Le management reste "prisonnier du mythe de la gestion scientifique des conduites humaines"

Dans ce 24e cours d’"Anti-néolibéralisme", Omar Aktouf expose la théorie de la motivation selon Frederick Herzberg. Il évoque notamment les deux catégories de besoins chez l’employé, intrinsèques et extrinsèques, classifiés par Herzberg et qui selon lui déterminent la motivation de chaque personne. Néanmoins les problèmes persistent.
Sputnik
Depuis la Révolution industrielle du XIXe siècle, l’entreprise a longtemps été envisagée d’un point de vue mécanique, et le mérite revient à Elton Mayo d’avoir mis au jour sa dimension humaine. C’était l’avènement du courant des relations humaines dans la théorie du management. Abraham Maslow et Frederick Herzberg sont considérés comme les principaux continuateurs d’Elton Mayo, demeurant une référence pour les consultants ou les praticiens.
Ces deux penseurs se sont essentiellement intéressés à la théorie de la motivation, à travers des classements par besoins ou par facteurs. La motivation désigne les forces qui agissent sur une personne ou à l'intérieur d'elle pour la pousser à se conduire d'une manière spécifique, orientée vers un objectif.

Dans ce 24e cours d’"Anti-néolibéralisme", Omar Aktouf, professeur titulaire à HEC Montréal et membre du conseil scientifique d’ATTAC Québec, estime auprès de Sputnik que pour les patrons, "la fonction de manager vise essentiellement à stimuler les motivations individuelles en faveur des objectifs de l'entreprise. Néanmoins, les motifs sont difficilement observables. Ils sont nombreux et plus ou moins imbriqués chez une même personne".

Les facteurs intrinsèques et extrinsèques

"Alors que la manière dont les salariés choisissent d'obéir à leurs responsables varie considérablement d’une personne à une autre, en fonction des besoins de chacune, Frederick Herzberg a défini deux catégories de besoins", expose le Pr Aktouf, précisant que "les premiers sont intrinsèques, alors que les seconds sont extrinsèques".
Et d’expliquer que pour les facteurs intrinsèques, "également appelés facteurs d’auto-motivation, concernent directement l'intérêt au travail, les responsabilités reçues, les rémunérations d'ordre incitatif, les possibilités de reconnaissance et d'accomplissement à travers l'activité professionnelle. Pour Herzberg, le développement de ces facteurs est absolument nécessaire et doit se faire par un enrichissement des méthodes de travail incluant la préparation, le contrôle, la discussion des objectifs et la complexification des tâches".
Dans le même sens, il ajoute que les facteurs extrinsèques, "appelés quant à eux hygiène de vie, ont comme objet d’étude et d’observation la qualité de l'environnement et les besoins nécessaires pour que l’employé soit dans un parfait état psychologique lui permettant de s’acquitter de ses tâches avec brio. Il s’agit notamment d'hygiène et de sécurité, de conditions de travail, de rémunération de base, de rapports hiérarchiques ou de relations professionnelles".

"Pas à la mesure de ses prétentions"

Aussi surprenant que cela puisse paraître, informe M.Aktouf, "Frederick Herzberg, l’un des auteurs qui ont le plus contribué au champ des sciences du comportement organisationnel, estimait vers la fin de sa carrière, dans les années 1980, que ce domaine d’études n’était pas à la mesure de ses prétentions. Il restait, selon lui, prisonnier du mythe de la gestion scientifique des conduites humaines, se répétait et manquait à sa mission de donner une formation humaniste au gestionnaire".
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