En mars dernier, huit femmes s’exprimaient dans Le Monde sur le comportement de prédateur sexuel de l’ex-présentateur vedette de TF1, Patrick Poivre d’Arvor. Lui s’était plaint dans l’émission Quotidien de "l’anonymat" des plaignantes. Huit témoignent à nouveau dans Libération, dont sept à visage découvert. Leurs récits auprès de la police n’avaient pas engendré de condamnation en raison de la prescription des faits.
Plusieurs d’entre elles décrivent comment le journaliste les a violées, ou a tenté de le faire. D’autres se plaignent de son harcèlement via des appels et messages. Toutes dénoncent le silence sur son comportement, pourtant bien connu, contribuant à son impunité.
"De temps en temps, un prénom féminin résonne via un système de haut-parleur. L’élue est appelée dans le bureau de PPDA. Et toute la rédaction de bruisser sur ce qu’il va lui arriver. Tout le monde est au courant et personne n’a conscience de rien. On sait et on ne sait pas", raconte Cécile Delarue, laquelle avait travaillé pour PPDA en 2002.
Association
Ces huit femmes ont par ailleurs annoncé sur France Inter la création de leur association #MeTooMédias pour "les femmes et les hommes qui souffrent silencieusement dans ce milieu médiatique". L’objectif est d’"offrir une ombrelle à toutes celles qui ne veulent pas sortir de l’anonymat, mais qui ont besoin de cette sororité".
Enquête
Cette année, 22 femmes ont livré leur témoignage à la police, chacune encouragée par la prise de paroles des autres. Toujours d’après Libération, le rapport final qualifie PPDA de "prédateur sexuel abusant de sa notoriété et usant d’un mode opératoire similaire dans l’approche de ses victimes et dans la brutalité de ses actes, commis sans la moindre tentative de séduction, ni la moindre considération envers les femmes qui osaient refuser ses avances".
Le dossier avait été clos en juin par le parquet de Nanterre, le délai de prescription des faits (20 ans) ayant été dépassé. Le journaliste et écrivain ne pouvait être poursuivi. "Ne parlons plus jamais de zone grise dans cette lamentable affaire, qui n’est qu’une zone gigantesque et flagrante d’injustice", réclame un éditorial du quotidien.
Le cas Florence Porcel
Cependant, un cas est suffisamment récent pour ne pas être touché par la prescription, celui de l’écrivaine Florence Porcel, pour qui les faits se seraient déroulés entre 2004 et 2009. Elle s’est livrée une première fois dans Le Parisien en février dernier, menant à l’ouverture d’une enquête. C’est dans le cadre de celle-ci que d’autres victimes présumées ont été interrogées et que la parole s’est libérée.
Sa plainte, couplée à celle des 22 autres femmes, a elle aussi été classée sans suite pour "insuffisance de preuves". Le parquet de Nanterre avait souligné l’"absence de répétition, de pressions, de caractère sexualisé des propos tenus, ou encore de trace des appels téléphoniques". D’après Libération, Mme Porcel portera plainte à nouveau la semaine prochaine "avec constitution de partie civile pour rouvrir l’affaire".
PPDA a toujours rejeté les accusations de l’écrivaine, affirmant qu’il "n’y a jamais eu aucune forme d’emprise, ni a fortiori de contrainte". "De toute ma vie je n’ai jamais obligé quiconque à une relation sentimentale, ni bien évidemment à une relation sexuelle", assure-t-il sur sa page Facebook. Il ne s’est pas encore publiquement exprimé sur ces nouveaux témoignages révélés le 8 novembre dans Libération.
"Pas eu connaissance de ces faits"
Jean-Pierre Pernault, qui a travaillé pendant 20 ans avec Patrick Poivre d’Arvor, a été interrogé sur ces récits ce mardi 9 novembre sur Europe 1. Il assure n’avoir "jamais entendu parler de ces choses-là".
"Je sais que PPDA était un homme un peu lourd, avec des nanas. Elles en parlaient de temps en temps en riant. C'est la seule chose dont je peux témoigner", dit-il.
En mars dernier, le journaliste avait déjà été interrogé sur l’affaire PPDA, prenant la défense de son ancien collègue. "C’est lamentable que ce genre d’affaire sorte dans la presse", avait-il dénoncé sur RMC, affirmant que les allégations de Florence Porcel dans Le Parisien étaient des "mensonges". À la lecture de ces nouveaux témoignages, il insiste: "Je n’ai pas eu connaissance de ces faits quand j’ai partagé ma vie professionnelle avec Patrick".