectif.

École et familles oubliées pointe que si tel était le cas, cette stratégie serait condamnée par l’OMS, car contraire à l’éthique et dangereuse pour les enfants, notamment à cause de l’éventualité de Covid longs. Selon l’Office national de statistiques britannique, entre douze et seize semaines après l’infection, 3,2 % des enfants de 2 à 11 ans et 3 % des 12-16 ans ont toujours un des symptômes persistants, comme des maux de tête ou encore la perte du goût ou de l’odorat.

Vers une vaccination des 5-11 ans?

Par ailleurs, la circulation du virus pourrait favoriser l’émergence de nouveaux variants. Faudrait-il alors aller jusqu’à la vaccination des 5-11 ans? Rien n’est moins sûr. Ainsi, la Haute autorité de santé ne recommande d’ouvrir la vaccination qu’aux jeunes susceptibles de faire des formes graves de la maladie et ceux "vivant dans l’entourage de personnes immunodéprimées ou vulnérables non protégées par la vaccination et n’ayant pas pu être vaccinées".
Pour les autres, la HAS "se prononcera ultérieurement sur la pertinence d’élargir cette vaccination après avoir auditionné les parties prenantes".
Covid-19
La campagne vaccinale des enfants de 5 à 11 ans avancée d'une semaine dans l'UE
Il faut dire que les enfants touchés par la maladie ont en effet moins de risque de faire des formes graves. Un constat qui se traduit dans les chiffres: ils représentent moins de 1 % des patients hospitalisés et un nombre extrêmement faible de décès.

"La vaccination est un sujet sensible d’un point de vue politique et difficile, car on sait qu’il y a quand même une adhésion difficile sur la vaccination des enfants. Surtout si on ne communique pas de manière transparente sur les données, les motivations et la balance bénéfices-risques", avance le collectif de parents d’élèves.

Selon un sondage BVA pour RTLet Orange, publié en août, 63 % des parents étaient opposés à la vaccination de leurs enfants âgés de moins de 12 ans. "La contamination est donc une alternative facile pour ne pas traiter le problème épineux de la vaccination", ironise École et familles oubliées.

"On a donc interpellé dans une lettre ouverte les parlementaires pour leur rappeler les chiffres qui continuent à augmenter: depuis juin, on recense 8 des 12 enfants de moins de 10 ans décédés, 2 au cours des 7 derniers jours", détaille le collectif.

Reste que le collectif concède que "la vaccination en soi peut ne pas être suffisante", il faut agir sur "la partie sécurisation des écoles", notamment avec les "purificateurs d’air et les capteurs de CO2".

"La France est l’un des rares pays qui n’a pas investi dans la sécurisation des écoles, après un an et demi, ce n’est plus justifiable."

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