Embourbée dans une violente crise interne depuis 2013, la République centrafricaine (RCA) bénéficie depuis sept ans de l’une des plus grosses missions de maintien de la paix: la mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (MINUSCA). Pour quelle efficacité?
Un bilan mitigé établi au lendemain du renouvellement de la mission onusienne en RCA. Vendredi 12 novembre, le Conseil de sécurité des Nations unies a prorogé, jusqu’au 15 novembre 2022, le mandat de la MINUSCA. Ce dernier, apprend-on de l’institution, porte sur la protection des civils, l’appui au processus de paix, l'appui de la mise en œuvre du cessez-le-feu et l’accord de paix ainsi que l’acheminement en toute sécurité de l’aide humanitaire. Le nouveau mandat confié à la MINUSCA porte également sur la promotion et la protection des droits de l’homme, la justice et l’état de droit, l’appui au dialogue républicain et aux élections locales de 2022, l’appui à l’extension de l’autorité de l’État, la réforme du secteur de la sécurité (RSS) ainsi que le désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement (DDRR), entre autres missions.
Tous les pays du Conseil de sécurité ont voté favorablement à la résolution 2605 renouvelant le mandat de la MINUSCA, à l’exception de la Russie et la Chine qui se sont abstenues. La Russie a expliqué sa position en raison des "scandales" concernant la MINUSCA. En effet, depuis 2013, la Centrafrique a connu deux guerres civiles et demeure le théâtre d’affrontements entre factions armées qui commettent d’innombrables violences et exactions. Une situation qui perdure malgré les différents accords de paix. En 2014, la MINUSCA a été déployée par l'Onu pour tenter de mettre fin au conflit. Et les quelque 15.000 hommes qui constituent le contingent ont pour mission prioritaire la protection des civils.
Seulement, sur le terrain des opérations,
cette mission onusienne est régulièrement accusée d'exactions de toutes sortes au rang desquelles des cas de violences sexuelles et des trafics illicites de matières premières. Le contingent de la MINUSCA est aussi accusé par les populations de passivité et de complicité avec les forces rebelles. Des accusations qui suscitent la méfiance des populations qui ont très souvent organisé des manifestations pour réclamer son départ du pays. Une antipathie des populations locales,
"compréhensibles", souligne le docteur Sosthène Efouba,
"à la lumière des multiples scandales (sexuels, des différents abus au droit de l'homme...) enregistrés sur le terrain des opérations".Si Mankeur Ndiaye, le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en RCA et chef de la MINUSCA, s’est félicité du renouvellement de ce mandat et promet des efforts pour sa "
bonne exécution en étroite coopération avec le gouvernement", les rapports entre les deux parties sont tout aussi tendus. Dans une sortie peu tendre, au cours d’une conférence de presse début novembre,
Simplice Mathieu Sarandji, président de l’Assemblée nationale centrafricaine, a accusé certains contingents de la MINUSCA d'avoir armé les rebelles.
Une position qui rejoint celle du gouvernement centrafricain qui souhaite que la MINUSCA assume davantage de responsabilités en matière de sécurité. Dans une récente
interview à RFI, la ministre centrafricaine des Affaires étrangères, Sylvie Baipo, avait souligné qu’
"en cas de renouvellement du mandat de la MINUSCA, il faut mettre l'accent sur l'efficacité", car la RCA demeure dans
"une situation difficile et assez préoccupante". Et pour palier au manquement de la MINUSCA, constate Sosthène Efouba, "
le gouvernement de la RCA a trouvé d'abord un nouvel allié stratégique [la Russie, ndlr] qui lui a permis de construire un nouveau contexte sécuritaire. L'implication des populations locales à ce projet permet aujourd'hui à la RCA d'envisager l'avenir avec espoir. Certes, la mission de l’Onu est là, mais la Russie aussi".En effet, si le Président Faustin-Archange Touadéra a réussi grâce au soutien des instructeurs militaires russes et des soldats rwandais à repousser les assauts des rebelles loin de Bangui, de nombreuses attaques furtives sont encore enregistrées dans l’arrière-pays, malgré la présence des Casques bleus de la MINUSCA.