"Par trois élections, les Corses ont demandé à être autonomes. Et en deux jours de barrages, à l’autre bout du monde, on cède sur quelque chose qui est demandé massivement par les Corses depuis une dizaine d’années. C’est absolument insoutenable. Une façon de gouverner qui n’est pas digne d’un grand gouvernement."
Au micro de Sputnik, Jean-Martin Mondoloni, conseiller du groupe de droite "Un soffiu novu" (Un nouveau souffle pour la Corse) à l’Assemblée de Corse, fustige l’attitude du gouvernement face aux revendications politiques de certains territoires. Dans son collimateur, l’initiative du ministre des Outre-mer, qui se dit "prêt" à parler de l’autonomie de la Guadeloupe. "Qu’en est-il de la Corse?", se demande également le député autonomiste Paul-André Colombani, député autonomiste de Corse-du-Sud.
Lors des élections régionales de juin dernier, Ajaccio s’est distingué des autres collectivités régionales françaises: 60% d’insulaires se sont exprimées en faveur des listes nationalistes ou indépendantistes. Fà Populu Inseme (Rassembler le peuple), la liste majoritaire du nationaliste Gilles Simeoni, actuel président du Conseil exécutif corse, balaie désormais largement tout le spectre politique, de la droite à la gauche.
Autonomie: "mettre des réalités derrière ce concept"
"Une plus grande autonomie de gestion" pour la Corse, c’est ce que réclamait déjà en 1999 José Rossi, président de l’Assemblée territoriale à l’époque, après incendie nocturne d’une paillote-restaurant illégale sur une plage, ordonnée en dehors de tout cadre légal par le préfet de Corse. Cette "affaire des paillotes" avait provoqué une montée de tensions avec Paris.
Depuis, le débat sur le statut de l’île de Beauté ne s’est jamais éteint, ravivé à chaque campagne électorale. L’élu fait remarquer que la question du statut territorial se pose toujours sur fond de violences, comme aujourd’hui en Guadeloupe. Le département d’outre-mer s’est littéralement embrasé suite aux protestations contre le durcissement des mesures sanitaires. Cela avait été également le cas de la Corse: "le processus de Matignon, initié dans les années 2000, l’avait été en Corse à la suite des attentats qui avaient détruit des bâtiments publics."
"Ça donne le sentiment que les discussions entre les régions périphériques et le pouvoir central sont amorcées sur une base de situation de violence. Ça pose problème", regrette Jean-Martin Mondoloni.
Il appelle à parler de l’autonomie "d’une façon sérieuse" et fait référence à sa proposition formulée auprès de la présidente de l’Assemblée de Corse: "à un moment donné, mettre des réalités derrière tous ces concepts" d’autonomie de la Corse, qui lui paraissent flous. À ce propos, l’homme politique appelle à un dialogue constructif et apaisé avec Paris.
"Je ne suis pas un fervent partisan d’une autonomie poussée sans qu’on en ait parlé auparavant, même si je suis régionaliste convaincu. Mais sur la forme, j’ai l’impression que ce sont moins les urnes qui décident de l’amorce d’une réflexion que la violence."
M. Mondoloni rappelle que "l’autonomie recoupe beaucoup de graduations: fiscale, institutionnelle, constitutionnelle, etc." et que chercher l’autonomie, "c’est de travailler ensemble".
En Guadeloupe, l’autonomie, "un contre-feu"
L’élu corse considère que pour la Guadeloupe, la question de l’autonomie "ne fait pas partie des sujets de fond abordés paritairement par les syndicalistes" du département d’outre-mer.
"On part de l’insurrection sur le pass sanitaire, on aboutit à l’autonomie. Cela veut dire qu’on joue de l’autonomie pour détourner l’attention de l’opinion. C’est ce que l’on appelle un contre-feu", analyse Jean-Martin Mondoloni.
La Corse est dans un autre cas de figure, selon l’élu. Ce dernier est de ceux qui pensent que sur l’île de Beauté, "on est déjà autonomes", parce que l’"on a des pouvoirs de décentralisation en matière de transports, en matière de déchets, de formation professionnelle".
"Dire “oui” à l’autonomie de la Guadeloupe, cela ne veut absolument rien dire. On va les balader pendant quelques mois. On surréagit au phénomène des violences. Cela donne l’impression d’une forme d’amateurisme", conclut le député corse.